par Hope&ChaDia
Le Mouloudia, le club du peuple, allait être sacré d’un deuxième titre consécutif de champion. Les préparatifs, pendant quinze jours, présageaient d’un Alger en fête jusqu’à l’anniversaire de la création du MCA, le 7 août.
Un Alger en liesse. Un peuple heureux. C’est l’arme la plus redoutable contre les semeurs de désespoir, contre les ennemis de l’Algérie.
Et effectivement, au sifflet final, le Mouloudia est proclamé champion. La fête pouvait commencer. Mais cette fête n’a duré que quelques minutes. À peine les cris de joie retentis, la tragédie a frappé. Juste après le coup de sifflet, dans les tribunes, une vague de poussée s’est produite. Trois jeunes supporters sont morts dans un stade qui devait symboliser la victoire populaire.
Un drame, non seulement humain, mais symbolique : la joie a été brisée là où elle devait triompher.
1. Une décision présidentielle à saluer et à soutenir
Le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a réagi avec célérité. Moins de 24 heures après la tragédie, il a ordonné l’ouverture d’une commission d’enquête. Cette instruction a été immédiatement suivie d’effet par l’installation de ladite commission par le ministre de l’Intérieur.
Il faut reconnaître ici un geste de responsabilité : le pouvoir exécutif n’a pas ignoré la douleur populaire. Il a répondu.
Mais une commission n’est pas une fin en soi. C’est un début de procédure, une porte ouverte vers la vérité, qui doit etre menée avec transparence, indépendance, et sans exclusion des voix légitimes.
C’est pour cela qu’il faut accompagner cette démarche, avec vigilance constructive. Le président a montré qu’il voulait que justice soit faite. Il appartient désormais à toutes les parties concernées — y compris la société civile — de faire en sorte que cette justice soit complète.
2. Des supporters qui ont su incarner l’esprit républicain
Dans un moment où les réseaux sociaux s’enflamment, où la douleur se transforme parfois en colère désordonnée, l’association des supporters de la Mouloudia a fait preuve d’un calme et d’un discernement exemplaires.
Son communiqué est un modèle du genre : digne, clair, structuré, et porteur de propositions concrètes.
Il ne s’agit pas d’un pamphlet, mais d’une parole citoyenne. Ce texte :
rappelle les faits sans les dramatiser inutilement,
exprime la douleur sans céder à la victimisation,
et surtout : il assume un devoir de responsabilité.
Les supporters y demandent une chose simple mais fondatrice : être inclus dans la commission d’enquête. Pas pour peser politiquement. Mais pour témoigner, apporter des preuves, contribuer à la manifestation de la vérité.
Ils affirment aussi leur soutien à l’État, à l’armée, au président. Ce n’est pas de la flatterie : c’est un acte d’unité nationale. Dans les gradins, dans les rues, dans la vie — les supporters restent des citoyens. Et dans ce moment douloureux, ils se sont comportés comme tels. Il faut les écouter, les intégrer, et les respecter.
3. Une parole intellectuelle de fond : Kamel Dib et la responsabilité publique
Dans un podcast important, l’économiste Kamel Dib a pris la parole sur ce drame, non pas en économiste froid, mais en citoyen engagé.
Il a su mettre des mots sur ce que beaucoup ressentent : la mort d’un jeune dans un stade est une faillite globale. Pas un accident isolé.
Kamel Dib rappelle que dans toute structure organisée, lorsqu’un drame survient, les responsabilités sont multiples et doivent être clairement identifiées :
la responsabilité légale (parce qu’il y a mort d’hommes),
la responsabilité technique (l’état du grillage, les normes de sécurité, l’absence de sorties de secours),
la responsabilité organisationnelle (gestion de la foule, accès aux tribunes, vente de billets),
la responsabilité politique (l’organisation générale du sport, les nominations, la supervision),
et enfin la responsabilité morale, celle qui devrait conduire, dans tout pays digne, à des démissions spontanées.
Dans cette logique, Kamel Dib ne cherche pas des boucs émissaires. Il demande du courage. Le courage de reconnaître que l’État n’est pas infaillible, et que ceux qui ont échoué doivent en répondre devant la nation — même symboliquement.
JE FAIS MIENNE L’INTERVENTION DU Pr Kamel Dib
4. Des zones d’ombre à éclaircir sans tabou
Certaines images, certains témoignages, certains détails logistiques troublent encore les esprits. Des vidéos montrent une vague de poussée anormale, des barrières cédant instantanément, des agents absents dans les zones les plus exposées.
Mais au lieu de céder aux rumeurs ou aux théories prématurées, posons une question précise et légitime :
Pourquoi un contrat de réfection du grillage et de la ferraillerie du stade, signé pour l’année 2024, n’a-t-il pas été exécuté ? Y a-t-il eu annulation ? Par qui ? Pour quelles raisons ? Avec quelles conséquences ? Ce n’est pas une accusation. C’est une exigence normale de transparence, dans un État de droit. Si ce contrat avait été exécuté, les barres métalliques auraient-elles résisté ?
Conclusion : faire valoir les droits par les voies de la République
Je propose ici, clairement, en mon nom, en tant que citoyen, et avec tout le respect dû aux familles endeuillées et aux institutions de l’État, que deux démarches parallèles soient engagées :
Que les familles des victimes se constituent partie civile, accompagnées de juristes compétents, pour défendre leurs droits, obtenir la vérité, et éviter que d’autres parents, un jour, vivent la même douleur.
Que l’association des supporters du MCA, en tant qu’organisation citoyenne, dépose également plainte contre X, non pour accuser mais pour participer à la justice.
Et la presse sportive ?
On ne peut que s’étonner du silence persistant d’une partie de la presse sportive, pourtant si présente les jours de match. Ce drame dépasse le cadre du résultat : il touche à la sécurité même des supporters.
Ce moment pourrait être l’occasion pour les professionnels du secteur de faire entendre une voix distincte, respectueuse de la douleur mais attachée à la vérité.
Rien n’interdit, d’ailleurs, que des journalistes sportifs ou leurs collectifs se constituent partie civile, ou qu’ils déposent plainte contre X, au nom de l’intérêt général et de la protection du public.
Quand les gradins deviennent dangereux, le silence devient complice.
Cette démarche ne vise personne nommément. Elle ne cherche pas à punir à l’aveugle. Elle vise à inscrire la mémoire de ce drame dans le droit. Et à faire de la République non pas un mur de silence, mais un lieu de réparation, de clarté, et de dignité.
Nous ne voulons pas que le stade soit un cimetière. Nous voulons qu’il redevienne un lieu de joie. Mais cette joie ne renaîtra que lorsque justice aura été rendue.
Hope&ChaDia