par Hope&ChaDia
À Washington, en marge des assemblées annuelles du FMI et de la Banque mondiale, Salah Eddine Taleb, Gouverneur de la Banque d’Algérie, a livré un entretien dense à l’APS. Derrière son ton mesuré, se dégage une image claire : l’Algérie a tenu bon là où d’autres vacillaient.
Une économie qui a résisté aux tempêtes
Pandémie, guerres, chaînes d’approvisionnement brisées, explosion des prix de l’énergie : le monde a tremblé. Mais l’Algérie, elle, a encaissé sans plier.
« Nous avons connu une croissance soutenue, notamment hors hydrocarbures, avec des réserves de change confortables et une inflation en net recul », a affirmé M. Taleb.
La clé, selon lui, tient dans une politique monétaire agile et prudente. En 2020, au cœur du chaos sanitaire, la Banque d’Algérie a abaissé son taux directeur à 3 % pour que les banques continuent de financer l’économie réelle. En parallèle, elle a allégé les normes prudentielles afin d’offrir de l’oxygène aux entreprises étouffées par la crise.
Mais dès que la situation mondiale s’est normalisée, la Banque a retiré ses béquilles et amorcé un retour à la discipline. Quand l’inflation mondiale s’est emballée, l’institution a préféré renforcer le dinar plutôt que d’étrangler le crédit. Résultat : l’inflation, qui culminait à près de 10 % en 2022, n’est plus que de 2,66 % en août 2025.
Une rare maîtrise dans un monde où la hausse des prix est devenue la norme.
Une révolution bancaire discrète mais décisive
Derrière cette stabilité se cache une autre transformation : la révolution digitale du système bancaire algérien.
Sous l’impulsion de la nouvelle Loi monétaire et bancaire, adoptée récemment, le pays s’ouvre à une nouvelle ère.
Prestataires de services de paiement, banques digitales, banques islamiques et d’affaires, voire monnaie numérique de Banque centrale — tous ces concepts longtemps théoriques font désormais partie du vocabulaire institutionnel algérien.
« La digitalisation n’est plus une option, mais une exigence nationale », souligne le Gouverneur.
La Banque d’Algérie a multiplié les textes réglementaires pour encadrer cette modernisation et créer un écosystème sécurisé et inclusif. Mieux encore : un Comité national des paiements supervise désormais la transition vers une économie sans argent liquide d’ici 2028.
Cette échéance, ambitieuse mais réaliste, place l’Algérie dans le peloton des pays africains les plus dynamiques sur la voie de la numérisation bancaire.
En clair : de la file d’attente au guichet à la transaction instantanée sur smartphone, la bascule est en marche.
Du GAFI à la scène mondiale : le retour de confiance
Autre dossier sensible : la conformité financière internationale. L’Algérie, inscrite sur la liste de surveillance du GAFI, travaille activement à en sortir.
Depuis octobre 2024, un plan d’action rigoureux est appliqué. Des comités de coordination, des formations, des réformes juridiques et techniques ont été déployés pour aligner le pays sur les standards mondiaux de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme (LBC/FT).
Les premiers résultats sont tangibles : les évaluateurs du GAFI ont salué les progrès algériens, un signal fort pour les investisseurs et partenaires internationaux.
Une banque centrale prudente, un pays confiant
À travers cet entretien, Salah Eddine Taleb laisse transparaître une conviction : la solidité financière de l’Algérie n’est pas un hasard, mais le fruit d’une stratégie patiente, cohérente et indépendante.
Le secteur bancaire algérien demeure l’un des plus encadrés et prudents du monde arabe, à l’abri des secousses spéculatives.
L’Algérie, forte de ses réserves, d’une inflation maîtrisée et d’une souveraineté financière retrouvée, semble désormais regarder vers l’avenir avec assurance — et surtout, avec méthode.