Au moment où les Palestiniens meurent dans un déluge de feu, sacrifiés sur l’autel d’une extermination sioniste orchestrée avec l’assentiment des États-Unis d’Amérique et de l’Union européenne, le président français en tête, il n’y a rien de plus révoltant que les échos surdimensionnés donnés aux propos de harkis, Algériens sans dignité et sans honneur. C’est à Paris que s’exprime Boualem Sansal, particulièrement en verve, n’oubliant pas une virgule de la propagande sioniste sur « Ghaza, la terroriste » selon une vulgate occidentale et otanienne. Comme hier, Sansal, qui n’a de religion que pour la sombre fulgurance des canonnières, a parfaitement assimilé les mots d’ordre des plateaux de télés françaises, unanimes dans leur alignement derrière Israël, ses crimes de guerre et son déni d’humanité.
Un « petit juif de Belcourt » au sommet de l’État
Sansal, curieusement toujours « Algérien » et le faisant le savoir ces jours-ci au quotidien parisien « Le Figaro », à Paris, n’en est pas à sa première crapulerie envers les Arabes, les Palestiniens et, précisément, les Algériens. En 2023, cette nouvelle confrontation militaire inégale entre le Hamas et Israël lui ouvre la possibilité de recycler à peu de frais de vieux démons. Ceux qui ont lu « Rue Darwin » (2011) en connaissent déjà les incantations judaïques. La fable d’un adolescent du quartier populaire de Belcourt recueilli par un rabbin juif extrêmement caricatural, agitant fiévreusement ses papillotes, est d’une mythomanie sidérante. Sansal s’est découvert juif au moment où sa carrière littéraire marquait le pas dans une trajectoire d’échecs consommés. À soixante-et-un ans révolus.
Comment ce juif autoproclamé, s’élevant contre toutes les adversités d’une société et d’un pouvoir algériens selon lui opiniâtrement antisémites, a-t-il pu gravir toutes les échelles de la haute Fonction publique pour parvenir au poste de « directeur général de l’Industrie et de la restructuration », le troisième grade supérieur du ministère éponyme, juste après le ministre et le secrétaire-général ? Et après tant de responsabilités décrétées sur examen de la fameuse fiche bleue des « services » qui a fait d’authentiques patriotes algériens des étrangers en leur pays. Étrangers ? Non, parias. Mais pas Sansal, « le petit juif de Belcourt » qui est passé à travers les mailles. Tant et si bien que sous le régime du président Chadli Bendjedid, il lui est revenu la mission de casser, au sens propre du terme, l’industrie nationale rêvée et projetée par le président Boumediene.
Le « directeur général de l’industrie et de la restructuration » Boualem Sansal n’est pas parvenu à cette haute fonction de l’État sans de puissants garants aux étoiles dorées, comme ce fut la règle sous le règne du parti unique. Vraiment, juif de Belcourt ? Comment est-il passé à travers l’étroit sas de la redoutable Sécurité militaire qui sait tout des Algériens – et, même, à l’occasion, d’un fantasme de « petit juif de Belcourt ». Boualem Sansal aurait dans son jeune âge été surnommé par ses camarades « Rabbinet » en raison de sa fréquentation assidue de la synagogue de son quartier. Cela ne devait apparaître nulle part dans les fiches de la SM pour qu’il puisse emprunter sans obstacle le chemin fléché de la haute administration algérienne ? Il a grandi dans le cocon de l’État, qui l’a toujours choyé. Combien de fois Sansal s’est-il bruyamment esclaffé à l’idée d’avoir fait payer ses études jusqu’en Tchéquie par le contribuable algérien ? Il n’en a pas fini d’en rire et de s’en féliciter. L’enfant perdu d’un bordel militaire français de l’Ouarsenis a, dès l’école primaire, pris les premières places en faisant habilement le vide devant lui pour parvenir aux éminentes charges de l’État malgré les obstacles des enquêtes d’habilitation des « services » et les barrages réputés insurmontables du Front de libération nationale de l’« Article 120 », lugubre antichambre du pouvoir.
