L’Argentine, déjà fragilisée par des décennies de cycles d’espoirs et de désillusions, traverse à nouveau une phase de tensions économiques majeures. Les récentes décisions du président Javier Milei — renoncement à l’adhésion aux BRICS et rapprochement affirmé avec Israël et plusieurs puissances occidentales — marquent un virage diplomatique et stratégique.
Ce n’est pas la première fois que des dirigeants argentins associent, dans un contexte économique fragile, des choix monétaires et budgétaires stricts à une orientation internationale marquée par des alliances spécifiques. L’histoire récente du pays a connu d’autres épisodes où les décideurs clés affichaient une proximité notable avec certains réseaux économiques et diplomatiques internationaux, au moment même où se préparaient ou éclataient des crises. La période précédant la crise de 2001-2002 en est un exemple significatif.
Ligne du temps : Cavallo et la crise argentine (1991-2001)
1991 – Mise en place de la convertibilité peso-dollar
Cavallo, alors ministre de l’Économie sous Carlos Menem, instaure une parité fixe 1 peso = 1 dollar.
Effet immédiat : hyperinflation stoppée, regain de confiance, afflux de capitaux étrangers.
Risque latent : perte de flexibilité monétaire, dépendance accrue à l’endettement extérieur.
1991-1995 – Croissance rapide et privatisations
Vagues de privatisations financées en grande partie par des capitaux étrangers.
Modernisation apparente de l’économie, mais augmentation de la dette publique et déficit commercial.
1995 – Première alerte (crise Tequila)
Effondrement au Mexique provoque une sortie brutale de capitaux d’Amérique latine.
L’Argentine, liée au dollar, ne peut pas dévaluer → récession et chômage en hausse.
Cavallo maintient la parité coûte que coûte, ce qui rassure à court terme mais aggrave la rigidité.
1996-1999 – Essoufflement
Menem quitte le pouvoir, la croissance ralentit.
La dette explose (service de la dette en dollars), déficit extérieur persistant.
Le système repose sur un flux continu de capitaux… qui commence à se tarir.
2001 – Retour de Cavallo
Fernando de la Rúa le rappelle comme ministre de l’Économie.
Cavallo maintient la parité fixe, malgré récession et fuite des dépôts.
Mesure choc : corralito (gel partiel des comptes bancaires), pour éviter un effondrement bancaire.
Décembre 2001 – Effondrement
Soulèvements massifs, chute du gouvernement De la Rúa.
Dévaluation forcée du peso → multiplication par 3 du prix des importations, explosion de la pauvreté.
📌 Responsabilités :
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Structurelle : avoir bâti un système monétaire rigide, vulnérable aux chocs externes et à la dépendance au dollar.
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Conjoncturelle : avoir prolongé ce système et mal géré sa sortie, aggravant l’impact social et politique.
Liens de réseau : Cavallo et le Group of Thirty
Le Group of Thirty (G-30), auquel Cavallo appartient, regroupe des personnalités influentes de la finance mondiale, dont :
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Jacob A. Frenkel – Président du Board of Trustees du G-30, ancien gouverneur de la Banque d’Israël (1991-2000), également ex-président de JPMorgan Chase International.
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Stanley Fischer – Ancien gouverneur de la Banque d’Israël (2005-2013), ex-vice-président de la Réserve fédérale américaine.
Ces deux personnalités occupaient, comme Cavallo, une place centrale dans ce réseau de réflexion et de concertation sur les politiques monétaires et financières mondiales. Ce constat permet de noter que, dans des périodes charnières de l’économie argentine, certains décideurs clés se trouvaient insérés dans des cercles internationaux où les anciens dirigeants économiques israéliens jouaient un rôle important.
Les Français devraient méditer leur propre situation à la lumière de l’expérience argentine, tant les parallèles entre choix politiques, alliances internationales et conséquences économiques peuvent se révéler instructifs.