La société israélienne se fissure de l’intérieur, l’Iran tient tête sans fléchir, et l’Algérie reste droite dans ses bottes. Une heure d’analyse lucide et tranchante avec Jacob Cohen, spécialiste du dossier israélien.
Invité par JazairHope au lendemain des frappes américaines sur l’Iran, Jacob Cohen ne mâche pas ses mots. Pour lui, cette attaque orchestrée par Donald Trump n’est rien d’autre qu’un “coup à blanc”. Les cibles visées n’avaient plus d’intérêt stratégique, certains sites étant même probablement vides.
En clair, Trump a joué une carte pour satisfaire les pressions du lobby sioniste américain, tout en évitant une réelle entrée en guerre. Une opération de façade, motivée, selon Cohen, par les soutiens financiers massifs qu’il a reçus de figures pro-israéliennes comme la veuve Sheldon Adelson. Résultat : Israël n’a gagné ni avantage militaire, ni répit stratégique.
Plus surprenant encore, selon Jacob Cohen, cette “fausse frappe” a mis Israël dans une position encore plus délicate : si Trump a éliminé la menace, alors pourquoi Israël poursuivrait-il l’escalade ? Une subtilité cynique qui, selon Cohen, révèle le style de poker stratégique du milliardaire américain.
Mais le vrai tournant, affirme-t-il, vient de l’échec psychologique que subit Israël depuis les frappes iraniennes. Bien que les pertes matérielles soient limitées, l’effet sur la population est colossal. Panique, exode vers Chypre, fermeture des écoles, désorganisation sociale : le ver est dans le fruit. Même des figures sionistes, comme le maire de Haïfa, appellent désormais à une trêve. Pour Cohen, il ne fait aucun doute : “le cœur israélien est touché comme jamais auparavant.”
Un autre angle capital de l’interview porte sur l’AIEA. Jacob Cohen évoque des fuites montrant que l’agence, dirigée par Rafael Grossi, aurait transmis à Israël des informations ayant permis l’assassinat de scientifiques iraniens. Une trahison du mandat onusien, qui pousse Téhéran à refuser désormais tout contrôle par l’agence. Grossi, selon Cohen, n’est qu’un pion désigné par les États-Unis.
Du côté militaire, Cohen dépeint un Israël surpris par la stratégie iranienne : saturation du Dôme de fer, variation du rythme de frappes, ciblage précis d’infrastructures sensibles. Un Iran plus méthodique et graduel que prévu, qui pousse Tel-Aviv à perdre ses repères.
Et si certains espéraient une riposte américaine massive, Cohen explique que l’Iran semble avoir anticipé en n’attaquant que des bases américaines vidées à l’avance. Une manière de jouer à la limite sans donner prétexte à une escalade.
Sur les soutiens extérieurs, Cohen croit à un appui logistique chinois, possiblement russe. Pas d’engagement direct, mais un pont aérien pour soutenir Téhéran. Selon lui, l’équilibre bascule : “l’Iran n’est pas isolé, Israël commence à l’être.”
Et c’est bien l’effondrement intérieur israélien que Jacob Cohen envisage désormais. Pas un effondrement militaire ou externe, mais une dislocation sociétale. Il rappelle que des dizaines de milliers d’Israéliens possèdent un second passeport et que les élites, déjà fragiles, fuient. “Ce pays ne tient que par des tensions externes. À l’intérieur, il est morcelé, antagonisé, matérialiste, instable.”
Dans ce contexte, seuls resteraient, selon lui, les religieux, les extrémistes, les fanatiques messianistes. Mais peuvent-ils faire tourner une économie ? Tenir un appareil militaire ? Cohen en doute.
Le scénario qu’il dessine est radical : une “villa dans la jungle” assiégée, où les plus éduqués s’enfuient, où la population perd confiance et où les repères identitaires se désagrègent. Une population israélienne désorientée, désemparée, qui découvre l’impuissance.
Et l’Algérie ? Elle tient bon. Jacob Cohen rend hommage à la fermeté algérienne, notamment au Conseil de sécurité. Malgré les pressions, l’Algérie ne plie pas, fidèle à son ADN historique. Une constance rare dans un monde arabe largement soumis, souvent neutralisé ou divisé.
Sur le plan régional, Cohen affirme que le projet israélo-américain visait à neutraliser toute résistance : Saddam, Kadhafi, la Syrie, le Hezbollah… Tous ont été abattus ou affaiblis. Restait l’Iran, cible finale. Mais le plan ne s’est pas déroulé comme prévu.
Il va plus loin : si l’État sioniste tel qu’on le connaît disparaît, les Occidentaux s’adapteront sans scrupule. “L’Occident n’a rien fait pour sauver les juifs sous Hitler. Il sacrifiera Israël si ses intérêts l’exigent”, assène-t-il.
Pire encore, prévient-il : des factions israéliennes extrémistes pourraient frapper l’Europe si elles sentent la fin venir. Possédant des sous-marins nucléaires, Israël reste un acteur imprévisible si poussé à l’agonie.
Enfin, Cohen revient sur le 7 octobre, qu’il considère comme une manipulation orchestrée pour justifier l’offensive sur Gaza, et peut-être sur l’Iran. Selon lui, l’élite israélienne pensait pouvoir rééditer les scénarios syrien ou libyen. Mais l’Iran a tenu bon. Et enseigne au monde entier qu’organisation et résilience peuvent faire vaciller les géants.
L’interview se termine sur une note d’espoir. Jacob Cohen, souvent perçu comme pessimiste, conclut cette fois sur la nécessité de résister, de tenir, et de croire que l’histoire réserve parfois de bonnes surprises. “Il faut aller jusqu’au bout, sinon ils reviendront. Toujours.”
Hope&ChaDia
JazairHope | Le meilleur est à venir.