En 2023, Sansal lève-t-il un coin du voile sur cette époque ? Au moment où son « plus-que-frère », le criminel nazi Netanyahou, tue à nouveau par milliers les femmes et les enfants de Ghaza dans une agression génocidaire, Sansal rappelle son « tropisme juif » dans une contribution publiée par « Le Point » (Paris), où officie son comparse, le néo-Français Kamel Daoud : « À l’indépendance, les Algériens se sont coulés dans la religion de l’État, le socialisme tortionnaire, c’est ce que j’ai fait avec tout l’art nécessaire, mais mon tropisme juif me trahissait et me valait bien des suspicions » (1). « Socialisme tortionnaire » ? Encore un effort Sansal pour avouer avoir été plongé jusqu’au cou dans cette sorcellerie, « avec tout l’art nécessaire » pour être au premier rang de toutes les missions – les plus abjectes – et des récompense lénifiantes de la République algérienne démocratique et populaire, pour payer les bières et les putes à Paris…
Viendra le temps de savoir qui étaient ses garants étoilés – ou pas – qui l’ont conduit allègrement et sans faille au poste de directeur général de l’industrie. Il s’y est occupé à démonter et à démanteler comme dans un jeu de quilles le tissu industriel, notamment à Rouiba mais aussi dans le vaste pays, patiemment organisé par la planification socialiste de Boumediene, jetant sur le bord de chemins des dizaines de milliers d’ouvriers et d’agents, gonflant les chiffres du chômage. Dans un entretien avec le cinéaste Ali Ghalem, collaborateur occasionnel du « Quotidien d’Oran », il ne se dérobe pas : « Je suis Directeur général de l’Industrie. Je suis censé m’occuper de la restructuration du tissu industriel pour l’adapter à l’économie de marché. Les grands combinats industriels comme El-Hadjar et compagnie, il faut restructurer ça, et il faut les préparer à la privatisation. Il faut leur réapprendre l’efficacité, leur apprendre en fait, parce que je ne sais pas si à un moment ou à un autre ils l’ont sue » (2). Cette restructuration à l’algérienne, accouchant un capitalisme local à la sauce bédouine, Sansal y veillait chaque jour fortement. Restructuration ? En vérité, un bel euphémisme pour faire oublier la casse de grands ensembles industriels et leur bradage en petites et moyennes unités aux copains et aux coquins. Sansal faisait le job.
Dans cette opération de destruction consentie à une nième théorie économique vendue au régime, on citait à l’époque le nom d’un vague économiste grenoblois, Sansal était à la manœuvre en héraut d’un libéralisme décadent, le fameux « infitah » de Chadli Bendjedid : « En Algérie, on a beaucoup utilisé ce mot : brader. Cela ne veut rien dire. On peut vendre une entreprise au prix d’un dinar symbolique ; mais si elle ne vaut que cela, c’est à ce prix seul qu’on la vendra. Je crois qu’on utilise ce mot parce qu’il y a encore une idéologie socialiste, un discours rétrograde. Il faut se résoudre à vendre les entreprises à leur prix. Ce prix peut être très bas, voire nul dans certains cas, parce que l’entreprise ne vend plus rien, est endettée jusqu’au cou, a des équipements obsolètes, une production qui ne trouve pas preneur sur le marché » (3). En fait, une abstruse leçon d’économie politique. L’argument de l’idéologie socialiste, c’est-à-dire « le pouvoir d’avant » qui a conçu ces géants industriels, est court. L’essentiel pour le haut fonctionnaire de l’Industrie en costume bleu-pétrole, c’était de démolir l’outil industriel et de le solder au prix de casse. À des clients du système, mais il aurait préféré à la France.
À Paris, bien plus tard dans un autre contexte, Boualem Sansal s’est attaché à faire oublier ce rôle grassement rétribué de factotum du système, briefé à l’occasion par les « services » auprès desquels il dénonçait les « têtes brûlées » – syndicalistes et communistes – rétives à la mise à mort de l’industrie algérienne naissante. Aucun journaliste français, et principalement ceux qui ont aidé son ascension française, n’ignore cette charge de délateur dans la demi-obscurité des palais de la République. Mais la France, ses polices de tout acabit et ses élites dans les champs politique et culturel ont besoin d’« Algériens de service », sans foi ni loi, qu’ils pourraient en toutes circonstances utiliser contre le pouvoir d’Alger. Sansal entre dans cette case, manipulé, certes, mais aussi manipulateur lorsqu’il s’exprime ouvertement dans une hostilité personnelle envers l’Algérie, réglant ses comptes et mécomptes. Et, à l’occasion, poussant ses propres ambitions. « Avec tout l’art nécessaire », faut-il y insister ?
