{"id":111502,"date":"2024-11-16T00:26:48","date_gmt":"2024-11-15T23:26:48","guid":{"rendered":"https:\/\/jazairhope.org\/?p=111502"},"modified":"2024-11-16T10:26:33","modified_gmt":"2024-11-16T09:26:33","slug":"111502","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/jazairhope.org\/fr\/111502\/","title":{"rendered":"GRAVE : Saada Arbane Rompt le Silence – La V\u00e9ritable Histoire Derri\u00e8re le Roman “Houriates” de Kamel Daoud"},"content":{"rendered":"
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LE JOURNALISTE : Le 11 novembre 2024, \u00e0 huit heures du soir, j’ai re\u00e7u un message indiquant l’urgence d’un contact pour une affaire d\u00e9licate. En prenant cette demande au s\u00e9rieux, j’ai d\u00e9couvert d\u00e8s le premier \u00e9change la gravit\u00e9 de la situation, me conduisant \u00e0 me rendre \u00e0 Oran le mercredi 13 novembre pour interviewer Saada Arbane. Cette femme courageuse, qui malgr\u00e9 un pass\u00e9 douloureux et une voix \u00e0 peine perceptible, a d\u00e9cid\u00e9 de briser le silence pour partager son histoire.<\/p>\n
N\u00e9e le 16 d\u00e9cembre 1993, Saada Arbane a surv\u00e9cu \u00e0 une nuit tragique durant son enfance, perdant sa famille et subissant une blessure profonde \u00e0 la gorge lors d’un raid brutal. Ayant \u00e9chapp\u00e9 \u00e0 la mort, elle a \u00e9t\u00e9 marqu\u00e9e par des ann\u00e9es de silence et de souffrance int\u00e9rieure. Install\u00e9e \u00e0 Oran avec son mari et leur fils, elle a pass\u00e9 plus de 25 ans \u00e0 essayer d’oublier l’horreur de son pass\u00e9.<\/p>\n
Saada affirme aujourd’hui que le roman “Houris”<\/strong> de Kamel Daoud, qui a remport\u00e9 le prestigieux prix Goncourt, raconte en r\u00e9alit\u00e9 son histoire personnelle sans son consentement. Alors que l’\u00e9crivain a toujours soutenu que son ouvrage \u00e9tait purement fictif, Saada poss\u00e8de des preuves document\u00e9es \u2014 \u00e9changes, rapports m\u00e9dicaux \u2014 confirmant ses all\u00e9gations. Selon elle, le plus grave est que le roman r\u00e9v\u00e8le des d\u00e9tails de son dossier m\u00e9dical, un acte qu\u2019elle consid\u00e8re comme une trahison de son intimit\u00e9.<\/p>\n La connexion entre Saada et Kamel Daoud remonte \u00e0 sa th\u00e9rapie avec l’\u00e9pouse de l’\u00e9crivain, qui \u00e9tait sa psychologue depuis 2015. Saada raconte que lors de nombreuses s\u00e9ances, elle a partag\u00e9 les \u00e9l\u00e9ments les plus intimes de sa vie. Jamais elle n’aurait imagin\u00e9 que ces confidences se retrouveraient dans un roman \u00e0 succ\u00e8s. En 2020, elle avait d\u00e9j\u00e0 refus\u00e9 une premi\u00e8re tentative d\u2019adaptation de son histoire en \u0153uvre litt\u00e9raire, un refus renouvel\u00e9 jusqu\u2019en 2021, avant que le livre ne soit finalement publi\u00e9.<\/p>\n Dans ce podcast poignant, Saada, soutenue par son mari Omar, r\u00e9v\u00e8le l’impact de cette publication sur sa vie. L’\u0153uvre, loin de lui offrir une quelconque reconnaissance, a rouvert des plaies encore fra\u00eeches, la plongeant dans des tourments psychologiques intenses. Omar, t\u00e9moin de ses nuits sans sommeil et de ses souffrances, t\u00e9moigne de la difficult\u00e9 qu\u2019ils ont travers\u00e9e en famille, exacerb\u00e9e par la lecture du livre et les souvenirs raviv\u00e9s.<\/p>\n Saada d\u00e9nonce le fait que malgr\u00e9 ses avertissements et sa volont\u00e9 claire de prot\u00e9ger son histoire, l’intimit\u00e9 de sa vie a \u00e9t\u00e9 viol\u00e9e. Elle parle de la douleur ressentie lorsqu’elle a r\u00e9alis\u00e9 que des d\u00e9tails aussi personnels que ses tatouages et sa passion pour l’\u00e9quitation avaient \u00e9t\u00e9 ins\u00e9r\u00e9s dans le roman sous une forme romanc\u00e9e, mais reconnaissable par ceux qui la connaissent.<\/p>\n Cette affaire soul\u00e8ve des questions \u00e9thiques fondamentales, notamment la violation du respect de la vie priv\u00e9e, la divulgation de secrets m\u00e9dicaux et l’exploitation d’une histoire personnelle sans consentement. Si l\u2019histoire de Saada est av\u00e9r\u00e9e, Kamel Daoud pourrait \u00eatre confront\u00e9 \u00e0 des poursuites judiciaires pour atteinte \u00e0 la vie priv\u00e9e, divulgation non autoris\u00e9e d’informations confidentielles, et appropriation non consensuelle d’une histoire personnelle \u00e0 des fins lucratives.<\/p>\n Un autre aspect troublant soulev\u00e9 par des lecteurs concerne les parall\u00e8les entre la voix mutil\u00e9e de Saada et celle d\u2019Aube, personnage du roman de Kamel Daoud, d\u00e9crite avec une certaine ironie comme ressemblant \u00e0 celle de Donald Duck. Si cette similitude est av\u00e9r\u00e9e, cela soul\u00e8ve des interrogations sur la moralit\u00e9 de l’auteur. Cette comparaison, jug\u00e9e par certains comme profond\u00e9ment irrespectueuse et exploitative, alimente les critiques selon lesquelles Daoud agirait en tant qu\u2019\u00e9crivain n\u00e9o-colonial. En extrayant des r\u00e9cits de souffrance alg\u00e9rienne pour les transformer en mati\u00e8re premi\u00e8re litt\u00e9raire, il enrichirait non seulement son \u0153uvre mais aussi le prestige de la m\u00e9tropole, s\u2019inscrivant ainsi dans une dynamique per\u00e7ue comme manipulatrice et mercantile.<\/p><\/blockquote>\n