La place boursière algérienne connaît un vent de renouveau marqué par l’entrée de nouvelles sociétés, notamment des start-ups, dans le paysage financier national. Cette dynamique est soutenue par des réformes réglementaires, des incitations fiscales et une volonté de diversifier les sources de financement des entreprises. Parmi ces récentes introductions, l’exemple de la start-up Mustouachir symbolise à la fois la mutation du tissu économique algérien et la montée en puissance d’un écosystème entrepreneurial innovant.
La Commission d’Organisation et de Surveillance des Opérations de Bourse (COSOB) joue un rôle central dans cette transformation. Son président, Rachid Mahmoudi, a rappelé que la COSOB occupe une position de régulation au sommet de l’architecture du marché financier algérien. Son objectif est triple : organiser le marché, surveiller son bon fonctionnement et protéger les investisseurs. À travers la délivrance des visas nécessaires à l’introduction en bourse, la COSOB garantit que chaque acteur respecte les normes de transparence et de gouvernance. Ces actions visent à instaurer un climat de confiance propice à l’émergence d’un marché boursier solide et attractif.
La start-up Mustouachir incarne ce nouvel élan. Initialement labellisée start-up par le ministère de l’Économie de la Connaissance et des Startups, Mustouachir a franchi un cap stratégique en se transformant en Société par Actions (SPA). Ce changement de statut, indispensable pour accéder au marché boursier, illustre la flexibilité des start-ups algériennes prêtes à s’adapter aux exigences de la finance moderne. Cette transformation ouvre la voie à un financement par l’émission de titres de capital, un levier bien plus accessible que les prêts bancaires souvent conditionnés à des garanties importantes, ce que les jeunes start-ups ne peuvent généralement pas fournir.
L’entrée de Mustouachir en Bourse peut générer un “effet boule de neige” selon Rachid Mahmoudi. Cette initiative, perçue comme un succès médiatique et financier, pourrait inspirer d’autres start-ups à suivre la même trajectoire. En diversifiant l’offre de titres, la Bourse d’Alger élargit les opportunités d’investissement et favorise la participation d’un plus large public. Ce phénomène contribue non seulement à renforcer le marché boursier mais aussi à stimuler l’économie réelle par le financement direct des entreprises innovantes.
L’évolution récente du cadre réglementaire illustre la volonté des autorités algériennes de rendre la Bourse plus accessible. Le règlement 2304, qui remplace le règlement de 1997, allège les contraintes d’introduction en bourse. Les anciennes exigences, notamment l’obligation d’introduire au moins 20 % du capital et de posséder un capital social minimum de 500 millions de dinars pour les grandes entreprises et 5 millions de dinars pour les PME, ont été supprimées. Aujourd’hui, il suffit aux entreprises de se constituer en Société par Actions (SPA) et de lever un capital de 10 millions de dinars pour intégrer le compartiment de croissance. Cette simplification des critères d’admission ouvre la voie à une nouvelle génération d’entreprises, en particulier les start-ups, pour accéder au financement par le marché des capitaux.
Le paysage boursier algérien est désormais divisé en cinq principaux marchés : le marché des titres de capital, le marché des créances des sociétés, le marché des organismes de placement collectif (OPCVM), le marché des investisseurs institutionnels, et le marché des titres émis par le Trésor public. Cette diversité des marchés offre une flexibilité accrue et permet aux entreprises, grandes ou petites, de choisir le segment qui correspond le mieux à leur stratégie de croissance et de financement.
L’année 2024 a marqué un tournant historique pour la Bourse d’Alger. Plusieurs opérations d’envergure ont eu lieu, à commencer par l’introduction de la banque CPA (Crédit Populaire d’Algérie) sur le marché. Cette introduction, la plus importante en Afrique avec une capitalisation boursière de près de 4 milliards de dollars, a fait date. Elle a été suivie par l’entrée d’autres entreprises majeures comme AOM Invest, Maghreb Leasing Algérie (MLA) et, plus récemment, Mustouachir. Ces admissions successives renforcent la crédibilité du marché financier algérien et attirent de nouveaux investisseurs, y compris étrangers.
Parallèlement, la BDL (Banque de Développement Local) prépare son entrée en Bourse, ce qui suscite de grandes attentes. Cette initiative est perçue comme un signal fort de la confiance accordée au marché boursier algérien. Les incitations fiscales récemment mises en place jouent également un rôle clé dans l’engouement des entreprises à rejoindre la Bourse. Ces incitations permettent de réduire les charges fiscales des entreprises introduites, rendant l’option de la Bourse plus compétitive par rapport aux financements bancaires traditionnels.
Un autre élément clé de la mutation du marché boursier est l’introduction des emprunts obligataires, qui permettent aux entreprises de se financer en émettant des obligations. L’exemple de Tosali Algérie est emblématique. Avec un emprunt obligataire de 15 milliards de dinars, cette opération constitue un record pour le marché obligataire algérien. Ce type de financement présente des avantages significatifs pour les entreprises cherchant à éviter la dilution du capital social. Il permet aussi de diversifier les options de financement à des taux potentiellement plus compétitifs que ceux du secteur bancaire.
En conclusion, la Bourse d’Alger se réinvente et devient un levier central du financement des start-ups et des grandes entreprises algériennes. La COSOB, en tant qu’autorité de régulation, assure la transparence et la sécurité des opérations, tandis que les réformes du cadre réglementaire facilitent l’accès des start-ups au marché des capitaux. L’entrée de Mustouachir en Bourse est perçue comme un catalyseur du changement, inspirant d’autres jeunes entreprises à explorer cette voie. La dynamique enclenchée par le CPA, AOM Invest et Maghreb Leasing Algérie témoigne de l’attractivité croissante de la Bourse d’Alger. Les prochaines introductions, notamment celle de la BDL et des futurs emprunts obligataires, continueront de transformer le paysage économique algérien, rendant le marché plus inclusif et plus diversifié. Par cette stratégie, l’Algérie s’aligne sur les pratiques mondiales et affirme son ambition de devenir un hub financier régional.
Hope&Chadia