Les statistiques et bases de données fiables constituent un outil indispensable pour l’élaboration des politiques économiques.
Kahina Mellab, chercheure en statistiques et en économie au Centre de recherche en économie appliquée pour de développement (Cread), souligne l’importance de mettre en place un département ministériel dédié à la prospective, où l’on y mobilise les compétences nationales qualifiées pour travailler sur les statistiques, qui servent de socle solide pour la planification des politiques économiques.
Les bases de données doivent être actualisées de manière permanente
Kahina Mellab estime que c’est essentiel que les différentes institutions de l’Etat se dotent de conseillers spécialistes en statistiques, à même de fournir des données fiables et de garantir la transparence en son sein. «L’accès facile aux données relatives aux différents secteurs doit être assuré. Cela relève même de la maîtrise du processus de production des données et de la constitution des bases de données», dit-elle.
Dans ce sillage, Mellab voit que ces bases de données doivent être actualisées de manière permanente. Pour ce faire, la chercheure préconise la mobilisation des équipes de recherche dans le but de réaliser des enquêtes de terrain. «L’élaboration des politiques des différents secteurs devrait partir d’un substrat qui est les statistiques reflétant la réalité de chaque secteur», insiste-t-elle.
La classification des données est de mise
En ce sens, l’interlocutrice met l’accent sur l’intelligence économique et à la veille à même de faire le distinguo entre les informations nécessaires dans la prise de décision et l’évaluation du développement socioéconomique et celles classées confidentielles et liées à la souveraineté nationale. «Une classification des données et des secteurs stratégiques est impérative et l’Office national des statistiques est appelé à faciliter l’accès aux données fiables pour les chercheurs, les académiciens et les étudiants», estime-t-elle.
Sur l’importance des statistiques dans le processus de la relance économique, l’expert en questions économiques et stratégiques Abdelkader Slimani voit que les statistiques collectées via des recensements permettent d’élaborer des stratégies plus efficaces sur le terrain. «Les recensements effectués dans les domaines agricole et industriel, en plus du recensement général de la population et de l’habitat, permettent d’avoir une vision plus claire et de dresser une cartographie nationale sur les investissements et l’aménagement du territoire», soutient-il, ajoutant que la planification des territoires économiques et l’implantation des bassins industriels doivent se baser sur des données fiables.
Les 5 piliers de la renaissance économique
Pour l’analyste, l’Etat dispose d’une meilleure marge de manœuvre dans la relance économique, grâce à ses politiques monétaire et bancaire, citant le volume actuel des réserves de change dépassant les 80 milliards de dollars. «Lorsque l’Etat jouit d’une flexibilité dans ses politiques monétaires et d’une bonne santé financière, il peut prendre des décisions visant à consolider la valeur du dinar et le pouvoir d’achat à travers l’augmentation des salaires et pensions», explique-t-il, rappelant que le budget public en 2024 s’élève à 114 milliards de dollars.
Slimani évoque, dans la foulée, les objectifs escomptés dans la relance économique, à savoir réaliser 30 milliards de dollars d’exportations hors hydrocarbures à l’horizon 2030 et hisser le PIB de 400 milliards de dollars, en plus de la création de 2 millions de micro-entreprises, dont 50.000 start-up. L’interlocuteur met le focus sur les secteurs stratégiques émergents, dont l’agriculture, les mines, la mécanique et l’économie numérique. «La renaissance économique en Algérie repose sur cinq piliers, à savoir les sécurités alimentaire, énergétique, sanitaire, hydrique et numérique», appuie-t-il.
Projets stratégiques
Slimani précise que le gouvernement mise, dans l’agriculture, sur la filière céréalière, les oléagineux les légumineuses et les cultures sucrières, rappelant, au passage, l’objectif d’augmenter les surfaces cultivées dans le Sud à 500.000 ha et les partenariats stratégiques noués dans ce domaine avec le Qatar et l’Italie. A propos de la sécurité énergétique, l’expert indique que «l’Algérie se lance dans des projets stratégiques à même d’augmenter la production brute de gaz naturel de 150 milliards mètres cubes en 2025, en plus de la perspective d’exporter de l’électricité en Europe et l’hydrogène vert».
Sur la sécurité hydrique, les projets de dessalement de l’eau de mer devraient répondre aux besoins nationaux à hauteur de 60%, à l’effet d’assurer un équilibre dans la répartition de cette denrée précieuse sur les wilayas. De même, la dynamique que connaît la production pharmaceutique nationale tend à consolider la sécurité sanitaire du pays, faisant remarquer que la facture d’importation des produits pharmaceutiques a baissé à 1,2 milliard de dollars en 2022. Tous ces chiffes, estime Slimani, reflètent l’importance de se projeter sur de bonnes bases en partant de données exactes.
A. Mehdid
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