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Un fleuron de la transition energetique

by Toufan
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L’Ecole des énergies renouvelables de Batna

 

Un fleuron de la transition énergétique

 

«Il n’est pas nécessaire d’espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer» Guillaume d’Orange

 

 

Cette école a été l’œuvre du professeur Chitour

 

La semaine dernière a vu un évènement important se dérouler: l’inauguration de l’Ecole des énergies renouvelables par monsieur le Premier ministre qui l’a baptisée du nom prestigieux du défunt professeur Abdelhak Rafik Bererhi, ancien ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique Pour évaluer à sa juste valeur l’apport de cette école, il est important de situer le contexte dans lequel elle se déroule.

 

Le «monde» de l’énergie et de l’environnement

Au moment où l’Algérie traverse une situation délicate eu égard à son addiction

 

au tout-pétrole, il est salutaire d’écrire qu’il y a un autre destin pour le pays que celui d’être à la remorque d’un ordre mondial formaté à la taille des puissants technologiquement et partant financièrement. Le monde qui se prépare n’est pas celui du baril de pétrole dont on surveille les errements en regardant dans une boule de cristal s’il va se stabiliser, augmenter ou au contraire chuter. Même si l’élection du nouveau président américain le 8 novembre s’inscrira dans la continuité actuelle ou changera, sa dimension pétrolière et gazière ne changera pas fondamentalement. Ce qu’il y a de probable est que la bulle du gaz de schiste est une réalité, et de plus une dernière publication lue sur le site Blomberg nous montre que le peak gaz a été atteint aux Etats-Unis ce qui amènera

 

naturellement une raréfaction précoce du gaz, et un retour de l’Europe vers ses fournisseurs habituels dont l’Algérie, car à terme les Etats-Unis auront des difficultés à exporter.

En fait, un nouveau monde après le coronavirus est en train de se dessiner, même si la consommation a baissé conjoncturellement cette année, le pétrole n’est plus au centre et, de plus en plus, les pays industrialisés et technologiquement avancés se tournent vers tout ce qui peut diminuer le recours au pétrole du fait d’une mutation et d’une transition vers les énergies vertes: la diminution de l’intensité énergétique et le développement d’une technologie basée sur l’informatique, l’Internet, de l’énergie, ce que l’économiste Jeremy Ritkins appelle la 3e révolution. Et même la 4e révolution.

 

Dans ce cadre, la révolution basée sur le tout-électrique vert paraît être le nouveau Graal. Devenu plus rare, le pétrole va être de plus en plus réservé aux transports et à la pétrochimie pour lesquels il est encore à ce jour indispensable. Les émissions de CO2 ont augmenté de 65% depuis 1970 et devraient poursuivre leur progression malgré les différentes conférences COP, notamment la COP 21 présentée comme la solution. Croissance de la consommation d’énergie, raréfaction de la production pétrolière, changement climatique. Comment résoudre la quadrature du cercle? Biocarburants, véhicules hybrides, carburants synthétiques, gaz naturel, hydrogène: la palette des carburants et des technologies moteur s’élargit même s’il n’y a pas de solution «miracle». Il convient de mettre en

 

oeuvre cet ensemble de solutions dans une logique de complémentarité.

 

Les «victimes de la voiture électrique»

La révolution de l’électricité verte paraît être l’une des solutions. La voiture électrique connaît un succès croissant. La production de voitures électriques sera de 5.000.000 en 2020 faisant de la Chine le leader. À titre d’exemple, Volkswagen ne fera plus de moteur diesel à partir de 2025, donc il ne faut plus acheter des véhicules diesel, car il n’y aura plus en parallèle de pièces détachées.» La révolution de l’électricité renouvelable c’est aussi le bus et le camion. En 2030, on prévoit que 35% des voitures seront électriques. Soit plus de 400 millions de voitures. Patrick Pouyanné, le président du groupe Total, a laissé entendre que son groupe s’engagera

 

dans un modèle à 2030 où l’essentiel est constitué par le renouvelable à 40%, le gaz à 40% et à peine 20% dans le pétrole, son métier de base depuis soixante ans.

 

Et l’Algérie dans tout cela?

