Il n\u2019y a pas si longtemps que \u00e7a, le 5 f\u00e9vrier 2025, sur JazairHope, l\u2019historienne Patricia Lorcin \u2014 professeur \u00e9m\u00e9rite \u00e0 l\u2019Universit\u00e9 du Minnesota et sp\u00e9cialiste reconnue de l\u2019histoire coloniale fran\u00e7aise \u2014 a expos\u00e9, avec rigueur et preuves \u00e0 l\u2019appui, les rouages de la fabrication de ce mythe et les objectifs qu\u2019il servait. Elle a rappel\u00e9 qu\u2019il ne relevait en rien d\u2019une observation sociologique neutre ou d\u2019une science authentique, mais bien d\u2019une construction id\u00e9ologique, b\u00e2tie sur des pseudo-arguments raciaux, culturels et historiques.<\/p>\n<\/div>\n<\/div>\n<\/div>\n<\/div>\n<\/div>\n<\/div>\n<\/article>\n
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Ce que dit l\u2019histoire, pas la nostalgie coloniale<\/strong><\/p>\n Le Bureau arabe, dans la premi\u00e8re moiti\u00e9 du XIX\u1d49 si\u00e8cle, n\u2019\u00e9tait pas une structure folklorique. C\u2019\u00e9tait un organe militaire charg\u00e9 d\u2019administrer, surveiller et classer les populations. Il s\u2019agissait d\u2019identifier des groupes jug\u00e9s \u201cutiles\u201d ou \u201ccoop\u00e9ratifs\u201d et d\u2019exploiter ces diff\u00e9rences suppos\u00e9es.<\/p>\n Le \u201cmythe kabyle\u201d est n\u00e9 dans ce contexte. Les Kabyles y \u00e9taient d\u00e9crits comme :<\/p>\n S\u00e9dentaires, donc plus \u201ccivilisables\u201d que les tribus nomades.<\/p>\n<\/li>\n Moins attach\u00e9s \u00e0 l\u2019islam, donc plus compatibles avec l\u2019id\u00e9ologie la\u00efque fran\u00e7aise.<\/p>\n<\/li>\n Porteurs de traits physiques ou culturels cens\u00e9s les rapprocher des Europ\u00e9ens (tatouages en forme de croix, yeux clairs, l\u00e9gende de l\u2019h\u00e9ritage romain).<\/p>\n<\/li>\n<\/ul>\n Tout cela \u00e9tait faux ou exag\u00e9r\u00e9, mais servait un but pr\u00e9cis : pr\u00e9senter la Kabylie comme un \u201calli\u00e9 naturel\u201d de la France, distinct des Arabes et donc d\u00e9tachable du reste du pays. Pendant la p\u00e9riode militaire (jusqu\u2019en 1870), cette fiction avait une utilit\u00e9 tactique. Ensuite, avec l\u2019arriv\u00e9e des colons civils et le pillage syst\u00e9matique des terres, la distinction n\u2019avait plus d\u2019int\u00e9r\u00eat pratique \u2014 mais l\u2019id\u00e9e avait d\u00e9j\u00e0 \u00e9t\u00e9 sem\u00e9e et continuait de circuler dans les soci\u00e9t\u00e9s savantes et les milieux politiques.<\/p>\n La science a parl\u00e9 \u2014 mais Le Point<\/em> n\u2019\u00e9coute pas<\/strong><\/p>\n Patricia Lorcin, comme d\u2019autres historiens avant elle, a d\u00e9montr\u00e9 que ce mythe n\u2019avait aucune base objective. Elle rappelle que les diff\u00e9rences entre Kabyles et autres Alg\u00e9riens sont de nature culturelle et historique, pas raciale. Elle montre aussi comment l\u2019obsession fran\u00e7aise pour la la\u00efcit\u00e9 \u2014 h\u00e9rit\u00e9e de la R\u00e9volution et mal comprise par les colonisateurs eux-m\u00eames \u2014 a servi \u00e0 fabriquer l\u2019image d\u2019une Kabylie \u201cmoins religieuse\u201d que le reste du pays.<\/p>\n\n
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