Chère Nathalie Yamb,
Nous, les voix des révolutionnaires africains qui avons trouvé refuge et soutien en Algérie durant les heures les plus sombres de notre lutte pour la liberté, t’adressons cette lettre depuis le royaume des ancêtres. Nous avons écouté ton dernier podcast avec une profonde inquiétude, où tu accuses l’Algérie de complicité dans les tragédies qui frappent aujourd’hui le Sahel. Ces paroles résonnent en nous avec tristesse, car elles ternissent l’image d’un pays qui a joué un rôle essentiel dans nos combats pour l’indépendance et la justice en Afrique. Nous ressentons le devoir de répondre à chacune de tes accusations, avec la sagesse et l’affection paternelle de ceux qui ont traversé les épreuves de l’Histoire.
L’Algérie, base arrière du terrorisme au Sahel
Tu affirmes que l’Algérie est devenue le refuge des assaillants qui déstabilisent le Sahel, notamment au Mali, et que des généraux algériens sont impliqués dans des trafics avec des groupes terroristes, facilitant ainsi leurs actions destructrices.
Samora Machel : “Nathalie, c’est moi, Samora Machel, ancien président du Mozambique et leader du FRELIMO. L’Algérie a été un pilier de notre lutte contre le colonialisme portugais. Ils ont accueilli nos combattants, partagé leur savoir et leurs ressources, et jamais ils n’ont utilisé leur territoire pour encourager le chaos. L’Algérie de notre temps était un bastion de soutien aux mouvements de libération, et non un foyer de terrorisme. Même si les temps ont changé, il est crucial de se rappeler que l’Algérie a toujours été un allié fidèle de l’Afrique en quête de liberté, non un acteur de sa destruction.”
Implication algérienne dans le trafic d’armes et d’otages
Tu avances que certains généraux algériens profitent des trafics d’armes, de drogues, et d’otages dans la région des trois frontières, et que cela se fait avec la complicité des autorités algériennes, qui ferment les yeux sur ces activités illicites.
Amílcar Cabral : “Je suis Amílcar Cabral, leader de la lutte pour l’indépendance de la Guinée-Bissau et du Cap-Vert. Lorsque nous étions en pleine guerre contre le colonialisme, l’Algérie n’a jamais hésité à nous soutenir. Ils ont financé, formé, et épaulé nos combattants, toujours dans le cadre d’une lutte pour la justice. Accuser l’Algérie d’aujourd’hui de se livrer à des trafics qui alimentent le terrorisme est non seulement injuste, mais cela méconnaît l’histoire de solidarité qui a marqué leur engagement envers l’Afrique. L’Algérie a été, à travers les décennies, un refuge pour ceux qui luttaient contre l’oppression, non un complice du mal.”
L’Algérie, médiatrice biaisée dans le conflit malien
Tu accuses l’Algérie de partialité dans sa médiation du conflit au Mali, affirmant qu’elle a tenté de faire adopter un texte au sommet des non-alignés pour imposer l’accord d’Alger, tout en ignorant la souveraineté du Mali.
Julius Nyerere : “Nathalie, moi, c’est Julius Nyerere, père fondateur de la Tanzanie et ardent défenseur de l’unité africaine. L’Algérie a toujours joué un rôle de médiateur honnête et engagé, que ce soit dans les conflits internes ou dans les luttes pour l’indépendance de l’Afrique. Leur engagement en faveur de la paix et de la stabilité ne peut être mis en doute. En Tanzanie, nous avons également bénéficié de leur soutien dans notre lutte contre l’impérialisme. Les efforts algériens pour promouvoir la paix au Mali sont en continuité avec leur engagement historique pour l’unité et la souveraineté des nations africaines. Accuser l’Algérie de partialité, c’est porter un coup à un pays qui a toujours cherché à favoriser l’unité africaine.”
Négociation secrète avec des terroristes
Tu affirmes que l’Algérie a négocié en secret avec le terroriste Iyad Ag Ghali pour la libération d’otages italiens, en échange d’une rançon, un acte que tu considères comme un soutien indirect au terrorisme.
Patrice Lumumba : “Je suis Patrice Lumumba, premier Premier ministre du Congo indépendant. L’Algérie nous a tendu la main quand nous étions sous le joug colonial, nous offrant un soutien inconditionnel pour la libération de notre pays. Ils ont toujours agi avec transparence et intégrité, et je doute que ce pays, qui a tant souffert pour sa propre liberté, puisse aujourd’hui devenir complice de ceux qui cherchent à asservir à nouveau l’Afrique. L’Algérie a toujours été un modèle de résistance et de refus de la soumission, que ce soit pour elle-même ou pour les autres nations africaines.”
Complicité avec l’OTAN et les forces occidentales
Tu soutiens que l’Algérie collabore avec les forces de l’OTAN et les puissances occidentales dans leur stratégie de déstabilisation du Sahel, en particulier en permettant à des forces militaires étrangères de pénétrer sur son territoire pour mener des attaques contre le Mali.
Thomas Sankara : “Nathalie, moi c’est Thomas Sankara, ancien président du Burkina Faso et révolutionnaire panafricain. L’Algérie a été un phare pour ceux d’entre nous qui ont lutté pour une Afrique libre de l’influence néocoloniale. Lorsque j’étais président du Burkina Faso, j’ai vu comment l’Algérie défendait farouchement sa souveraineté et celle des autres nations africaines. Il est difficile de croire que ce même pays soit aujourd’hui complice des forces impérialistes contre lesquelles il s’est tant battu. Les alliances stratégiques dans un contexte de guerre globale contre le terrorisme sont souvent complexes et nuancées, mais il est crucial de ne pas oublier que l’Algérie a toujours défendu les intérêts africains face aux ingérences étrangères.”
