par Hope&ChaDia
Depuis quelques jours, l’agitation est totale dans une certaine presse française. Boualem Sansal vient d’être condamné à cinq ans de prison ferme en Algérie, et voilà que, déjà, on exige, on suppute, on programme : “Tebboune va le gracier”, “Il n’a pas le choix”, “Ce serait plus digne”. Une frénésie politico-médiatique aux airs de post-colonialisme, où l’Algérie n’a qu’un seul rôle à jouer : obéir à un tempo dicté depuis Paris.
Soyons clairs. On peut penser ce qu’on veut de la condamnation, s’inquiéter pour l’état de santé de l’écrivain. Mais ce que certains éditorialistes feignent d’ignorer, c’est que l’Algérie est un État souverain. Elle a ses lois, ses tribunaux, son chef d’État. Le pouvoir judiciaire a rendu son verdict, et s’il doit y avoir grâce qui est tres peu probable, elle ne viendra ni sous pression, ni à l’heure convenue par le microcosme germanopratin.
Ce n’est pas à L’Obs, à France Inter ou à cette droite “culturelle” en roue libre de dire à un président algérien quand il est temps de faire preuve de clémence. Parce que, derrière leurs envolées humanitaires – sélectives, faut-il le rappeler, quand on voit le prisonnier libanais Georges Ibrahim Abdallah toujours incarcéré en France depuis 1984, malgré avoir purgé sa peine depuis plus de vingt ans – se cache ce ton bien connu : condescendant, paternaliste, presque nostalgique. Celui qui explique, qui sermonne, qui “éduque les indigènes”, version 2025. Un remake affligeant.
Et surtout, qu’on nous épargne les grands airs de morale venus d’un pays qui traverse un capharnaüm politique. Oui, capharnaüm : c’est le mot qu’a employé Abdelmadjid Tebboune lui-même pour décrire le désordre français. Alors, peut-être qu’un peu de pudeur médiatique serait la bienvenue, avant de projeter ses certitudes sur un pays qui, lui, n’a pas mis le feu à ses institutions tous les six mois.
Mais il y a plus absurde encore. Car si cette facho-sphère politico-médiatique prétend vraiment défendre Boualem Sansal – honnêtement, sincèrement –, alors le plus grand service qu’elle puisse lui rendre est de l’oublier. De le laisser hors du tumulte. Hors de leurs colonnes qui n’existent que pour faire pression. Hors de leurs stratégies d’agitation. Car peut-être que le silence, le vrai, celui qui respecte autant l’homme que le pays, écourterait justement l’attente, accélérerait peut-être même, en toute discrétion, une décision de grâce… si – et seulement si – l’État algérien l’estime justifiée au vu des faits reprochés.
Mais non. Il faut qu’ils occupent l’espace, qu’ils crient, qu’ils hurlent à la “dictature”, qu’ils rejouent leur pièce favorite : celle du bon écrivain persécuté par les méchants du Sud. Sans jamais se demander pourquoi leur voix est si peu entendue là-bas. Sans jamais envisager qu’ils ne sont plus les maîtres de rien.
L’Algérie, et avec elle le président Tebboune, sont maîtres de l’horloge. Et s’il leur prend un jour de signer une grâce, ce ne sera ni pour sauver la face, ni pour satisfaire une une de presse. Ce sera parce qu’ils l’auront décidé. Souverainement. Calme. Hors du capharnaüm.
En attendant, que la France se taise. C’est parfois dans le silence que naissent les gestes les plus forts.
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Très bel article