Ce que révèle vraiment le communiqué des AE algérien
Le communiqué publié par le ministère algérien des Affaires étrangères, ce mercredi 24 juillet, pourrait passer pour une simple note de protestation. Mais aussi derrière un langage diplomatique mesuré, le texte révèle une faille profonde dans le fonctionnement de l’État français. Une faille suffisamment sérieuse pour poser, froidement, la question suivante : la France vit-elle les prémices d’un coup d’État silencieux ?
Une mesure prise dans l’ombre
L’objet officiel du communiqué concerne l’entrave à la circulation de valises diplomatiques algériennes dans les aéroports français. Mais le cœur du problème est ailleurs. Selon les termes mêmes du ministère algérien, la mesure litigieuse a été « prise par le ministère français de l’Intérieur, à l’insu du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, dans l’opacité totale, sans la moindre notification officielle ».
Ces quelques lignes suffisent à dessiner le portrait d’un appareil d’État désorganisé, où les ministères régaliens agissent sans coordination, voire en conflit d’autorité. Dans un État de droit fonctionnel, une telle décision unilatérale, affectant directement une mission diplomatique étrangère, aurait nécessairement été instruite, validée et notifiée par le Quai d’Orsay. Ce ne fut pas le cas.
Dysfonctionnement ou prise de contrôle ?
En diplomatie, l’absence de notification officielle n’est jamais un détail. Elle signifie que l’action n’est pas assumée. Qu’elle échappe aux canaux classiques. Et qu’elle pourrait relever, soit d’un dysfonctionnement grave, soit d’un glissement délibéré du pouvoir exécutif vers des centres de décision non déclarés.
À ce stade, deux hypothèses s’imposent : soit le ministère de l’Intérieur agit en roue libre, hors de tout contrôle politique centralisé ; soit il applique une stratégie plus large de reprise en main sécuritaire de la conduite des affaires extérieures — ce qui serait, de facto, un changement de régime par le bas.
Une fracture régalienne
Dans un État moderne, la souveraineté repose sur l’unité d’action de ses institutions. Lorsqu’un ministère s’arroge une compétence qui ne relève pas de lui — ici, les affaires diplomatiques — et agit sans coordination avec les organes légitimes, il y a atteinte directe au principe de souveraineté unifiée.
Ce que révèle le communiqué algérien, c’est donc une fragmentation du pouvoir souverain français. Non pas une opposition partisane ou idéologique, mais un conflit d’attribution entre deux piliers de l’appareil d’État : l’Intérieur et les Affaires étrangères. Une rupture de la chaîne de commandement. Une crise de légitimité interne.
La tentation sécuritaire
Cette dérive n’est pas nouvelle. Depuis plusieurs années, le ministère de l’Intérieur s’est imposé comme le véritable centre de gravité de l’État, supplantant peu à peu les institutions civiles dans la gestion des crises. Les lois d’exception, les prérogatives antiterroristes, la surveillance généralisée, les états d’urgence reconduits sans fin : tout cela a contribué à faire glisser la République vers un exécutif de plus en plus fondé sur la logique de contrôle plutôt que sur celle du droit.
L’épisode actuel marque un tournant : ce n’est plus uniquement la société civile qui est soumise à cette verticalité sécuritaire, c’est désormais l’appareil étatique lui-même. Le Quai d’Orsay, pilier de la diplomatie française depuis des décennies, se retrouve court-circuité sur une question centrale de droit international. Et il ne semble pas en mesure de réagir.
Une alerte froide venue de l’étranger
Le plus inquiétant, dans cette affaire, c’est que l’alerte ne vient pas de l’intérieur de la République. Elle vient d’un partenaire étranger, l’Algérie. En rendant publique la nature et les conditions opaques de la mesure française, l’Algérie agit comme un observateur externe, lucide, qui constate une perte de contrôle au sommet de l’État français.
Il ne s’agit pas d’une provocation. Il ne s’agit pas non plus d’une escalade diplomatique. Il s’agit d’un constat. Et ce constat, glacial dans sa formulation, ne peut être ignoré : la France ne maîtrise plus la cohérence de son propre appareil d’État.
Et maintenant ?
En rendant publique la nature et les conditions opaques de la mesure française, l’Algérie agit comme un observateur extérieur, lucide, qui alerte sans fracas. Ce n’est pas une escalade. Ce n’est pas une provocation. C’est un constat froid, posé, qui laisse entrevoir une vérité dérangeante : la République française ne semble plus pleinement maîtriser les leviers de sa propre souveraineté.
Le déni est possible. L’inertie aussi. Mais l’alerte est désormais écrite, noire sur blanc, dans le langage feutré de la diplomatie. Et cette fois, elle vient d’Alger.
Hope & ChaDia
— « L’effondrement ne fait pas de bruit quand il vient de l’intérieur. »