Par Hope&ChaDia
Dix ans seulement après avoir arraché son indépendance au prix d’une guerre dévastatrice, l’Algérie apparaissait déjà, aux yeux des grandes puissances, comme une nation pivot dans l’équilibre du monde. Un document déclassifié de la CIA, datant du 9 octobre 1973, met en lumière cette réalité éclatante : l’Algérie, sous la présidence de Houari Boumediene, comme encore aujourd’hui, était non seulement écoutée, mais courtisée, respectée et sollicitée pour peser sur les grands dossiers géopolitiques.
Un message de Moscou, une adresse à Alger
Ce document est une retranscription d’un message officiel transmis par l’ambassadeur soviétique à Alger à Houari Boumediene, émanant directement de Léonid Brejnev, secrétaire général du Parti communiste de l’Union soviétique. La teneur du message est sans équivoque : l’URSS implore l’Algérie de s’engager encore davantage aux côtés de la Syrie et de l’Égypte dans leur lutte contre l’agression israélienne, quelques jours après le déclenchement de la guerre du Kippour.
Mais au-delà du contenu militaire, c’est le ton du message qui impressionne. L’Algérie n’est pas seulement vue comme un soutien potentiel. Elle est désignée comme un modèle de lutte anti-impérialiste, une puissance morale et politique, « guidée par les idéaux de solidarité fraternelle », capable de mobiliser ses ressources pour soutenir le monde arabe. Ce n’est pas une demande condescendante. C’est un appel à un partenaire égal, presque un chef de file du Sud global.
L’Algérie, pilier du Tiers Monde
Brejnev s’adresse à Boumediene comme à un homme dont la « haute réputation personnelle dans le Tiers Monde » est incontestée. Le message évoque le rôle central joué par l’Algérie lors du quatrième sommet des pays non-alignés, que Boumediene avait accueilli avec panache à Alger en septembre 1973. Ce sommet fut un moment d’unité historique entre pays du Sud, et l’Algérie y brilla par sa diplomatie ferme et solidaire.
Dans ce contexte, l’URSS affirme que les dirigeants algériens comprennent mieux que quiconque les enjeux de la lutte anti-impérialiste, car ils ont vécu cette lutte dans leur chair. Elle se dit convaincue que l’Algérie utilisera tous les moyens à sa disposition pour soutenir les peuples arabes agressés, notamment les Syriens et les Égyptiens, alors engagés dans une guerre existentielle contre Israël.
Un message aux peuples du monde arabe
Le texte va plus loin encore. L’Algérie est explicitement citée comme l’un des modèles de réussite des pays arabes progressistes, symbole d’un monde arabe capable de résister, de s’unir et de construire son avenir sur la base de la justice et de la liberté. L’URSS y voit un espoir pour toute la région.
Dans un passage saisissant, le message indique que des pays comme l’Algérie sont porteurs de « progrès et liberté dans le monde arabe ». En somme, dix ans après l’indépendance, l’Algérie n’était pas seulement libre : elle était devenue porteuse de liberté pour les autres.
L’après-guerre, l’avant-garde
Ce message, repéré et archivé par les services de renseignement américains via le FBIS (Foreign Broadcast Information Service), témoigne d’une époque où Alger faisait trembler les capitales occidentales… non pas par la force de ses armes, mais par celle de ses idées, de son engagement, de sa cohérence révolutionnaire.
Alors que de nombreux pays postcoloniaux peinaient à exister diplomatiquement, l’Algérie dictait ses positions, accueillait les leaders du Sud, inspirait les mouvements de libération et servait de plateforme d’unité. Dans une guerre idéologique entre blocs, elle imposait sa troisième voie avec dignité et autorité.
Aujourd’hui, se souvenir et s’en inspirer
Dix ans seulement après l’indépendance, l’Algérie ne mendiait rien. Elle était sollicitée. Elle ne se faisait pas dicter la conduite : on lui demandait de guider. Le monde bipolaire de 1973 reconnaissait dans ce jeune État la maturité d’une nation visionnaire, au service de son peuple et des peuples opprimés.
Dans un monde en mutation, il est vital de raviver cette mémoire. Ce n’est pas une nostalgie. C’est un rappel puissant que la souveraineté, la dignité, la solidarité et la clairvoyance stratégique sont des leviers que l’Algérie a déjà maniés avec force.
Et c’est là, précisément, qu’il faut puiser l’énergie de demain.
Rien n’a changé aujourd’hui.
Un demi-siècle plus tard, l’Algérie continue d’incarner cette voix libre, indépendante, et résolument solidaire des causes justes. Face aux nouvelles formes d’impérialisme, aux tentatives d’isolement ou d’intimidation, elle reste debout, fidèle à ses principes fondateurs. Des tribunes internationales aux choix diplomatiques courageux, elle refuse les alignements aveugles, soutient les peuples en lutte, et défend l’unité des nations libres. Hier, aujourd’hui et pour toujours, l’Algérie ne se renie pas. Elle inspire. Elle résiste. Elle construit.
Hope&ChaDia