a) La domination de l’anglais
Les anglo-saxons sont parvenus à imposer l’anglais comme langue dominante non seulement dans le commerce international (celui-ci étant d’ailleurs largement régi par le dollar), mais également dans les sciences. A telle enseigne qu’a été imprimée cette idée dans l’esprit de beaucoup que seule la langue de Shakespeare est adaptée pour les sciences, leur développement et leur enseignement.
Comment ce tour de force a-t-il été opéré ? La raison principale participant de cette domination est liée au fait que les classements universitaires tiennent uniquement compte du nombre d’articles publiés dans les plus grandes revues, et celles-ci sont des revues en anglais. C’est pourquoi les universités incitent à publier en anglais.
De cette manière, les pays anglo-saxons profitent sans efforts (de traduction) des recherches scientifiques du monde entier, et s’approprient ainsi ces savoirs.
b) La langue scientifique chez les autres puissances mondiales :
Les étudiants du tiers-monde notamment, mais pas seulement, qui volent vers d’autres cieux pour parfaire leur formation (Russie, Chine, Japon, Allemagne, etc) n’étudient pas les sciences en anglais mais dans la langue du pays d’accueil. C’est en cela aussi que l’on reconnaît une grande puissance.
c) La langue, un enjeu de puissance
Les rivalités entre puissances ne se limitent pas uniquement sur les plans économiques et militaires, mais s’étendent également au plan culturel. La francophonie qui se sent menacée dans sa domination et son hégémonie sur une partie du monde tente des offensives, notamment dans un continent africain qui tend à lui échapper.
Toutefois il ne s’agirait pas de tomber de Charybde en Scylla. C’est pourquoi il serait fort recommandé de promouvoir, au sein de la communauté des chercheurs africains, un certain patriotisme scientifique, consistant à publier autant que faire se peut dans leur langue nationale.
2) Islam, langue arabe et science :
Sans doute ne considère-t-on pas à sa juste mesure l’impact de l’avènement de l’Islam et le changement radical qu’il a opéré dans l’histoire des civilisations, transformant le monde alors connu, et faisant basculer l’humanité du Moyen-Âge à l’ère moderne.
C’est sous son impulsion que furent jetées les bases de la science moderne et que le monde connut un essor considérable dans tous les domaines du savoir (médecine, pharmacie, mathématiques, astronomie, etc.).
Les musulmans ne suivaient-ils pas en cela les commandements du prophète (asws) qui déclarait : « L’encre du savant est plus sacrée que le sang du martyr » et « Cherchez le savoir, fut-ce en Chine » ou l’injonction de Dieu « Ikra », ou encore les invitations du Coran à étudier la Création, car connaître l’œuvre de Dieu, est-il suggéré, c’est se rapprocher de Lui.
a) La « Renaissance » européenne :
Cet événement capital dans l’histoire des Européens (qui allait aboutir au siècle des lumières), et dont ils s’enorgueillissent n’est en réalité que le résultat d’un long processus de traduction et d’assimilation de tout ce corpus transmis par les maîtres arabes, car le « vieux Continent » n’assistait en vérité rien moins qu’à sa naissance.
L’Occident s’est efforcé de minimiser, d’occulter, voire nier cet apport crucial à l’histoire de l’humanité ne serait-ce que par le choix de ce terme, faisant accroire à une « redécouverte » du savoir de la Grèce antique. Il est vrai que l’Histoire est écrite par les vainqueurs.
Autre fait symptomatique de cette supercherie intellectuelle : la date que l’on retient, par convention, pour marquer le début de cette période. La découverte des Amériques serait donc le fait de Christophe Colomb, dont on se garde bien de laisser entendre que les instruments de navigation, les cartes, les caravelles sont toutes inventions arabes qui lui ont permis d’atteindre son but, jusqu’aux explorateurs qui l’ont dirigé, les fameux frères Pinzón, et qui étaient d’origine … arabe.
