Donald Trump a présenté son projet comme un « plan de paix ». En vérité, il s’agit d’un scénario dangereux, que l’on pourrait appeler sans détour un traquenard géopolitique. Derrière l’emballage du mot « paix », tout est fait pour satisfaire intégralement les demandes israéliennes, garanties par des engagements fermes, alors que les demandes palestiniennes sont réduites à des formules vagues, sans calendrier, sans garanties, sans organe de mise en œuvre.
Pire encore, les personnes et institutions présentées comme chargées de veiller à l’application du plan sont Donald Trump lui-même et Tony Blair. Or ces deux figures sont perçues comme étroitement alignées sur la vision israélienne. Comment croire à une paix équitable quand les arbitres sont clairement identifiés comme proches d’une seule partie ?
Je compare ce projet à Oslo. Souvenons-nous : Oslo devait, en théorie, aboutir à un État palestinien souverain au plus tard en 1999. Un quart de siècle plus tard, où en est-on ? L’Autorité palestinienne a aujourd’hui moins de pouvoir qu’un conseil municipal. Le rappel est brutal mais nécessaire : des promesses solennelles avaient été faites, des signatures avaient été apposées, mais tout cela n’a conduit qu’à un mirage.
Le mécanisme est toujours le même : des promesses généreuses sont distribuées au monde arabe, mais avec une arrière-pensée constante. Les Israéliens récoltent des garanties concrètes, tandis que les Palestiniens n’obtiennent que des phrases creuses. On investit dans « le pétrole et dans la bêtise arabe » : c’est l’expression juste pour dénoncer la façon dont les promesses internationales exploitent la crédulité de certains dirigeants arabes.
L’objectif réel ressort clairement : pousser les États arabes à soutenir des mesures conduisant au désarmement de la résistance, au démantèlement des structures militaires de Hamas, et à transformer ainsi un cessez-le-feu en capitulation. Derrière la façade de reconstruction et d’aide internationale, il ne s’agit que de préparer le terrain pour forcer les habitants de Gaza à partir, puis offrir la possibilité d’un changement de contrôle territorial à terme.
De fait, ce plan apparaît comme un piège : on peut y entrer, mais il est difficile d’en sortir. Son résultat final n’est pas la paix, mais bien « le décès définitif de la cause palestinienne ». Car il ne s’agit pas seulement de promettre quelques milliards pour rebâtir des immeubles. Il s’agit de créer une situation où, après la remise des armes, les Palestiniens n’auraient plus aucun levier — ni politique, ni institutionnel.
Oslo, avec ses défauts, avait au moins le poids d’une reconnaissance internationale, un horizon clair et un calendrier. Ici, tout est encore plus déséquilibré et plus embrouillé. Si Oslo n’a rien donné, comment croire que ce plan-ci, bâti pour répondre aux intérêts d’Israël et de son Premier ministre Benjamin Netanyahu avec Jared Kushner, puisse offrir autre chose qu’une liquidation politique de la cause palestinienne ?
La démonstration est limpide : ce plan n’est pas une ouverture vers la paix, mais un dispositif de neutralisation. Il se donne pour mission d’enterrer vivant ce qu’il reste de la cause palestinienne, en la noyant sous des promesses illusoires et des mécanismes biaisés.
Prendre au sérieux ce plan, c’est admettre que ce que la diplomatie propose pourrait réaliser par d’autres moyens ce que la guerre ni même le génocide des populations n’ont pas permis d’imposer. Mieux vaut garder la lucidité et exiger des garanties réelles, plutôt que de retomber dans le mirage d’accords sans contreparties vérifiables. Ce texte est un constat et un point de vue : il n’offre pas ici une alternative clé en main — ce n’est pas son propos. Le but est précisément d’énoncer crûment le diagnostic : si aucune réponse n’émerge à partir de cette lecture réaliste, il ne s’agira pas d’une simple désillusion, mais du risque réel d’enterrer la cause palestinienne et d’amorcer la fin du monde arabe puis du monde tout court. Ce constat doit provoquer la réflexion et la mobilisation : toute alternative crédible devra naître de cette prise de conscience si l’on veut aider la résistance et nous meme à se déprendre de ce traquenard.
Votre point de vue est le bienvenu.
Hope&ChaDia