Le Soir du 1er Jour de l’Aïd El Ad’ha, une émission live fut dédiée à la cause palestinienne, un hommage vibrant à un peuple dont la dignité et la résistance inspirent. L’invité d’honneur, le géopoliticien et sociologue Saïd Bouamama, militant des causes populaires, a livré une analyse percutante et profonde des dynamiques en cours au Proche-Orient et dans le monde.
7 octobre 2023 : Un tournant géopolitique majeur
Pour Bouamama, il est essentiel de recontextualiser les événements du 7 octobre 2023. Avant cette date, la question palestinienne était quasi enterrée dans l’agenda international, ensevelie sous les accords d’Abraham et l’indifférence de nombreuses puissances. L’opération menée ce jour-là par les forces de résistance a forcé le monde à reconnaître à nouveau la centralité de cette cause.
Malgré le coût humain effroyable, Israël subit sa première défaite morale depuis 1948 : son image internationale est gravement ternie, et une solidarité inédite avec le peuple palestinien s’est exprimée dans de nombreuses capitales.
Israël, rouage d’une stratégie impérialiste globale
Le rôle d’Israël ne saurait se réduire à un simple conflit local. Pour Bouamama, l’État hébreu est le “gérant local des intérêts des grandes puissances”, notamment des États-Unis. Son rôle ? Garantir le contrôle de cette région stratégique indispensable à l’hégémonie occidentale.
Les plans de “remodelage” du Moyen-Orient, nourris depuis la chute de l’URSS, visent à fragmenter les États arabes, à empêcher leur autonomie économique et politique, et à maintenir la domination américaine. L’Irak, la Syrie, l’Afghanistan, le Soudan en ont fait les frais.
Normalisation et isolement de la cause palestinienne
Israël, soutenu par les grandes puissances, tente de briser la résistance palestinienne non par une victoire militaire (jugée impossible), mais par un isolement diplomatique et géopolitique. La stratégie repose sur :
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l’éviction des bases de résistance régionales (Liban, Jordanie),
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les accords de normalisation avec des États arabes pour isoler les Palestiniens.
Mais, comme l’a démontré l’histoire des intifadas, le peuple palestinien réinvente sans cesse ses modes de résistance.
Un conflit global : le combat contre un monde unipolaire
Au-delà de la Palestine, Bouamama place ce combat dans le cadre d’une lutte mondiale contre un impérialisme occidental en perte de vitesse. Les États-Unis et leurs alliés cherchent à conserver une hégémonie qui vacille face à un monde multipolaire émergent (BRICS, alliances Sud-Sud).
La guerre en Ukraine et le remodelage du monde arabe participent de cette même logique : empêcher l’émergence de pôles alternatifs de pouvoir.
L’Algérie : un rempart souverain face aux tentatives de déstabilisation
L’Algérie occupe une place particulière dans ce contexte. Ayant elle-même été victime d’une colonisation de peuplement, elle partage un lien historique et charnel avec le peuple palestinien. Sa position ferme en soutien à la Palestine lui vaut des pressions considérables, notamment de la France, désireuse de retrouver une influence en Afrique.
Bouamama souligne que l’Algérie, par son histoire de résistance, reste un obstacle majeur aux projets néocoloniaux dans la région. Cependant, sa stabilité dépendra de la solidarité et de l’unité de son peuple face aux tentatives de division et de déstabilisation extérieure.
Le Sahel et la Libye : zones de turbulences aux portes de l’Algérie
Le géopoliticien avertit aussi des risques provenant de la situation au Sahel et en Libye, où des puissances étrangères continuent de instrumentaliser les conflits pour déstabiliser la région.
Le retrait de Wagner est vu comme une évolution positive, mais les défis restent nombreux : le financement des groupes armés par des puissances du Golfe et l’ingérence marocaine compliquent les perspectives de paix durable.
Vers un monde multipolaire : espoir et vigilance
En conclusion, Bouamama rappelle que l’issue dépendra de la capacité des peuples et des États du Sud à construire :
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des alliances solides (BRICS),
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des systèmes d’échanges alternatifs,
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et une solidarité active.
Si ces dynamiques s’intensifient, les puissances dominantes hésiteront à provoquer un conflit global. Le soutien populaire et la vigilance restent donc des atouts essentiels pour éviter une escalade incontrôlable.
Hope&ChaDia