Du bon usage de la littérature et des prix littéraires
À cinquante ans, Boualem Sansal n’avait aucun lien avec la littérature. Il avait dans sa bibliothèque à côté d’archaïques traités soviétiques de chimie industrielle et d’économie comparée aux couvertures de carton bouilli, vestiges d’études doctorales à Prague, dans la défunte Tchécoslovaquie, une collection de polars de James Hadley Chase et de Carter Brown aux pages branlantes et rancies. Au ministère de l’Industrie, une salle de réunion et deux portes le séparaient de son ministre, qui n’avait d’yeux et de passion, rapporte-t-il, que pour les dessins animés de chaines de télévision arabe. Cela abrutit-il son homme ? Sansal y échappe, s’essayant au roman, entassant sur des liasses de papier pelure d’infinies phrases sans queue ni tête. La maison d’édition Gallimard, à Paris, qui se vante de faire du bottin mondain un succès de librairie et même une distinguée récompense littéraire du Catalogue de l’Académie des Vins de la Loire, en a fait sous les auspices de l’éditeur Jean-Marie Laclavetine un roman de basse saison littéraire intitulé « Le Serment des barbares » (1999). L’Algérie était à feu et à sang dans une nouvelle Guerre de Sept Ans fomentée par un islamisme sanguinaire et incendiaire. Et ce « Serment » paraissait inévitablement prometteur.
Sous le strict contrôle de son superviseur et directeur de collection, Sansal devenait un auteur d’écurie. Vieille tantouze, courant les parties fines de la nuit parisienne, Laclavetine n’avait pour seul horizon professionnel que de maîtriser la langue française et d’en entendre à demi-mot les subtilités littéraires. Ses commensaux du comité de lecture de l’austère boutique des lettres parisiennes, rue Sébastien-Bottin, savaient son art rare de transmuer une facture de Fauchon en épitre rabelaisienne. Sansal, qu’il cornaquait, n’avait à faire valoir qu’une plume de piètre rédacteur administratif de ministère rodée aux rapports d’activités souterraines en dix ampliations. Résumons : ce romancier de circonstance, aspirants aux cuisines grasses du succès littéraire, a forcé les portes de la République des lettres par le buzz, le compagnonnage assidu de beuveries et un sacré coup de fourchette dans les cantines huppées de Saint-Germain-des-Prés.
Après la cuisante rebuffade de ses deuxième (« L’Enfant fou de l’arbre creux », 2000), troisième (« Dis-mois le paradis », 2003) et quatrième opus (« Harraga », 2005), Sansal s’est préoccupé de mettre un tigre dans son moteur rouillé d’écrivaillon emprunté. Son triomphe en librairie n’est pas corroboré par ses romans quasi-illisibles et mal écrits, vite tombés dans l’oubli à une vitesse qui défie les lois du genre ; il s’est construit dans la radicalité du buzz : taper sur le pouvoir à Alger dont il a été le rejeton adultérin, étrenner kippa et talit face au mur des lamentations à Jérusalem, déclarer dans un saumâtre diner à l’aïoli du CRIF que les Palestiniens n’ont jamais existé, assimiler les moudjahidine de la Bataille d’Alger à des terroristes islamistes et, enfin, parader dans une vile comédie de nativité judaïque. Ça fait vendre ? Certainement, le bruit et l’argent néfaste.
Le buzz ? Tout oser pour un « Wlid hram » (enfant du péché), né, utile précision, dans un bordel militaire sur l’amont de l’Ouarsenis, revendiquant une basse extraction marocaine. Il est vite confronté, en 2003, à un inattendu tournant. Il a eu le malheur de s’attaquer au président Abdelaziz Bouteflika, dans l’absolue plénitude de ses jambes et de ses facultés mentales, qu’il a traité de « César Borgia » dans les colonnes de « Jeune Afrique », forçant sur la dose, le campant à la Mouradia, un étrange et étincelant lupanar de république bananière, entouré de ses frères et d’une cour de malappris féroces bouffeurs de rogatons. Si Abdelaziz, qui entendait la plaisanterie, avait la vengeance rude et lourde, c’est connu (merci, M. Mansour Kedidir !). Le président sommait le haut fonctionnaire d’État de choisir entre ses canulars de potache attardé, complaisamment servis à une presse ordurière, et le revigorant haut salaire de commis du bureau de l’Industrie. Peu téméraire, Boualem voulait garder la mirifique rente de séide de la RADP et Sansal la gaudriole faisandée des gazettes germanopratines. En 2003, Si Abdelaziz devait le chasser comme un malpropre, sans indemnités de licenciement, sans pour autant jeter à ses trousses toutes les maréchaussées du pays.