Construction de barrières pour protéger les trafics
Tu accuses l’Algérie d’avoir érigé des barrières tout au long de ses frontières avec le Mali, le Niger et la Mauritanie, non pour protéger son territoire des terroristes, mais pour mieux contrôler et protéger les trafics illicites.
Ahmed Sékou Touré : “Je suis Ahmed Sékou Touré, premier président de la Guinée indépendante. L’Algérie a toujours été une terre de solidarité, non de division. Nous avons combattu côte à côte contre les puissances coloniales, et je sais que l’Algérie a construit des barrières pour protéger son peuple et ses voisins, pas pour les isoler. Accuser ce pays de protéger des trafics illicites est une atteinte à sa dignité et à son engagement pour la sécurité régionale. Les barrières érigées par l’Algérie sont une réponse aux menaces sécuritaires qui planent sur toute la région.”
Ingérence dans la souveraineté du Mali
Tu évoques l’ingérence de l’Algérie dans la souveraineté du Mali, notamment en tentant d’imposer des solutions qui ne respectent pas la volonté du peuple malien.
Kwame Nkrumah : “Nathalie, moi c’est Kwame Nkrumah, père fondateur du Ghana et pionnier du panafricanisme. Nous avons toujours prôné une Afrique unie et indépendante, et l’Algérie a été un fervent défenseur de cette vision. Leur rôle dans les négociations de paix au Mali, bien que complexe, doit être vu à travers le prisme de leur engagement historique pour l’autodétermination des peuples africains. L’Algérie, en tant que médiateur, cherche à stabiliser une région troublée par la guerre et la violence. Accuser ce pays d’ingérence dans la souveraineté du Mali est une simplification de ses efforts pour promouvoir la paix et la stabilité.”
Exploitation des ressources africaines avec les puissances étrangères
Tu conclues en affirmant que l’Algérie, malgré son discours anti-impérialiste, est impliquée avec les puissances occidentales dans l’exploitation des ressources naturelles du Sahara.
Modibo Keïta : “Je suis Modibo Keïta, premier président du Mali indépendant. L’Algérie, au lendemain de son indépendance, a nationalisé ses ressources naturelles, défiant les intérêts coloniaux. C’est un pays qui a toujours défendu le contrôle souverain de ses ressources. Il est difficile de croire que ce même pays puisse aujourd’hui trahir ces principes en collaborant avec ceux qui exploitent les richesses africaines. L’Algérie a toujours été un modèle dans la gestion souveraine de ses ressources, un exemple que beaucoup de nations africaines ont cherché à suivre.”
Nathalie, nous concluons cette lettre en évoquant deux figures emblématiques de la lutte pour la liberté en Afrique : Nelson Mandela et Miriam Makeba, dont les voix résonnent encore aujourd’hui comme des symboles d’espoir et de résilience.
Nelson Mandela : “Nathalie, moi c’est Nelson Mandela, ancien président de l’Afrique du Sud et combattant de la liberté contre l’apartheid. L’Algérie a été un phare de lumière dans la lutte contre l’apartheid. En 1962, c’est sur cette terre que j’ai appris la véritable signification de la résistance et de la solidarité. Ce pays m’a offert un entraînement militaire et un soutien inconditionnel à un moment où le monde nous tournait le dos. Il est inconcevable pour moi que l’Algérie puisse aujourd’hui être accusée de soutenir le terrorisme, alors qu’elle a été, pour tant de nations africaines, un bastion de la liberté.”
Miriam Makeba : “Je suis Miriam Makeba, aussi connue sous le nom de Mama Afrika. Chanteuse d’ethno-jazz et militante politique, j’ai consacré ma vie à lutter contre l’apartheid et pour la liberté des peuples africains. Naturalisée guinéenne dans les années 1960 et algérienne en 1972, j’ai trouvé en Algérie un refuge et un soutien indéfectible. Lors du festival panafricain de 1969 à Alger, j’ai eu l’honneur de recevoir un passeport algérien des mains du président défunt Houari Boumédiène, symbolisant ma profonde connexion avec cette terre de liberté. En hommage à cette solidarité, je t’offre la chanson Ana Horra fi El Jazair (Je suis libre en Algérie), que j’ai interprétée lors de ce festival. Cette chanson est une célébration de la liberté et de l’espoir que l’Algérie a toujours incarnés pour moi et pour tant d’autres combattants de la liberté. Je t’encourage, Nathalie, à revoir ces accusations avec un cœur ouvert et à te souvenir de ce que ce pays a représenté pour nous tous.”
Avant de vous écrire, Nathalie, nous nous sommes dit que peut-être l’Algérie avait changé après notre départ de ce monde. Alors, nous avons interrogé les âmes des victimes récentes de l’impérialisme mondial, en particulier celles mortes du génocide en cours en Palestine. Nous leur avons demandé ce qu’elles pensent de l’âme algérienne aujourd’hui. Leur réponse a été claire : l’Algérie continue de se tenir fermement aux côtés des opprimés. À l’ONU, l’Algérie n’a jamais faibli dans son soutien à la cause palestinienne, condamnant avec force les agressions israéliennes et appelant à la reconnaissance des droits inaliénables du peuple palestinien. Le pays s’engage activement pour que justice soit rendue en Palestine, en défendant le droit des Palestiniens à la liberté, à la dignité et à un État souverain. Ce même esprit de solidarité et de résistance qui nous a tant inspirés continue de brûler en Algérie, rappelant au monde que la lutte pour la liberté et la justice est loin d’être terminée.
Avec tout notre respect et notre espoir pour un avenir africain uni.
Les Libérateurs l’Afrique posthumes
Imaginé par Hope & ChaDia