Home Algérie Algérienne L’histoire de milliers de « déportés » algériens au large de Cannes se dévoile comme un « devoir de mémoire »

L’histoire de milliers de « déportés » algériens au large de Cannes se dévoile comme un « devoir de mémoire »

by Hope Jzr
0 comment
A+A-
Reset

EXPOSITION Entre 1841 et 1884, au temps de la conquête de l’Algérie par l’Etat français, près de 4.000 personnes ont été arrachées à leur pays et transférées sur l’île Sainte-Marguerite, au large de Cannes. Une exposition présentée sur place leur est consacrée

Dans les années 1970, des travaux forestiers menés par des harkis au large de Cannes, sur l’île Sainte-Marguerite, avaient permis de mettre au jour un des plus anciens cimetières musulmans de l’Hexagone. Au milieu des sépultures, une stèle saluait la mémoire de « nos frères morts pour la France ». Erreur historique. Elle a été retirée l’an dernier. Les 274 corps enterrés là appartenaient en fait aux milliers de Nord-Africains arrachés à leur terre natale et détenus sur place par l’Etat français. Au temps de la conquête de l’Algérie. Entre 1841 et 1884. L’exposition « Prisonniers en terre d’exil », présenté jusqu’au 29 octobre au Musée du Masque de fer et du Fort royal*, fait toute la lumière sur ces faits.

Le Fort royal de l'île Sainte-Marguerite (à gauche sur l'îmage)
Le Fort royal de l’île Sainte-Marguerite (à gauche sur l’îmage) – Eric Dervaux

« Et c’était une volonté du maire de Cannes, David Lisnard, lui-même, explique le directeur adjoint des musées de la ville Christophe Roustan Delatour, commissaire de l’exposition. En 2018, il nous a demandé de lancer un projet d’étude et de valorisation du cimetière musulman. Compte tenu de la sensibilité du sujet, qui touche à l’histoire coloniale, il a insisté pour que nos recherches soient les plus précises possibles. Tout ça ne pouvait pas rester invisible. C’était un véritable devoir de mémoire. »

« Sans culpabilité posthume ni esprit de revanche »

Avec l’appui d’Anissa Bouayed, une historienne franco-algérienne, et après deux ans de recherches, de nombreux documents attestant du sort de ces « déportés » (« c’est le terme qui était employé à l’époque », rappelle Christophe Roustan Delatour) sont rassemblés. « Point de jugement ici, point de morale, point de politique non plus, mais des faits, prévient aussi David Lisnard dans le catalogue de l’exposition. Le destin de ces populations d’Algérie a croisé nos rivages et nous devons le saisir, le comprendre, l’assimiler, sans culpabilité posthume ni esprit de revanche […] dans une mémoire apaisée et respectée des deux côtés de la Méditerranée. »

Une liste de prisonniers datée du 30 janvier 1846
Une liste de prisonniers datée du 30 janvier 1846 – Ville de Cannes

Des lettres officielles de l’Armée, des listes de noms et des photographies sont notamment exposées. Tout commence le 30 avril 1841. Un arrêté du ministre de la guerre, le maréchal Soult, affecte la forteresse de l’île Sainte-Marguerite à la détention des « prisonniers de guerre provenant de l’Algérie » où la France a entamé sa conquête dix ans plus tôt. « Ils sont envoyés là sans procès, sans jugement. De l’autre côté de la Méditerranée, on leur confisque même leurs terres. Ils étaient en fait des otages que l’on a soustraits à cause de l’influence qu’ils avaient dans leur pays », révèle le responsable des musées.

« Ce n’était pas du tout un camp d’extermination »

Le Fort royal, où était enfermé le Masque de fer le siècle précédent, voit donc débarquer près de 4.000 de ces détenus en un peu plus de 40 ans. Des membres de la fameuse Smala Abd-el-Kader y sont notamment envoyés en 1843. « Il y a eu jusqu’à 700 personnes en même temps. Voire peut-être même 800. On essayait de les garder tous en bonne santé. Ce n’était pas du tout un camp d’extermination. Les conditions étaient plutôt bonnes », relate Christophe Roustan Delatour. Elles sont reconstituées dans l’exposition avec des aquarelles de l’illustrateur Jacques Ferrandez. Trois scènes de la vie quotidienne sont présentées au plus proche de la réalité de l’époque.

Sur place, il y avait une infirmerie. On célébrait des naissances, des mariages. On faisait même venir de la semoule pour la confection des couscous. La religion était également respectée. « Un espace où étaient pratiquées les ablutions rituelles a pu être identifié. Un lieu autour d’un arbre qui servait pour la prière est également mentionné dans des documents », précise-t-il.