Nous connaissons tous la propension des Européens à latiniser les noms arabes pour occulter l’apport de la culture arabo-islamique ainsi que l’action du clergé qui s’était accaparé et gardait jalousement sous son contrôle ce savoir qu’il considérait avec une défiance mêlée d’admiration et de convoitise, craignant que toute cette science infidèle corrompe ses ouailles. Il est vrai aussi que cela lui assurait une supériorité sur les masses, car savoir est synonyme de pouvoir.
Par ailleurs doit-on considérer comme relevant de la pure coïncidence le fait que ce mouvement intellectuel de « renouveau » trouve ses origines en Espagne et en Italie (en l’occurrence la Sicile), toutes deux possessions musulmanes ?
L’Italie, particulièrement citée dans ce processus, a bénéficié de ce savoir directement des mains des musulmans près de 2 siècles plus tôt que l’Espagne. Celle-ci dut attendre la Reconquista pour reprendre le flambeau et devenir une puissance européenne de 1er plan. En Italie, elle a été l’œuvre de l’empereur éclairé, Frédéric de Hohenstaufen, qui a eu l’intelligence de conserver les structures et institutions musulmanes avec leur population arabe (d’où le teint hâlé des Italiens du sud).
Or si l’on définit la Renaissance comme la redécouverte par les Européens de la philosophie, des sciences, des savoirs grecques, pourquoi donc n’est-elle pas venue de Grèce tout simplement puisque toutes ces disciplines leur étaient accessibles dans leur langue maternelle ? ou de Byzance, héritière à la fois des cultures grecques et romaines ?
b) Les chiffres arabes :
La réponse tient en un mot : les chiffres, instruments mathématiques à la base de toutes les sciences. En réalité les Grecs étaient parvenus aux limites de leurs connaissances. Ils ne pouvaient aller au-delà sans cet outil indispensable pour toutes les sciences, sans lequel aucun développement, aucune avancée n’est possible.
Seuls les Arabes ont pu effectuer cette percée conceptuelle car encouragés dans cette voie, comme on l’a vu, par Dieu et son Messager (asws) d’une part, et d’autre part ils y étaient prédisposés.
Effectuons un calcul même simple, par exemple une addition de 3 à 4 termes faisant intervenir des nombres importants. Vous constaterez que vous opérerez de droite à gauche, soit dans le sens de l’écriture arabe. Seule donc une culture écrivant de la droite vers la gauche était en mesure de produire cette innovation capitale dans les sciences.
Ainsi les Européens qui, s’étant mis à l’heure musulmane, étudiaient auprès d’éducateurs arabes et adoptèrent la numérotation de leurs maîtres et même le sens de leur écriture.
En effet, pour dire 21, par exemple, ils prononçaient « un et vingt » à la manière de leurs maîtres arabes, avant de changer de méthode, à l’exception des Allemands qui l’ont conservée (eins und swanzig), ce qui explique sans doute qu’ils sont la 1ère puissance européenne.
c) Le déclin du monde musulman :
Mais, direz-vous, si le monde musulman était si puissant, comment en est-il arrivé à cet état lamentable de délabrement que nous lui connaissons aujourd’hui ?
Tout d’abord s’étant enrichi, il a cessé de travailler et a entamé une phase de « désindustrialisation » abandonnant et confiant les métiers artisanaux aux européens, qui ont acquis ces savoir-faire.
Mais surtout au moment où l’Europe se constituait en États nationaux et connaissait une dynamique d’unification des différentes tribus et de formation des nations, le monde musulman assistait à un mouvement inverse de désagrégation et de tribalisation de son empire, le rendant colonisable. C’est ainsi que de petits états ont pu conquérir de vastes territoires sur les débris de l’Empire musulman.
3) La « Renaissance » algérienne :
Lorsqu’on emploie la métaphore de continent pour évoquer notre pays qui attise bien des convoitises, sachez qu’il ne s’agit pas là d’une simple vue de l’esprit ou l’expression d’une vanité exagérée, mais bien d’une image proche de la réalité eu égard à ses dimensions : près d’un cinquième du continent européen, soit l’agrégation, par exemple, du Royaume-Uni, Allemagne, Italie, Espagne, France, Belgique, Luxembourg, Autriche, Suisse, Portugal, Pays-Bas, Danemark, Slovénie, réunis.