Avant toutes choses il faut dresser un état des lieux et connaître nos capacités. Nous disposons de 12 milliards de barils de pétrole, environ un milliard de tonnes nous disposons de 2.500 milliards de m3 de gaz. Compte tenu du rythme de leur consommation, nous en avons pour une vingtaine d’années, d’où l’impératif de consommer moins, en consommant mieux et d’aller sans tarder vers un nouveau modèle de consommation

La question qui se pose aujourd’hui est de savoir si le pays veut continuer à exporter de l’énergie, ou bien la consommer. «On ne

 

pourra plus faire les deux» dans moins de 10 ans car la consommation débridée de gaz naturel autour

de 8% avec une population qui augmente d’un million par an, fera qu’avant 2030 nous consommerons ce que nous produisons et nous n’exporterons qu’à la marge. Il s’agit, de passer d’un mode de consommation géré par la demande, de plus en plus difficile à mettre en oeuvre, vers un modèle de consommation gérée par l’offre, d’énergie fossile consommée d’une façon rationnelle Le futur sera renouvelable et électrique.

 

Les économies d’énergie

Face aux défis qui s’annoncent en matière d’énergie, d’eau, d’environnement, de changement climatique, auxquels s’ajoute celui de la pandémie de coronavirus

 

(Covid-19), nous devons faire preuve d’intelligence et avoir une visibilité. D’où la nécessité de réussir la transition énergétique, et assurer un viatique aux générations futures. Il faut dire la vérité aux citoyens, lesquels se doivent de savoir qu’en matière de consommation d’énergie, nous vivons au-dessus de nos moyens.

Le premier gisement d’énergie de l’Algérie est comme chacun le sait celui des économies d’énergie qui est évalué entre 10 et 15%. Ce sera le chantier de la chasse au gaspillage sous toutes ses formes. C’est un immense chantier, adossé à une vision nouvelle, destinée à faire sortir l’Algérie de son ébriété actuelle pour l’amener vers une sobriété énergétique, à l’horizon de 2030… C’est un fait, l’Algérie ne peut pas continuer à consommer de cette façon qui fait que dans 20 ans s’il n’y

 

a pas de découvertes majeures, nous ne pourrions plus exporter ni du gaz ni du pétrole. Nous aurons aussi un sérieux problème du fait de la raréfaction de l’eau. L’Algérie est un pays en stress hydrique Pour conjurer cela nous devons mettre en place une dynamique profonde, mobilisatrice qui fait que la transition énergétique écologique est l’affaire de tous, en premier lieu des citoyens qui, eux, auront à traduire par leur comportement d’écocitoyens cette vision de la sobriété énergétique (al kana’â).

De plus, la réussite est l’affaire de tous les autres départements ministériels, à titre d’exemple qui est responsable de l’utilisation rationnelle de l’eau? L’habitat en termes d’efficacité énergétique dans la construction qui devra intégrer le diagnostic énergétique dans toute

 

nouvelle construction même dans les mosquées, comme nous l’avons proposé, le transport qui a la charge d’imaginer le transport du futur écologique non polluant, qui abandonne le diesel et qui mise sur la mobilité électrique, dans les transports en commun (rail, bus, tramway, métro), transport de marchandises (rail, camions électriques). Pour réussir ce plan il est important de mettre en place une stratégie visant à arriver au prix réel tout en protégeant les classes à faible pouvoir d’achat . Le principe est que chaque m3 de gaz ou tonnes de pétrole exportées devraient correspondre à l’acquisition d’un savoir-faire pour mettre en place un kWh renouvelable.

Par ailleurs, il nous faut mettre en place un plan énergie renouvelable multidimensionnel (solaire, éolien,

 

géothermie, hydraulique) en faisant appel à des financements IPP où l’investisseur se fait rembourser par le gaz naturel non consommé par le remplacement d’une centrale thermique par une centrale renouvelable. Dans cet ordre, en rappelant que le résidentiel et le transport occupent en Algérie 80% de la consommation de l’énergie produite L’Algérie devra cependant, miser sur le sirghaz et le diesel fuel qui, pourtant, lui permettront de diminuer son empreinte écologique en polluant moins. Ce serait un demi- mal si le sirghaz (GPL) faisait l’objet d’une politique hardie de conversion des véhicules Cependant, il est hors de doute que ce qui intéresse l’Algérien, notamment dans les grandes villes, c’est le besoin de transport en commun. C’est tout le challenge du futur. Cette politique tous

 

azimuts à la fois électricité verte et locomotion verte pourra être mise en place car il ne faut pas oublier que tout m3 de gaz épargné, toute tonne d’essence non utilisée peut contribuer au paiement de la mise en place de cette stratégie pour une transition écologique respectueuse de l’environnement et une industrie automobile véritablement futuriste quand on sait que l’on peut faire «le plein d’électricité» à partir de chez soi.