À défaut d’écrire de vrais roman et de s’inscrire dans la durée littéraire, que fait Boualem Sansal dans ses costumes bleu-pétrole défraichis, privé de salaire et de défraiements faramineux de l’État pour payer des bières et des putes à Paris et Marseille ? Il va s’allier à des ligues extrémistes et revanchardes, accroupies dans les souilles de la République française, donnant plus d’entrain à ses divagations sur l’Algérie. D’autres cibles complèteront sa panoplie de tireur embusqué : il s’écriera dans une émission de radio : « L’islam, voilà l’ennemi ! » L’islamophobie est en marche. Qui l’arrêtera ?
Revenons à la littérature et à ses consécrations qui sont la raison de l’irrémissible folie de l’ancien directeur général de l’Industrie et de la restructuration. Voyons, comment fonctionnent les rites de distinction dans le champ littéraire germanopratin. Jean-Marie Laclavetine, directeur de collection chez Gallimard, est un romancier de métier, à la compétence linguistique et littéraire indiscutables. Il serait pourtant difficile de lui accorder la vingtaine de prix littéraires de Sansal dont il aura pieusement colligé les textes au style rébarbatif de rédacteur administratif au bureau de l’Industrie, à Alger. Sur Wikipedia, Laclavetine est crédité exactement de huit prix, parfois de troisième catégorie comme celui du meilleur livre de la Région Centre. Comparativement à celui qui l’a créé ex nihilo, Sansal rafle petits et grands prix, qui sont souvent des prix de concussion politico-idéologique. En 2013, il recevait le prix du B’nai B’rith, organisme de défense du sionisme dans le monde, à l’occasion du 80e anniversaire de sa section française. Un prix de servitude. Mais il est un prix qu’il n’a jamais jeté dans son escarcelle, le Goncourt. C’est-là que se noue le drame. Cet échec est mal ressenti pour celui qui a tout enlevé au cœur de l’impénétrable sérail algérien.
Avec une mentalité de tueur fou, il était évident que Sansal applique la semblable et éprouvée stratégie de pénétration des combles de l’État algérien à la littérature pour se hisser au sommet, en France et mettre le Goncourt dans son tableau de chasse. Triste rappel : « Avec tout l’art nécessaire ». Là, où les roués Mouloud Mammeri, Malek Haddad, Kateb Yacine, mais aussi après eux Rachid Boudjedra et Rachid Mimouni, porteurs d’une langue et d’une identité littéraires, ont échoué, il s’est juré de tracer son champ de gloire. Cette gloire littéraire à laquelle il aspirait éperdument, il l’a envisagée dans des épousailles judéo-sionistes. Qui ignore la puissance du lobby sioniste du champ littéraire germanopratin et de son chef tutélaire Pierre Assouline, homme de main et de plume et, accessoirement, prête-nom de l’assassin des Libyens Bernard-Henri Lévy ? A-t-on jamais vu un romancier se déculotter et s’agenouiller devant un pair dans les pages de son œuvre ? Dans « Rue Darwin » (2011), Sansal célèbrera à dessein Assouline, membre influent du jury Goncourt et faiseur de rois et de reines du gotha littéraire parisien. Le factotum de Bernard-Henry Lévy lui fera décerner, en 2012, le Prix du Roman arabe pour « Rue Darwin », récompense littéraire instituée sous l’égide des ambassadeurs de la Ligue arabe à Paris dont celui de l’Algérie, qui n’a pas exprimé le regret d’y lire que Golda Meir a écrasé Houari Boumediene. Temps d’amertume et de délitement des valeurs nationales quand un ambassadeur d’Algérie acquiesce à la récompense d’un roman de propagande sioniste, qui n’a pas craché seulement sur Boumediene.