« Des enfants n’auront vu que cette île »

Mais il y a aussi des décès. « Certains de ces prisonniers sont morts de nostalgie. Loin de l’Algérie, ils se sont laissés mourir. A cause de la promiscuité, il y a eu aussi des épidémies, de dysenterie notamment. Et des enfants, nés sur place, n’auront vu que cette île dans leurs existences parfois très courtes », explique encore l’historien.

Cette déportation vers l’Hexagone, également organisée dans une moindre mesure dans des forts situés à Agde et à Toulon, cessera finalement en 1884. « L’armée française a considéré que l’éloignement de ces détenus n’était pas assez dissuasif pour faire avancer leurs plans en Algérie, conclut Christophe Roustan Delatour. C’est ensuite vers la Nouvelle-Calédonie et la Guyane, dont on savait déjà qu’ils ne reviendraient jamais, que ces prisonniers ont été envoyés. »

*L’exposition « Prisonniers en terre d’exil » est présentée jusqu’au 29 octobre. Le Musée du Masque de fer et du Fort royal, sur l’île Saint-Marguerite (accessible en navettes maritimes depuis le Vieux-Port de Cannes) est ouvert tous les jours de l’été entre 10 heures et 17h 45. Billet à acheter sur place ou en ligne : 6,50 € (3,50 € en tarif réduit).

Source : https://www.20minutes.fr/arts-stars/culture/4044802-20230708-histoire-milliers-deportes-algeriens-large-cannes-devoile-comme-devoir-memoire

You may also like

Leave a Comment

Quick Links

À propos de nous

L’idée de créer le site JAZAIRHOPE.ORG est née durant la période du Hirak où l’on a pu observer la prolifération d’une multitude de médias, tous supports confondus, véhiculant des affirmations fallacieuses, et fake news visant à le faire dévier le Hirak de son caractère pacifique et entraîner la nation dans une spirale de violence et de chaos. S’inspirant des principes inscrits dans la Charte du 1er Novembre 1954 et guidé par ses valeurs, JAZAIRHOPE.ORG sera le média de tous les Algériens et Algériennes  patriotes, fiers de leur pays Continent et de sa diversité culturelle. Ce média  portera VOTRE voix.

Qui nous sommes

Hope JZR, fondateur du site et également détenteur de la chaîne youtube éponyme, a réuni autour de son projet une équipe de bénévoles issus du territoire national et de la diaspora, aux profils aussi divers que variés. Un cercle de patriotes qu’il ne tient qu’à vous et à votre enthousiasme d’agrandir. En effet, nous invitons tous les patriotes animés d’une volonté positive et constructive à nous rejoindre dans cette entreprise d’édification de l’Algérie de demain que nous appelons de tous nos vœux. Attachés à la devise   « Du peuple, par le peuple, pour le peuple », nous sommes  convaincus  que votre voix compte et sera entendue.

Ce que nous faisons

Nous œuvrons continuellement et scrupuleusement à procurer au public une information fiable, objective et éminemment positive. Fidèles au credo du fondateur « semer l’espoir », notre ambition est de créer une dynamique suscitant l’enthousiasme et fédératrice de compétences  au service de leur patrie. Sans pour autant verser dans le satisfecit ou l’euphorie béate. Notre site se veut  une plateforme consacrée à la promotion d’une image positive de l’Algérie, nos publications se focalisent essentiellement sur les performances et les réalisations allant dans ce sens. Toutefois cette démarche n’exclut pas de porter un regard critique sur les carences, les échecs ou les difficultés auxquelles font face nos concitoyens dans leur vie quotidienne, mais celle-ci ne peut s’envisager que dans une perspective constructive en y proposant les solutions idoines ou en alertant nos élites pour qu’elles y remédient. Notre seule exigence et notre leitmotiv : positivité,  « constructivité », et espoir.

Notre mission

Notre objectif est de faire de JAZAIRHOPE.ORG le premier média consacré exclusivement à l’information positive, afin de semer l’espoir parmi nos jeunes et moins jeunes et susciter en eux  l’envie de participer à l’essor et au développement de la mère-patrie. L’édification de l’Algérie de demain dont nous rêvons et à laquelle nous aspirons sera une œuvre collective de tous les citoyens jaloux de la grandeur de leur nation et de son rayonnement. Elle sera garante de la préservation de son indépendance et de sa souveraineté et fera honneur aux legs et aux sacrifices de nos valeureux chouhadas. 

© 2023 – Jazair Hope. All Rights Reserved. 

Contact Us At : info@jazairhope.org

Letest Articles