 

L’Ecole supérieure des énergies renouvelables de Batna

L’université algérienne au sens large recèle en son sein des compétences dans le domaine de l’énergie et, notamment des énergies renouvelables. Elle comprend aussi des laboratoires de recherche, mais il faut bien convenir qu’il n’y a pas d’unité

 

d’action et c’est un problème de fond qu’il faut régler si on veut que ces formations et ces recherches qui doivent nécessairement être aussi appliquées soient adossées à une stratégie du pays pour une transition énergétique vers le Développement humain durable. L’école de Batna est la seule au niveau national qui va assurer d’une façon nette une formation supérieure, la recherche scientifique et le développement technologique dans les domaines et filières des énergies renouvelables, de l’environnement et du développement durable,

Ainsi, la transition énergétique constituera un levier du développement, Il faut espérer que cette Ecole qui est une promesse pour la réussite de la transition énergétique ne soit pas freinée par des considérations matérielles ou autres. Elle fera partie d’un

 

réseau global d’enseignement et de recherche à côté de l’Institut de la transition énergétique et des énergies renouvelables dont le président a décidé de sa création au pôle d’excellence de Sidi Abdallah

 

Le nom de cette école, un label

L’immense privilège de cette école fut aussi de porter le nom de Abdelhak Rafik Bererhi. Cette décision est une rupture que nous saluons car elle consacre dans ce XXIe siècle de tous les dangers, la prééminence nouvelle de la science à côté des légitimités historiques. J’ai applaudi à l’époque à cette vision. Qui est Abdelhak Rafik Brerehi? Natif de l’Algérie profonde et qui a fait ses humanités, il sera brillant! Jeune professeur agrégé d’histologie- l’une des disciplines les plus complexes- se

 

mettait aussi à la disposition pour la création d’une nouvelle université. Il accepta d’aller «créer l’université de Constantine» avec à ses côtés un architecte de talent planétaire et non des moindres, Oscar Niemeyer.

 

La nouvelle université avec la forme d’un ouvrage ouvert et d’un stylo était tout un symbole Rien ne le destinait, comme il l’affirme, à faire de la politique: «Je n’ai jamais cherché à faire de la politique. Jamais! Moi, j’étais un chercheur. J’avais la passion de la recherche. Je travaillais dans des domaines très pointus. On m’avait même sollicité au Canada. Mais j’ai refusé. C’était en 1970, lors d’un congrès mondial… Quand j’ai passé mon agrégation, j’avais 29 ans… J’étais le plus jeune. Et les étudiants me l’ont bien rendu.

 

Ils étaient tous venus à l’amphithéâtre, pour la leçon magistrale. Et ils m’ont offert une longue standing ovation. C’était incroyable. Le grand maître, Herlant, du jury international, m’avait alors dit cela: «Votre jury, ce n’était pas nous, mais vos étudiants. Quand on a vu l’accueil qu’ils vous ont réservé.» (1)

Le professeur Abdelhak Bererhi fut de fait un chef de chantier, un enseignant- et un recteur qui laissa son empreinte. Mais aussi un chercheur soucieux d’être en phase avec le développement par la création du Centre de recherche Curer multidisciplinaire et ceci bien avant que l’on parle de la nécessaire symbiose université-industrie. Bref, c’est quelqu’un qui connaît le «système de l’intérieur». Faisant feu de tout bois il arriva à créer des ponts avec les universités étrangères

 

grâce, notamment à ses relations comme l’écrit PierreDaum dans cette contribution: «(…) Georges Morin partit en France et devint chef de cabinet de l’université de Strasbourg, fut sollicité par son ancien condisciple en Algérie, le professeur Abdelhak Bererhi – plus jeune professeur agrégé d’histologie de l’Algérie indépendante- pour l’aider à mettre en place un pont aérien pour l’enseignement des sciences médicales dans la jeune université de Constantine naissante. C’est un exemple de réussite rendu possible par deux Algériens, deux coeurs. Il se trouve même que le recteur de Grenoble, Jean-Louis Quermonne, qui avait commencé sa carrière en 1956 comme jeune agrégé de droit à Alger fut l’ancien professeur de Mohamed Seddik Benyahia, le ministre de l’Enseignement supérieur de l’époque. La

