par Hope&ChaDia
En juin 2023, alors que l’Occident s’acharnait à isoler Vladimir Poutine, un seul chef d’État a franchi le pas, sans trembler. Abdelmadjid Tebboune, dans un geste aussi discret que spectaculaire, a annulé une visite attendue à Paris et s’est envolé pour Moscou. La planète diplomatique retient son souffle ; l’Algérie choisit son camp – ou plutôt, affirme qu’elle n’obéit à aucun.
Depuis, certains s’agitent. On parle de tensions, de snob diplomatique, de défilés manqués. La Russie aurait tourné le dos à l’Algérie ? Faux. Ce bruit-là, c’est de la poudre aux yeux pour ceux qui n’ont pas compris que l’essentiel se joue ailleurs. Loin des podiums, dans les arsenaux. Loin des photos, dans les mémoires.
Car l’alliance entre Alger et Moscou ne date ni d’hier, ni de la guerre en Ukraine. Elle s’est nouée dans le sang de 1954, quand l’Union soviétique fut la première grande puissance à reconnaître le gouvernement provisoire algérien. À l’époque, ni Washington ni Paris n’ont eu ce courage. Moscou, si. Ce n’était pas une faveur – c’était un pari géopolitique. L’Algérie n’était pas encore une économie émergente ; elle était une ruine en devenir. Mais elle portait en elle le feu des peuples en lutte, et Moscou l’a senti.
Des décennies plus tard, l’Algérie est devenue le troisième client militaire mondial de la Russie, derrière l’Inde et la Chine. Ce n’est pas un héritage, c’est une décision stratégique renouvelée. En 2023, un contrat de 7 milliards de dollars a été signé. Des drones Orion, des S-400, des chars T-90, et même – privilège rare – des tests conjoints de missiles hypersoniques Iskander. Des armes que Moscou ne partage même pas avec ses alliés européens. Un partenariat d’égal à égal. Un contrat entre deux armées qui savent ce que “tenir” veut dire.
Et quand la Russie s’est aventurée trop près des juntes sahéliennes, Alger a sifflé la fin de la récréation. Pas d’aventurisme à nos frontières. Pas de Wagner dans notre dos. Le Kremlin a reculé. Et c’est là toute la différence : l’Algérie n’est pas un pion africain sur le damier de la Russie – elle est un axe. Un centre de gravité.
Alors pourquoi cette rumeur d’un boycott du 9 mai ? Parce que l’Algérie n’a pas défilé sur la place Rouge ? Elle n’y a jamais défilé, même au plus fort de son alliance avec Moscou. Ce n’est pas un affront. C’est une ligne. Celle du non-alignement, de la fidélité silencieuse. Contrairement au Burkina ou au Mali, Alger n’est pas un terrain d’opération ; elle est une voix, une clef stratégique.
À l’ONU, l’Algérie ne cède pas aux injonctions. Elle s’abstient, elle refuse. Sur le plan énergétique, elle reste la seule route sud viable pour les ressources russes, hors d’atteinte des blocus occidentaux. Sur le plan diplomatique, elle offre à Moscou un bouclier discret mais crucial.
Dans un monde fracturé par le sionisme, où la propagande tente de peindre chaque dissident comme un paria, l’axe Moscou–Alger ne ploie pas. Il avance. Parce qu’il est né d’une guerre contre la colonisation, contre l’humiliation, contre la soumission.
Alors non, la Russie n’abandonne pas l’Algérie. Parce que sans l’Algérie, la Russie perd son levier africain, son chemin vers la Méditerranée, et une alliée forgée dans le feu, pas dans les flatteries. Ceux qui relaient l’idée inverse ignorent l’Histoire, ou feignent de la mépriser.
Car ceux qui marchent ensemble quand le monde brûle ne se séparent pas pour une chaise vide ou une photo ratée. Ils avancent, en silence, mais armés jusqu’aux dents.