En évoquant le parcours de Mohamed Zinet disparu il y a 28 ans, émerge un vétéran et aventurier et le «Pigeon voyageur», selon Abdelhamid Rabia.
Né en 1932 dans La Casbah d’Alger, il s’est très tôt intéressé au théâtre et commença à activer au sein du PPA où il a fondé la troupe «El Manar El Djazairi».
A Paris, il a présenté une pièce théâtrale inspirée du «Bourgeois gentilhomme» de Molière (1947) et son intérêt pour le cinéma s’étant accru au milieu de ce mouvement culturel et nationaliste, Zinet a rejoint le MTLD où sa carrière artistique décolla à travers l’interprétation de nombreux personnages.
La comédie théâtrale «Tibelkachoutine», «L’homme aux brindilles» en berbère, créée en 1953 témoigne de sa grande admiration pour Charlie Chaplin et le cinéma muet. Présentée en Tunisie, il envisageait d’adapter celle-ci au cinéma, mais le film ne verra jamais le jour.
En 1958, il rejoignit les rangs de la Révolution en tant qu’officier de l’ALN. Son transfert urgent en Tunisie, grièvement blessé lors d’une mission, donna un autre tournant à sa vie lorsqu’il intègre le mois d’avril de la même année la troupe artistique du FLN. Parmi les rôles qu’il a interprétés celui de Lakhdar, dans «Le cadavre encerclé» de Kateb Yacine. En 1959, il se rend à Munich pour suivre une formation dans le théâtre naturel,«Kammerspiele». Dans ses allers-retours entre Paris et Alger, il a contribué avec Jean-Marie Serreau dans la pièce «Les bonnes» en France, avant de concourir à la création de «Casbah films» en Algérie avec Yacef Saâdi et Habib Réda. En 1965, recruté à l’Office national pour le commerce et l’industrie cinématographique (Oncic) il est l’assistant du réalisateur Amar Laskri et d’Ennio Lorenzini dans «Les mains libres» en 1964 et Gillo Pontecorvo dans «La bataille d’Alger» (1966).
Il a ensuite collaboré en tant que comédien deux fois avec René Vautier dans «Les trois cousins» avant de réaliser en 1971, «Tahyayadido» son seul long métrage dans lequel il donne sa vision de l’Algérie indépendante avec réalisme et poétisme.
Tombé sous son charme, Zinet y relate La Casbah et Alger la blanche, perle de la Méditerranée ouvrant la voie à son ami, le poète Himoud Brahimi plus connu sous le nom de Momo, pour parler à la ville dans un dialogue poétique. Le producteur a eu recours aux composantes culturelles, pour ne citer que la fantasia et le hayek, représentées à travers les aspects de la vie de tous les jours dans les ruelles de La Casbah, une véritable rétrospective, tantôt cinématographique tantôt romanesque, du quotidien des Algériens.
«Tahiayadidou» n’est autre qu’un film dont le scénario s’apparente à un album souvenirs de Zinet, ayant joué le rôle d’un Moudjahid qui vit un présent hanté par les douleurs du passé, lanciné par les voix et les réminiscences qui refont surface.
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