 

délégation grenobloise s’est rendue à Alger, et fut reçue comme des princes par le ministre Benyahia. Une «superbe machine» de coopération interuniversitaire se met en place… Sans valise ni cercueil» (2), C’est dire si le nom prestigieux que cette Ecole porte, celui du professeur Abdelhak Brerehi, est une référence et une asymptote laquelle doit tendre par un travail de qualité tant il est vrai que cette Ecole porte une partie de la responsabilité de la réussite. Quand j’ai eu vent de ce projet d’Ecole- un dossier en instance depuis 2017- j’ai été non seulement convaincus de son apport au développement du renouvelable et la nécessité de tourner le dos à la rente, mais aussi que c’était une formidable opportunité qu’il fallait encourager parce que le projet était porté par une équipe

 

dynamique dirigée par une battante la professeure Leila Mokhnache, docteur d’Etat en électrotechnique sous la direction du professeur Ahmed Boubekeur à l’Ecole polytechnique Alger, titulaire d’une trentaine de publications scientifiques de haut niveau, qui malgré tous les problèmes rencontrés, a su fédérer des compétences et proposer un programme articulé où l’essentiel y est. De plus, l’ambition de mettre en place une mini centrale solaire correspond tout à fait à la dynamique que veut impulser le ministère de la Transition énergétique former utile appliquer et surtout avec une application permanente pour être en phase avec le développement.

 

Conclusion

On le voit, l’Algérie devra plus que jamais compter sur soi. La panoplie des

 

possibilités est féconde, l’essentiel est d’expliquer pédagogiquement aux citoyens cette transition énergétique vers le développement durable. Tous les secteurs sont concernés par la sobriété en tout et l’appel à l’intelligence. Le Développement humain durable serait la solution au problème,

En définitive il n’est pas interdit de penser à moyen terme avec la disponibilité de l’électricité renouvelable à la mise en place justement d’une Transsaharienne électrique d’Alger à Tamanrasset qui permettra d’irriguer les nouvelles villes et qui pourrait faire de Tamanrasset la porte de l’Afrique, la disponibilité de l’eau et de l’électricité verte seront des facteurs contribuant à la création de richesse dans le secteur agricole, le secteur industriel mais aussi toutes les activités du secteur

 

tertiaire C’est à nous tous de faire preuve d’imagination pour mobiliser les financements Cela permettra ainsi d’imaginer un nouveau Schéma national d’aménagement du territoire (Snat) où le Sud dégorgera le Nord en offrant des possibilités de création de richesse et d’emplois aux centaines de milliers de diplômés qui pourront montrer leurs talents dans des milliers de start-up, de microentreprises

Enfin, c’est à l’école que nous formerons l’éco-citoyen de demain. C’est au lycée que nous proposerons un baccalauréat du développement durable C’est à l’université et au sein de la formation professionnelle que nous proposerons les métiers de la mise en oeuvre de la transition énergétique en terme de cursus de formation pour les ingénieurs et les

 

techniciens

Cette nouvelle vision est la seule à même de nous permettre de laisser un viatique aux générations futures Il y a un train à prendre, celui de la modernité, du développement scientifique et technologique. Nous allons relever ce défi avec l’apport de chacun. Il s’agit des fondations d’une Algérie nouvelle qui aura fort à faire dans un environnement impitoyable. Et comme le martèle si bien Nietzsche: «Périssent les faibles et les ratés» Nous ne serons pas faibles si nous sommes unis.

 

*Professeur à l’Ecole polytechnique Alger

1.Pierre Daum 2.http://www.monde-diplomatique.fr/2008/05/DAUM/15870 mai 2008

  1. https://blogs.mediapart.fr/

 

semcheddine/blog/010318/abdelhak-bererhi-tire-sa-reverence-competence-et-amour-du-pays

 

Professeur Chems Eddine Chitour.

  • Source : lexpressiondz.com

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Mohamed Redha Chettibi octobre 27, 2020 - 11:52

Grand grand merci pour ce texte instructif
inchallah l’avenir de nos enfants sera celui qu’avaient imaginer nos valeureux chouhadas

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