Publié le 6 avril 2023 sur Radiocanada.ca
Figure emblématique de l’Algérie, l’émir Abdelkader a lutté pendant 15 ans contre l’occupation française dans ce pays du Maghreb. Sylvain Cornac, chargé de cours à l’Université de Montréal, nous parle de ce héros de la nation algérienne.
L’émir Abdelkader naît au début du 19e siècle dans une zaouïa, un centre spirituel où « l’on cultive la connaissance, la culture musulmane ». À cette époque, l’Algérie se trouve à la frontière du Maroc chérifien et des confins de l’Empire ottoman. Le pays se trouve sous la pression de la supériorité militaire des Occidentaux, qui ont achevé leur révolution industrielle.
Le père de l’émir Abdelkader combat la France en 1830 pour « défendre une terre musulmane », explique Sylvain Cornac. « On n’est pas, à cette époque-là, dans un esprit nationaliste. » En 1832, il passe la main à son fils.
L’émir organise un embryon d’État en levant des impôts et en faisant appliquer des lois. Pour résister contre la puissance militaire qu’est la France, il compte sur le fait que les troupes françaises rentreront de plus en plus à l’intérieur du pays. La stratégie ne fonctionne pas, car vers 1840, la France colonise le pays. En plus, les soldats français ruinent le pays pour affaiblir l’émir.
L’émir Abdelkader est défait en 1847 et emprisonné en France. « C’est lui qui s’est rendu. On lui avait promis, en fait, qu’il pourrait se retirer vers une terre musulmane, probablement l’Empire ottoman », précise Sylvain Cornac. Il est enfermé à Amboise pendant quatre ans. « Il n’aura de cesse de rappeler à la France sa promesse de le libérer. […] Les autorités militaires ne sont pas prêtes à le laisser aller. »
Napoléon III le libère en 1852, avec l’accord des Ottomans. L’émir Abdelkader s’installe à Damas, en Syrie. Sa figure spirituelle, qui favorise le dialogue interreligieux, se confirme. « Il est accueilli comme un prince régnant, raconte Sylvain Cornac. Il va même enseigner à la grande mosquée de Damas. » Au cours de ce séjour, il protège des chrétiens qui sont la cible de musulmans.
En terminant, Sylvain Cornac raconte pourquoi le nom et l’image de l’émir sont récupérés par l’indépendance en 1962. « C’est un personnage au milieu des mondes, au milieu des empires qui a une spiritualité très profonde », selon le chargé de cours, qui lui a consacré sa thèse de doctorat.
PHOTO : Wikipédia L’émir Abdelkader à Damas, en Syrie, en 1862
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