Dans un récent podcast intitulé ” Tout comme un fourreau ne porte pas deux épées, une tête ne supporte pas deux turbans, ni un navire deux capitaines ”, le Pr. Kamel Dib s’est penché sur une question délicate mais essentielle dans le monde du sport en Algérie : le conflit d’intérêts. Il prend le temps d’expliquer comment certaines situations, notamment liées au cumul de fonctions, peuvent compromettre la bonne marche des institutions sportives. J’ai trouvé que sa façon d’aborder ce sujet précis du sport était à la fois claire et pertinente, surtout à la lumière de ce qui se passe actuellement dans le football algérien.
Le conflit d’intérêts, selon le Pr. Dib, surgit lorsqu’un individu est amené à prendre des décisions influençant une structure dont lui-même ou ses proches tirent un avantage personnel. Cela se traduit, par exemple, lorsqu’un directeur d’une entreprise attribue un contrat public à une société appartenant à sa famille. Dans le monde du sport, ce type de situation devient critique, surtout lorsque le même responsable est chargé de superviser et d’exécuter des décisions qui devraient rester impartiales.
Mais c’est surtout le cas de M. Walid Sadi, Ministre des Sports et Président de la Fédération Algérienne de Football (FAF), qui retient l’attention du professeur. Ce cumul de fonctions entre une position ministérielle et une présidence fédérale soulève de potentiellement des problèmes sérieux , directement liés à l’indépendance des structures sportives.
Sur le plan international, les standards en matière de conflits d’intérêts et de cumul sont stricts dans le domaine du sport : l’objectivité et la neutralité sont essentielles pour garantir un traitement équitable de toutes les disciplines et de toutes les fédérations. Un responsable qui se retrouve à la fois juge et acteur dans un même domaine compromet cette neutralité. Dans le cas du football, bien que la FIFA n’interdise pas explicitement à un ministre d’être président d’une fédération, son Code d’éthique (Article 19) exige que les dirigeants évitent toute situation de conflit d’intérêts. L’article stipule que « les personnes soumises au présent code doivent éviter toute situation qui pourrait conduire à un conflit d’intérêts réel ou potentiel….. »
Un autre aspect important soulevé par le Pr. Dib concerne la nature même des fonctions occupées : Walid Sadi est un élu à la tête de la FAF, et aussi Ministre. Ce mélange entre légitimité élective, issue du monde du football, et désignation représentant l’autorité de l’État, rend la situation encore plus confuse. Un président de fédération défend des intérêts spécifiques à sa discipline, alors qu’un ministre est censé veiller à l’ensemble du secteur sportif, sans privilégier une fédération sur une autre. Cumuler ces deux sources de pouvoir met donc en tension l’équilibre du secteur sportif.
Et dans ce cas precis, L’Article 62 de la loi sportive algérienne (Journal Officiel n°39 du 31 juillet 2013) interdit explicitement le cumul entre une fonction élective ou exécutive au sein d’une structure sportive (comme la présidence d’une fédération) et une fonction administrative étatique dotée d’un pouvoir de décision (tel un ministère). Cette disposition, sauf abrogation ou modification ultérieure, s’applique directement au cas du ministre Walid Sadi, qui cumule son portefeuille gouvernemental avec la présidence de la Fédération Algérienne de Football (FAF), créant ainsi des risques de conflit d’intérêts. Le texte vise précisément à éviter de telles situations, où un responsable public pourrait influencer, en tant qu’autorité de tutelle, une entité qu’il dirige parallèlement. C’est exactement ce que souligne le Pr. Dib dans son intervention, pointant une violation directe de ce principe dans le cas présent.
Le Pr. Dib va plus loin en évoquant des situations precises : lors des assemblées de la FAF, les membres votants voient-ils en M. Sadi un président parmi eux ou un ministre représentant le pouvoir central ? Cette dualité fausse les équilibres internes du football algérien et crée une pression implicite sur les acteurs du secteur. En cas de problème au sein d’une autre fédération, M. Sadi interviendrait comme ministre pour rétablir l’ordre. Mais si le problème surgit à la FAF, pourrait-il se sanctionner lui-même ? Voilà la limite évidente de cette situation.
Je trouve que l’analyse du Pr. Dib pose une vraie problematique a resoudre au plutot dans le sport algérien. Ce n’est pas une question abstraite, c’est une réalité qui touche directement les athlètes, les dirigeants et les supporters et qui touche au develloppement du le sport en Algerie.
Pour ceux qui souhaitent écouter l’intégralité de ce podcast, il est disponible en arabe sur YouTube : Lien du podcast. Les francophones peuvent activer les sous-titres en français pour suivre les propos du Professeur.