Le filon juif – majoré d’insidieux sionisme – ce n’était qu’un début, Sansal allait l’exploiter à profusion, sans ménager sa peine : faux juif et sioniste de comédie, pour assouvir cette obsession traumatique de gagner le Goncourt qu’aucun écrivain algérien n’a obtenu. Il se rapprochera, à dessein, de l’État sioniste, de ses chefs et de ses démembrements internationaux avec le semblable projet d’infiltrer autrefois les rouages de l’État algérien pour en gravir tous les échelons. « Avec tout l’art… ».
Objectif Goncourt : l’échec d’Israël et du lobby sioniste parisien
Sansal a-t-il manifesté de la clairvoyance en se rapprochant des garants parisiens du sionisme international pour relancer sa carrière et sortir de l’étouffoir d’un fatal anonymat littéraire ? Ces suppôts du sionisme international sont de grosses pointures de l’édition germanopratine, à l’image de Pierre Assouline (Gallimard), juif sépharade du Maroc, journaliste littéraire, romancier et biographe, chef de file du lobby sioniste de la littérature française, ou des plumes avisées des médias parisiens qui vont lui faire la courte échelle à la sortie, en 2008, du « Village de l’Allemand. Le journal des frères Schiller ». Ce roman (intentionnellement philosémite) marque un virage – léger et aérien – dans la carrière littéraire française de Sansal, adoubé par de nombreuses académies littéraires en France et en Europe, non pas pour la qualité de ses œuvres d’une écriture médiocre mais pour son entregent dans les médias français relayant ses déclarations tonitruantes sur l’Algérie et son pouvoir, les Arabes, les Palestiniens (qui n’ont jamais demandé, selon lui, à exister en tant que peuple et nation), et surtout sur Israël qu’il défendra en toutes circonstances hasardeuses, qu’il encouragera dans ses massacres de Ghaza.
En 2008 donc, en campagne de promotion du « Village de l’Allemand », Sansal s’était engagé dans les colonnes de la presse parisienne dans une opération de terre brûlée contre l’Algérie, accusant l’Armée de libération nationale (ALN), élément révéré d’une mémoire algérienne combattante, fer de lance de la guerre anticolonial, d’être une armée nazie, dirigée et inspirée par d’anciens soldats nazis. Et, cette année-là, il s’affichait en fervent soutien de l’État sioniste dans le Salon du Livre de Paris dédié à la littérature israélienne, boycotté par les écrivains du Maghreb et du Moyen Orient. Dans ses dégoulinantes saillies, les Algériens étaient traités d’antisémites, fomenteurs de pogroms, qui refusent d’enseigner la Shoah dans leur École. Sansal savait d’instinct que plus il créait le buzz plus les ventes de ses ouvrages s’emballaient.
Après le pèlerinage à Jérusalem (kippa, talit, mur des lamentations et visite de monuments commémoratifs), au mois de juillet 2012, déjà annoncé dans « Le Village de l’Allemand », Sansal se dressera ignominieusement en 2014 dans des propos sous la ceinture contre Mme Bukova, directrice générale de l’Unesco, qui avait annulé à la demande d’ambassadeurs arabes une exposition sur le patrimoine archéologique d’Israël – aliénant des sites de fouilles palestiniens. Ce « coup de gueule » lui vaudra de figurer sur l’instruction expresse du Boucher de Ghaza Netanyahou comme indispensable référent dans des comités culturels gouvernementaux israéliens et de parler de la même voix outrancière et vulgaire que son protecteur dont il se flattera de posséder la ligne directe.
