Les récents développements au Parlement européen, impliquant une critique frontale de l’Algérie, notamment autour de l’affaire Boualem Sansal, soulèvent de nombreuses interrogations. Pourquoi cet intérêt soudain et concerté pour une affaire à première vue marginale ? Une analyse approfondie révèle une possible tentative de diversion face à une crise économique et politique profonde qui secoue la France et la zone euro.
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Une campagne ciblée contre l’Algérie
L’affaire Boualem Sansal, portée par la députée européenne Sarah Khnafo, illustre un mécanisme récurrent de politisation des relations internationales. Khnafo, connue pour ses positions proches du lobby sioniste en France, a demandé au Parlement européen d’adopter une résolution exigeant la libération de Sansal, présenté comme un écrivain persécuté en Algérie. Cependant, cette figure reste largement méconnue dans son pays natal, comme le souligne le journaliste algérien Toufik Rebahi dans une tribune. Selon lui, la majorité des Algériens n’ont ni lu les ”œuvres” de Sansal ni entendu parler de lui, hormis à travers ses positions controversées, souvent perçues comme hostiles aux intérêts algériens.
Cet épisode ne constitue pas un cas isolé. Depuis plusieurs années, le Parlement européen critique régulièrement l’Algérie sous couvert de préoccupations liées aux droits de l’homme. Ces attaques s’inscrivent dans une stratégie plus large visant à exercer une pression politique sur le pays. Les analyses avancées par des experts, tels que le Dr. Abou El Fadl Bahlouli, pointent vers une instrumentalisation orchestrée par des lobbies influents, incluant des services étrangers cherchant à fragiliser la souveraineté algérienne. Ces interventions, souvent marquées par des motivations géopolitiques, trouvent écho dans une Europe en quête de boucs émissaires.
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Une économie européenne et française en crise profonde
Pendant que le Parlement européen se focalise sur des sujets externes, l’Europe traverse une crise profonde. La situation économique en France, décrite dans un récent podcast économique, met en évidence des indicateurs alarmants. Les taux d’intérêt français augmentent, l’écart avec l’Allemagne explose, et l’euro s’affaiblit continuellement face au dollar. L’indice de confiance des investisseurs est au plus bas depuis plus d’une décennie, et la France est désormais perçue comme moins fiable économiquement que le Portugal ou même la Grèce sur certaines échéances de dette.
Le climat social et politique est tout aussi tendu. Le gouvernement français peine à faire adopter ses budgets, avec des menaces de motions de censure qui pourraient faire chuter l’exécutif. Le mécontentement social s’intensifie, notamment autour des questions liées au coût de la vie, au chômage, et à une fiscalité perçue comme punitive. Dans ce contexte, les tensions internes pourraient encourager les dirigeants européens à détourner l’attention publique vers des sujets externes, comme les relations avec l’Algérie.
La situation n’est guère meilleure dans d’autres pays de la zone euro. L’Allemagne et l’Italie enregistrent une contraction économique, tandis que des pays comme l’Espagne et le Portugal peinent à maintenir un semblant de stabilité financière. L’incapacité collective à gérer ces crises met en péril la viabilité même de la zone euro.
En effet, les chiffres actuels dressent un tableau sombre de l’économie en France et dans la zone euro. En France, l’écart de taux d’intérêt sur la dette publique à 10 ans par rapport à l’Allemagne dépasse les 80 points de base, un niveau jamais atteint depuis la crise de 2012. Pire encore, la France est désormais perçue comme moins fiable que des pays comme le Portugal et même la Grèce pour le remboursement de sa dette à court terme. Le taux de croissance économique français stagne autour de 0,5 %, tandis que les indicateurs avancés, comme l’indice des directeurs d’achat (PMI), tombent à 44,8, bien en dessous du seuil de 50 qui marque une croissance.
Dans la zone euro, la situation n’est guère meilleure : l’ensemble des indicateurs composites montrent un recul continu, avec un PIB attendu en baisse pour le dernier trimestre 2024. L’euro, quant à lui, continue de perdre de la valeur, se rapprochant dangereusement de la parité avec le dollar. Ce climat économique délétère reflète une récession qui s’installe durablement, menaçant la viabilité de plusieurs économies européennes, notamment en France, qui se retrouve en bas de presque tous les classements économiques régionaux.
