Par Mr Hassen Kacimi
Les séismes de forte magnitude que nous avons enregistrés en Turquie et récemment au Maroc, nous interpellent vivement, et cela pour plusieurs raisons.
L’Algerie, située sur une faille sismique importante, expose notre pays, de manière durable, à des séismes de forte intensité.
Les tremblements de terre que nous avons subis dans le passé, notamment celui de Boumerdes, ont été violents et dévastateurs.
Le séisme d’El Asnam, actuellement Chlef, du 10 octobre 1980, d’une magnitude de 7,2 sur l’échelle de Richter, a fait 2 633 morts, des milliers de blessés, des disparus et des sans-abris.
Un tel séisme a permis de mettre en place un règlement d’urbanisme antisismique rigoureux, imposable à toute nouvelle construction.
Si le dispositif juridique mis en place par les pouvoirs publics était cohérent et devait répondre aux défis des tremblements de terre, par contre l’incivilité et la faiblesse de l’autorité de l’Etat, ont été une source de remise en cause de ce dispositif, par la prolifération de constructions illicites, ayant gravement affaibli et fragilisé le tissus urbain.
Le tremblement de terre enregistré en Turquie a démontré de graves insuffisances, en matière de respect de la législation de l’urbanisme et d’une corruption remarquable, dans le suivi et la réalisation des promotions immobilières, où on a vu des immeubles s’effondrer, comme des châteaux de sable, faute d’un contrôle technique rigoureux et transparent.
Au Maroc, c’est plutôt le vieux bâti qui s’est effondré massivement et qui n’a pas résisté à la force d’un séisme dévastateur.
Ce qui est arrivé dans le pourtour méditerranéen, peut, sans aucun doute, arriver chez nous, en Algérie.
Ce que nous pouvons dire à ce sujet, c’est l’urgence d’une prise en charge du vieux bâti qui se trouve dans un état de dégradation avancé, au niveau des villes du nord du pays, où nous enregistrons une forte densité, dans l’occupation des sols, augmentant les risques d’un nombre plus élevé de morts et de blessés, en cas de survenance, en Algérie, d’un séisme de forte intensité.
Un séisme de forte intensité en Algérie provoquerait l’effondrement immédiat du vieux bâti, qui menace la sécurité des populations.
Il est important de relever que le dossier du vieux bâti est malheureusement non encore pris en charge, alors qu’il représente indéniablement une problématique de sécurité publique.
Dans ce domaine, il est urgent d’arrêter une politique publique et mettre en place la cartographie du vieux bâti à risque, le cadre juridique, s’il n’existe pas, et le dispositif organisationnel, devant assurer une prise en charge immédiate de ce dossier.
La démolition du vieux bâti doit s’inscrire dans des programmes annuels de gestion du tissus urbain, pour éviter le pire, en cas de survenance d’un séisme de forte intensité.
Prendre en charge le vieux bâti, c’est avant tout assurer la gestion de la ville.
La gestion de la ville s’inscrit dans une politique de développement, de manière harmonieuse, de la ville et de la maîtrise du tissus urbain.
Ce dispositif légal a été prévu par la loi n°06-06 du 20/02/2006, portant loi d’orientation de la ville qui n’a jamais été mise en oeuvre depuis dix sept ans et qui est malheureusement tombée en désuétude.
Cela explique un peu l’état de délabrement de nos villes, ne disposant d’aucun mécanisme de gouvernance moderne, aux standards internationaux.
La gouvernance de la ville, revêtant un caractère eminement de sécurité publique, a été reléguée au second plan, faisant de nos cités des dortoirs à ciel ouvert, où l’hygiène, la sécurité et le confort du citoyen sont mis à mal par une fragilisation remarquable du tissus urbain, menacé par un foisonnement de constructions illicites.
Les missions de gestion des services publics, dans la ville, sont atomisés entre plusieurs secteurs, et il n’existe pas une instance décentralisée, sous la forme d’un bureau
d’études spécialisé, ou d’une agence, devant assurer la planification, le développement, l’aménagement et la gestion de la ville, où tous les réseaux seraient numérisés.
L’objectif principal de la gestion de la ville est le bien être social, devant mettre fin à l’anarchie urbanistique, aux incivilités, et aux constructions illicites.
Dans une telle démarche moderne, nous devons quitter la politique du relogement, pour construire des villes durables et intelligentes, disposant de toutes les commodités, urbanisme de la ville, transport en commun, espaces verts, éclairage publique, AEP, Assainissement, collecte des déchets domestiques et industriels, hygiène, éclairage public et gestion moderne des services publics.
Les villes Algériennes érigées en poles urbains les plus propres du monde, n’est pas une utopie. Il suffit de le vouloir et de le faire.
Biographie M. Hassen Kacimi :
- Chef de bureau ministère des transports- 1978 -1980
- Chargé de mission wilaya Tamanrasset, 1980 – 1984 .
- 1984 – 1998 – directeur administration territoriale
- Sous directeur de la circulation des personnes, ministere de l’intérieur , 1998- 2008.
- Directeur ministère de l’intérieur, 2008 – premier trimestre 2020.
- Président du comité interministériel , chargé de l’étude et du suivi des problématiques migratoires ( 2015 – premier trimestre 2020)
- Gestion des crises au sein du centre opérationnel ( 2015 – premier trimestre 2020)
- Représentation de l’Algérie , à l’étranger , en tant qu’expert.
- Expert international des flux migratoires, reconnu par des organisations onusiennes. Expert du Sahel et de la gestion des crises .
- Plusieurs communications, à l’université de sciences politiques et l’école des sciences politiques, ainsi qu’à l’école de guerre de Tamentfoust et l’institut des études stratégiques globales ( INESG )
- Distinction de l’institut fédéral allemand des hautes études de sécurité .