C’est en Israélien putatif que Sansal regrette devant les dineurs du CRIF, après son coup d’éclat à l’UNESCO, que l’État hébreu « doit se battre sur trente-six fronts, et pendant ce temps ses amis se font distants comme s’ils s’apprêtaient à changer de doctrine. Une démocratie au cœur du monde arabe ne leur semble plus une idée sensée, elle crée trop de remous autour d’elle, elle met à nu les voisins, ça les enrage » (4). Un faucon du gouvernement israélien ne démentirait par ce propos rageur. Sur le conflit israélo-palestinien, Sansal est résolu, allant plus loin que l’extrémiste nazi Netanyahou : il fait ainsi valoir qu’il n’y a pas de « conflit israélo-palestinien », mais « israélo-arabe », car les Palestiniens n’ont jamais existé et n’ont rien demandé. Répliquant sur un réseau social à une intervenante, l’interpellant sur son discours au dîner du CRIF, il devait préciser dans un profond déni : « Les arabes ont roulé tout le monde dans la farine, ils ont inventé les palestiniens et leur ont inventé une identité, une histoire et un programme, comme ils ont réussi à faire croire aux maghrébins qu’ils étaient arabes, et comme ils font croire au monde qu’ils travaillent à la paix » (5). La vérité du dîneur du CRIF reste immuable, en 2023 comme en 2014 et en 2012, n’y a pas de Palestine et de Palestiniens car l’Histoire n’en a jamais reconnu la trace et il n’y a surtout pas d’occupation coloniale israélienne en Palestine. Est-ce que cette charge sioniste exaltée ne vaut pas le Goncourt ?
De 2008 à cet automne 2023 d’extermination de la population de Ghaza, Sansal manifeste un soutien inconditionnel à Israël dont il retire de viles récompenses. Relevons pour l’anecdote : une des plus humiliantes est celle que lui remettra en monnaie sonnante et trébuchante – 1905 euros exactement, correspondants à la date de la séparation de l’Église et de l’État en France – le sénateur du Parti radical de gauche (proche du PS) Jean-Michel Baylet, membre du groupe parlementaire France-Israël, qui menait à titre personnel un combat pugnace contre l’admission de la Palestine à l’ONU. Le prix Jean Zay, lui a été attribué le 4 décembre 2013, par le Sénat français, pour son inconsistant opuscule « Gouverner au nom d’Allah. Islamisation et soif de pouvoir dans le monde arabe » (2013), navrant discours anti-arabe et islamophobe. C’est vrai que l’islamophobie commençait à s’imposer avec la défense du sionisme mondial comme l’autre ressource du « petit juif de Belcourt ».
Las ! En 2015, l’activisme sioniste et islamophobe reste sans conséquences. Son roman « 2084. La fin du monde » est recalé dans un exceptionnel tour de table de l’académie Goncourt sous les fondrières du musée du Bardo, à Tunis. Un célèbre membre du jury dira dans un aparté avec la presse la position unanime de ses pairs. Le magazine parisien « L’Obs » en apporte un compte-rendu précis : « Pour beaucoup, l’affaire était jouée : Sansal serait le Goncourt 2015. Son livre, ‘‘2084’’, charge orwellienne contre le fondamentalisme islamique, se vend bien (septième au dernier classement des meilleures ventes L’Obs/GfK), et il a bénéficié d’une exposition médiatique importante ces dernières semaines. Cette Sansal-mania portait peut-être plus sur sa passionnante personne et son urgent sujet que sur le texte lui-même, qui souffre de quelques défauts. Certains s’apprêtaient même à déplorer ce triomphe annoncé. Un juré du Goncourt, récemment, émettait des réserves préventives, en rappelant que ‘‘le Goncourt n’est pas un prix de vertu’’. Il aura été entendu. Depuis le musée du Bardo, en Tunisie, le jury a sélectionné les quatre derniers romans en lice. Sansal, donc, n’y figure pas… » (6). Allons donc ! « Quelques défauts… » ? La morale de ce sordide affairement c’est que « Sansal ne sait pas écrire ». Tout est dit, comme un point final.
En quête d’une nouvelle stratégie
Qui est Boualem Sansal ? En France, son terrain de prédilection, il est plus connu comme lanceur d’alerte sur les Algériens harraga, l’Islam, Israël et le sionisme mondial, aiguisant la peur dans les foyers et dans les chefferies politiques et policières, en pourfendeur du terrorisme arabo-islamique. Aujourd’hui, le crépuscule est tombé sur ses infâmes agissements d’écrivain sans talent, faiseur de buzz, qui soutient par le mensonge « la solution finale » à Ghaza, en défenseur acharné d’Israël et du sinistre Netanyahou pour engranger des prix littéraires, parfois, on l’a vu, à l’enseigne du sionisme mondial.