Qu’on songe un instant aux multitudes de langues qui composent cet assemblage de peuples, quand, par exemple, un petit pays comme la France à lui seul en compte 5 ou 6 (breton, corse, chti, basque, alsacien, occitan, etc). Plus de 50 langues composent le paysage linguistique chinois !
a) La construction des langues nationales :
Toutes les grandes nations, dans leur écrasante majorité, ont concentré leurs efforts sur une seule langue nationale qu’ils ont mis des siècles à élaborer : le français d’aujourd’hui comparativement à celui du haut Moyen-Âge ferait figure de langue étrangère.
Le choix d’une nation d’établir une langue officielle n’est pas fortuit. Il traduit la volonté du pays non seulement d’unir tous les citoyens au sein de son territoire, de s’inscrire dans la modernité, mais aussi son intention de se hisser au rang des plus grandes puissances.
Or l’institutionnalisation de 2 langues ne renvoie pas l’image d’une nation forte mais divisée et donc potentiellement déstabilisable.
Sans doute objectera-t-on d’une part que l’arabisation à causé d’énormes préjudices conduisant à une population inculte, illettrée et que d’autre part, il existe des états qui ont adopté 2, voire 3 langues officielles tels la Belgique, le Luxembourg ou la Suisse.
Pour le premier point, il nous suffira de constater que ce débat a court dans tous les pays du monde y compris les vieilles démocraties, car ce problème relève également de la responsabilité (pas uniquement certes) de notre jeunesse très peu féru de lecture. De ce point de vue, il s’agirait peut-être de remettre à l’honneur le livre, la production littéraire, en diversifier l’offre, etc. (bd, nouvelles, etc.). Par exemple, des ouvrages inspirés des contes, fables, légendes du patrimoine essentiellement seraient d’atteindre un double objectif : développer le goût de la lecture et inculquer des valeurs morales dès le plus jeune âge. En outre, l’organisation de concours de poésie réunissant les auteurs du monde arabe et incluant de jeunes poètes en herbe serait propre à promouvoir et faire naître le goût des belles lettres parmi le grand public.
En ce qui concerne la 2ème objection, sans doute ne serait-il pas inutile de rappeler que la plupart de ces pays sont des paradis fiscaux dont, bien souvent, la principale « industrie » est constituée des banques, que leurs populations sont réputés être extrêmement racistes entre elles, et qu’ils ne bénéficient pas du rayonnement culturel dont jouissent les pays qui ont su se forger une langue et une identité nationale homogènes et ont laissé leurs marques dans l’Histoire du monde dans tous les domaines de la pensée, comme la France (Voltaire, Descartes, Hugo, Pasteur, Molière, etc.), la GB (Locke, Hobbes, Hume, Newton, Shakespeare, etc.) ou l’Allemagne (Kant, Shopenhauer, Planck, Nietzsche, Goethe, etc.).
Par ailleurs, si d’aventure la prospérité venait à quitter ces pays, il est fort à parier que ce vernis d’unité ne tarderait pas à éclater.
Nous nous souvenons tous de cet épisode en Belgique, où l’instauration de 2 langues officielles a donné jour à une société schizophrène, et où nous avons pu observer des problèmes au sein du parlement belge en raison de dissensions entre flamands et wallons (c’est ainsi que les medias occidentaux ont présenté la chose) qui ont paralysé le fonctionnement des institutions politiques du pays et ont fait de ce pays la risée du monde.
Or face à l’ampleur et l’urgence de la tâche, l’heure n’est plus aux tâtonnements, aux atermoiements. Si nous désirons réellement hisser notre pays au diapason des grandes nations, nous n’avons d’autre option que de recourir aux outils, aux instruments les plus appropriés et qui ont fait leur preuve.
