L’Algérie, connue comme le grenier à blé de la Méditerranée, a joué un rôle central dans l’histoire des civilisations. Depuis l’ère numide jusqu’à nos jours, son sol fertile et sa capacité agricole exceptionnelle ont fait d’elle un acteur clé dans l’économie et la politique régionale. Cet article, inspiré par les propos de Mohamed Doumir, explore l’histoire fascinante du blé algérien et son importance stratégique à travers les âges.
Une histoire millénaire
Dès l’époque des Numides, l’Algérie était déjà reconnue pour sa richesse agricole. Sous le règne du roi Massinissa, le royaume de Numidie a émergé comme un exportateur majeur de blé. Pendant la guerre entre les Grecs et les Romains, Massinissa soutint Rome en leur fournissant 200 000 mesures de blé, un geste stratégique qui allait influencer le destin de la région.
Les Romains, impressionnés par la fertilité du sol algérien, considéraient l’Afrique du Nord comme leur principal réservoir de céréales. Dans leurs œuvres littéraires et artistiques, l’Algérie était représentée comme une terre de prospérité, avec des symboles de blé et d’abondance gravés dans leurs monuments. Ces représentations illustrent à quel point les céréales de la Numidie étaient fondamentales pour la survie de l’Empire romain.
Une richesse convoitée à travers les siècles
L’importance stratégique du blé algérien ne s’est pas arrêtée avec la chute de l’Empire romain. Durant l’ère islamique, des auteurs tels qu’Ibn Hawqal décrivaient le Maghreb central comme une « terre des céréales » par excellence. Les Ottomans, à leur tour, ont exploité cette ressource pour alimenter les marchés de l’Empire et soutenir leur hégémonie régionale.
Au XVIIIe siècle, alors que la guerre entre la Russie et l’Empire ottoman paralysait l’approvisionnement en blé, l’Algérie est devenue le principal fournisseur de céréales pour l’Europe. Cette période a consolidé la réputation du blé algérien, reconnu pour sa qualité exceptionnelle, notamment dans la fabrication de pâtes en Italie.
L’ère coloniale et ses conséquences
Avec l’occupation française en 1830, l’exploitation agricole de l’Algérie a pris une autre dimension. Les colons ont cherché à maximiser la production céréalière pour alimenter les besoins de la métropole. Cependant, cela s’est souvent fait au détriment des variétés locales, adaptées depuis des siècles aux sols et au climat algériens.
Malgré cette exploitation, la qualité du blé algérien a continué d’attirer l’attention internationale. Lors de l’exposition universelle de Paris, le blé algérien a remporté plusieurs prix pour sa qualité, notamment pour son semoule utilisée dans les concours de Londres.
Le renouveau post-indépendance
Après l’indépendance en 1962, l’Algérie a cherché à reconstruire son secteur agricole. La création de l’Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC) a marqué une étape importante pour organiser et moderniser la production de céréales. Malgré ces efforts, l’héritage de 132 ans d’exploitation coloniale a laissé des défis majeurs, notamment en matière d’autosuffisance alimentaire.
Cependant, ces dernières années, l’Algérie connaît une transformation remarquable. Grâce à des investissements stratégiques, le pays a augmenté sa capacité de stockage des céréales. Entre 2020 et 2025, plus de 350 nouveaux silos de proximité et 30 silos géants, d’une capacité totale de 4,7 millions de tonnes, ont été construits. Avec ces infrastructures, l’Algérie se positionne désormais comme le deuxième pays africain en termes de capacité de stockage, après l’Afrique du Sud.
Une ambition pour l’avenir
L’Algérie d’aujourd’hui ne se contente pas de dépasser les crises mondiales, telles que celles liées à la pandémie de Covid-19 ou à la guerre russo-ukrainienne, sans perturbations majeures. Elle aspire également à retrouver son statut de leader régional en matière de production céréalière.
Les nouvelles générations d’agriculteurs, soutenues par des politiques étatiques ambitieuses, œuvrent à la réalisation de cet objectif. Avec des initiatives visant l’autosuffisance alimentaire et, à terme, l’exportation, le blé algérien pourrait à nouveau devenir un pilier de la prospérité nationale.
L’histoire du blé algérien est celle d’une richesse inestimable, façonnée par des millénaires de culture et de résilience. En regardant vers l’avenir, l’Algérie semble prête à écrire un nouveau chapitre de cette épopée, renforçant ainsi son rôle en tant qu’acteur clé dans la sécurité alimentaire régionale et mondiale.
Hope&Chadia