- Les systèmes politiques influencent la marge de manœuvre des dirigeants, mais l’approche de Donald Trump met en lumière des dynamiques singulières qui pourraient redessiner les équilibres régionaux au Moyen-Orient et en Afrique.
- La politique étrangère américaine a historiquement suivi un chemin relativement stable, peu affecté par les différences entre administrations républicaines et démocrates. Trump, néanmoins, introduit un pragmatisme brut et un accent sur l’intérêt national américain au détriment des alliances traditionnelles.
- Durant sa première présidence, Trump a maintenu un discours où l’économie prime sur les engagements militaires, tout en exploitant la peur pour manipuler des régimes arabes et renforcer le complexe militaro-industriel américain.
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L’OTAN et la stratégie de Trump
Le Dr Abderrahmane Hadj-Nacer, économiste et ancien gouverneur de la Banque d’Algérie, analyse l’approche de Trump envers l’OTAN comme étant fondamentalement transactionnelle. Trump voit l’alliance comme un fardeau économique pour les États-Unis. Pendant son mandat, il a réclamé aux pays européens de contribuer davantage à la défense, accusant certains de réduire leurs dépenses plutôt que d’atteindre le seuil des 2 % du PIB.
Le retour possible de Trump à la présidence pourrait raviver les tensions transatlantiques. La question est de savoir si Trump réussira à mener cette politique en dépit de l’opposition du complexe militaro-industriel et des médias influents. En Europe, cela pourrait entraîner une déstabilisation accrue, alors que les nations du continent seront incitées à renforcer leur autonomie militaire tout en s’engageant dans une rivalité stratégique avec la Russie et d’autres puissances.
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Le Moyen-Orient : un jeu d’équilibres
Hadj-Nacer explique que Trump, fidèle à son slogan « America First », a une approche réaliste et peu empreinte de considérations éthiques. Sa première présidence a été marquée par des alliances pragmatiques, comme le chantage exercé sur les pays du Golfe en utilisant la menace iranienne. Trump a clairement fait comprendre aux dirigeants saoudiens et émiratis que, sans la protection américaine, leurs régimes pourraient être menacés par la puissance militaire de l’Iran.
Cette stratégie pourrait se répéter, avec un accent sur le soutien inconditionnel à Israël et le renforcement des accords de défense qui garantissent la domination américaine dans la région. Toutefois, les tentatives de l’Iran de relancer l’accord nucléaire et la dynamique régionale changeante, notamment le rapprochement entre l’Arabie saoudite et l’Iran, pourraient compliquer la donne.
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Les ressources et la posture africaine
Le Dr Hadj-Nacer met également en lumière l’impact potentiel de la politique de Trump en Afrique. L’Afrique reste une source essentielle de matières premières pour les grandes puissances, mais elle est souvent perçue comme une région dominée et exploitée. Trump, dans son pragmatisme, pourrait voir le continent comme une extension des stratégies économiques qui visent à contrôler l’accès aux ressources stratégiques.
Toutefois, Hadj-Nacer souligne que les États africains ont historiquement manqué d’une vision collective et d’une capacité à tirer parti de leur propre richesse pour influencer la politique étrangère des grandes puissances. Le défi pour les dirigeants africains sera de trouver des moyens de redéfinir leurs relations avec les États-Unis et d’autres puissances de manière à protéger leurs intérêts nationaux.
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L’ombre de la dette et la survie du dollar
L’économie américaine est confrontée à une dette galopante, et la question de la viabilité du dollar reste centrale dans l’analyse de Hadj-Nacer. Trump, conscient de la fragilité économique et de la dépendance croissante aux emprunts, pourrait chercher à réformer les mécanismes monétaires, y compris par l’introduction de monnaies numériques et une réduction de la dépendance au dollar dans le commerce international.
Cette posture pourrait avoir des implications directes sur le Moyen-Orient et l’Afrique, où les transactions pétrolières et la dépendance au dollar façonnent les équilibres économiques. Les pays qui dépendent fortement de l’exportation de ressources devront envisager de nouvelles alliances et des stratégies pour s’adapter aux changements potentiels.
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Conclusion : le pragmatisme face aux défis régionaux
En fin de compte, l’analyse du Dr Abderrahmane Hadj-Nacer montre que le retour de Trump à la présidence pourrait entraîner des ajustements significatifs dans les politiques étrangères au Moyen-Orient et en Afrique. Le pragmatisme de Trump, son approche décomplexée du pouvoir et son accent sur la suprématie économique au détriment des alliances traditionnelles annoncent des défis majeurs pour ces régions.
Les nations arabes et africaines devront repenser leur stratégie, non seulement pour s’adapter aux réalités d’un monde multipolaire, mais aussi pour mieux exploiter leurs propres ressources et influencer la direction que prendra la politique étrangère des États-Unis.
Pour une analyse complète et détaillée des propos du Dr Abderrahmane Hadj-Nacer, vous pouvez écouter le podcast sur la chaîne Afrique Émergente.
Hope&Chadia