Les souverains numides les plus éclairés n’avaient-ils pas promu le grec ou le latin dans l’administration de leurs royaumes pour s’inscrire dans la modernité, le « numide-berbère» ne constituant pas le véhicule adéquat.
b) Une langue arabe algérienanisée :
Nous avons l’opportunité d’élaborer une œuvre originale de notre langue en l’enrichissant de nuances puisées dans le lexique kabyle, chaoui, targui, darija, etc., de synonymes, de figures idiomatiques en tenant compte de l’aspect euphonique des nouveaux mots créés, lui donnant ainsi un cachet, une couleur locale. Ce travail serait effectué en collaboration avec les académies de la langue arabe et berbère, et associant également des poètes, des écrivains, artistes, etc.
Nous pourrions nous inspirer des travaux des académies d’autres pays, notamment des occidentaux qui ont une expérience dans cette réalisation. Pour constituer le français, les académiciens avaient par exemple adjoint des suffixes, préfixes, etc., grecques, latins, francisé les mots arabes (on compte plus de mots arabes dans le dictionnaire de langue française que de mots d’origine gauloise), puisé dans le lexique anglais, allemand, truc, etc.
Ainsi nous serions en mesure de réaliser un dictionnaire d’une langue arabe « algérianisée », que nous pourrions présenter en modèle de réussite susceptible d’être exporté, et qui pourra contribuer à renforcer en quelque sorte une soft power, qu’en réalité nous exerçons déjà au travers de notre histoire révolutionnaire, nos paysages aux décors somptueux, nos artistes (le raï algérien est connu dans le monde entier) etc., et qui contribuent à promouvoir une image positive de l’Algérie.
Une étroite collaboration avec les académies des lettres d’autres pays arabes permettrait de discuter et d’enrichir la langue avec les “trouvailles” de chacun.
Ce travail de normalisation, de codification de la langue nationale est nécessaire pour l’appropriation et l’assimilation du savoir et des sciences. L’anglais est certes utile pour une ouverture sur le monde et l’accès aux savoirs, mais l’algérianisation est capitale pour leur assimilation.
Toutes les nations avancées sont passées par ce processus, qui a donné naissance au cosmonaute russe, taikonaute chinois, astronaute français.
Ce travail devra être entrepris entre autre par l’académie des sciences (dont une des tâches serait de rassembler, consulter les savoirs arabes disséminés dans les bibliothèques du monde entier), qui jouerait ainsi le rôle des Dar Al Hikma de l’âge d’or islamique, afin de mettre notre pays sur les rails du développement et du progrès, un travail qui donnera, dans un avenir proche, nous en sommes convaincus, un nom au premier homme ou femme algérien-ne dans l’espace.
c) Avantage de l‘Algérie dans le processus de traduction :
L’Algérie a la particularité de compter parmi ses enfants établis à l’étranger un grand nombre de chercheurs algériens de grande qualité (Fance, GB, USA, Canada, Chine, Russie, etc).
Il y a là un potentiel de production assez intéressant et conséquent pour contribuer à un transfert de technologie nécessaire au décollage du pays.
Pourquoi la traduction dans la langue nationale serait-elle si importante ? Par la simple raison que la science se démocratisant, elle serait susceptible d’atteindre un plus large public et donc de susciter des vocations, tandis que le texte original ne serait accessible qu’à une minorité d’étudiants maîtrisant la langue. Ainsi contribuerait-on au développement des sciences en Algérie. A science exacte langue précise, aussi, nous semble-t-il, la première des sciences à promouvoir pour atteindre ces objectifs serait la luinguistique.
L’Algérie a donné naissance au cours de son histoire à des hommes et des femmes valeureux, d’un immense talent et de renommée mondiale, tant dans les domaines politique, scientifique, qu’artistique, hommes et femmes qui ont produit des oeuvres originales reflètant la singularité, l’exception culturelle de leur patrie. Et tirant sa sève de ses formidables et dynamiques forces vives, l’Algérie éternelle des chouadas ne manquera pas de surprendre le monde en dévoilant l’inépuisable génie algérien.