Pour une analyse détaillée de la situation économique en France et en Europe, vous pouvez visionner cette vidéo de l’expert financier français Marc Touati : Lien vers la vidéo.
Une stratégie de diversion bien rodée
L’histoire a démontré que la diversion est une tactique politique souvent utilisée en période de crise. En pointant du doigt des « ennemis extérieurs » ou en amplifiant des controverses internationales, les gouvernements peuvent détourner l’attention des citoyens de leurs propres échecs. En ce sens, l’insistance sur l’Algérie et l’affaire Sansal pourrait être interprétée comme une tentative de détourner le regard des Européens de la gravité de la crise économique.
Dans ce contexte, l’Algérie est un choix stratégique. Sa montée en puissance sur le plan géopolitique, notamment son rôle dans les BRICS et ses réserves énergétiques, la place dans le viseur de certains acteurs européens. Critiquer l’Algérie permet non seulement de détourner l’attention des crises internes, mais également de tenter de contenir son influence grandissante sur la scène internationale.
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Les limites et dangers d’une telle approche
Cependant, cette stratégie comporte des risques. En privilégiant des polémiques diplomatiques stériles, l’Europe compromet ses relations avec un partenaire stratégique. L’Algérie, riche en ressources énergétiques et jouant un rôle clé dans la stabilité régionale, est essentielle dans un contexte où l’Europe cherche à diversifier ses approvisionnements énergétiques, particulièrement après la crise ukrainienne.
En outre, cette approche alimente une défiance croissante des pays du Sud envers l’Europe. De nombreux États africains perçoivent ces critiques répétées comme une forme de néocolonialisme, visant à imposer des normes et des valeurs sans respect des réalités locales. Cela pourrait accentuer le basculement de ces pays vers d’autres partenaires, notamment asiatiques, accentuant la marginalisation de l’Europe sur la scène mondiale.
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Algérie et Europe : une relation à rééquilibrer, une politique européenne à réviser
Pour sortir de cette impasse, c’est à l’Europe, et plus particulièrement à la France, de revoir sa stratégie et d’adopter une politique plus respectueuse de la souveraineté algérienne. Plutôt que de s’enliser dans des critiques répétées et des ingérences déguisées, il est essentiel que les décideurs européens reconnaissent l’importance d’une approche fondée sur le respect mutuel. L’Algérie, en tant que nation indépendante et acteur stratégique en Afrique et sur la scène internationale, mérite une coopération qui tienne compte de ses aspirations et de ses priorités.
L’Europe gagnerait à repenser son rôle non pas en donneur de leçons, mais en partenaire égal, cherchant à construire des relations durables et équilibrées. Cela inclut de cesser les pressions diplomatiques inutiles et de privilégier des initiatives conjointes dans des secteurs clés comme l’énergie, la sécurité et le commerce. Une telle démarche permettrait non seulement de renforcer la stabilité régionale, mais aussi de répondre aux défis communs, notamment dans un monde de plus en plus multipolaire.
En insistant sur une politique respectueuse et pragmatique, l’Europe pourrait regagner une crédibilité entamée par ses interventions perçues comme paternalistes. Une coopération fondée sur l’écoute et le dialogue sincère serait un pas décisif pour apaiser les tensions et bâtir une relation mutuellement bénéfique.
Les critiques actuelles du Parlement européen envers l’Algérie, bien qu’officiellement motivées par des préoccupations liées aux droits de l’homme, semblent s’inscrire dans un contexte plus large de crise européenne. Cette stratégie de diversion, bien qu’efficace à court terme, risque d’aggraver les tensions diplomatiques et de détourner l’Europe de ses propres défis urgents.
Il est temps pour les décideurs européens de se concentrer sur des solutions aux crises internes plutôt que de chercher des boucs émissaires externes. Une coopération respectueuse et pragmatique avec l’Algérie pourrait ouvrir de nouvelles perspectives de stabilité et de prospérité pour les deux parties.
Hope&Chadia