Fin de partie pour des récompenses littéraires prestigieuses ? Peut-être pas. À la faveur de l’agression génocidaire sioniste contre Ghaza, Sansal s’est remis en selle. Depuis le 7 octobre 2023, il a revêtu sa défroque de Juif errant pour courir les rédactions de France et prêcher la bonne parole de la paix pour Israël, accablant « Ghaza, la terroriste », sur un fond immuable d’arabophobie et d’islamophobie. Que vaut cette agitation dans les cercles littéraires, en France notamment où la sincérité de sa conversion juive devrait certainement être discutée ? Cette assignation à une judéité, aussi imprévue que foudroyante, de Sansal ne s’explique que par une inaltérable rapacité de prix littéraires (7).
Cependant, à l’épreuve de faits tenaces et d’échecs répétés, il est bien visible qu’Israël, qui dispose d’un puissant lobby sioniste dans les lettres françaises, ne peut subjuguer les jurys de prix littéraires, à Paris et ailleurs, pour propulser Sansal vers les cimes. Et que l’immonde Sansal, imposteur des Lettres, ne sait pas écrire une œuvre littéraire universelle pour y prétendre. Ces dernières années, son bilan littéraire est bien mince, insignifiant : après « 2084 », « Le train d’Erlingen ou la Métamorphose de dieu » (2018) et « Abraham et la Cinquième alliance (2020) ont été boudés par la critique et le lectorat français. En peu de mots : une morbide appétence de distinctions littéraires et jamais de talent et de créativité. Que peuvent, désormais, Israël, le sionisme mondial, Bernard-Henri Lévy, Alain Finkielkraut, Pierre Assouline, Pascal Bruckner et tutti quanti pour élever sur la scène littéraire française celui qui les a manipulés « avec tout l’art nécessaire » pour parvenir à son ambition d’irrépressible gloire littéraire ? Comme, il l’a fait de longues années avec le pouvoir d’Alger.
Il n’y a rien de net chez Sansal-« Rabbinet », coureur de fond des prix littéraires : le voilà, à soixante-quatorze ans sonnés et quinze années en papillotes et « talit », en quête d’une autre stratégie de légitimité littéraire. Par quel biais ? Hier, il a utilisé jusqu’à l’usure le levier juif et sioniste pour triompher dans les médias et dans la librairie, aujourd’hui il se fabrique un ethos d’« écrivain algérien maudit », l’empreinte juive en sus, pourchassé dans son pays par une société et un pouvoir antisémites, qui ne cesse de crier envers et contre tous son credo sioniste au monde. À la faveur de plusieurs entretiens et tribunes dans la presse française depuis le 7 octobre 2023, Boualem Sansal est devenu subitement un « écrivain algérien ». Il l’était moins auparavant.
Que faire pour en finir avec ce chien de guerre sioniste, demi-Marocain de bordel militaire colonial de l’Ouarsenis, qui marche sur les dépouilles des victimes de Ghaza ? Il ne serait ni sage ni salutaire de le saigner au « Flore » ou dans une pissotière parisienne, comme l’a été récemment cet autre piteux écrivain de fantaisie, bâtard de la littérature mondiale, dans une sauterie à New York. Ou de lui destiner « deux balles au front » qu’a supputées un de ses zélateurs imbéciles de la presse culturelle parisienne. Horrible destinée. Qui la lui souhaiterait ? Appelons plutôt sur ses méprisables errements politico-idéologiques calculés « avec tout l’art nécessaire » l’oubli, l’oubli et, aussi, l’effacement d’une algérianité usurpée. Après avoir injurié les victimes de Ghaza-la-Martyre, approuvé et célébré le génocide des Palestiniens par son « plus-que-frère » Netanyahou, le fantasque athlète des prix littéraires, décidément un mal incurable, a-t-il le droit de se proclamer Algérien et d’utiliser cette qualité comme tremplin de félonies futures ? Plus que dans toute autre nation du monde, c’est le combat et le sacrifice de leurs héros et de leurs héroïnes de la Guerre d’Indépendance qui a donné aux Algériens leur nom : ce nom, Sansal le mérite-t-il ?
SALEM EL QOBBI
Notes
1. « Boualem Sansal : ‘‘Je suis sur toutes les listes noires’’ », « Le Point », n° 2672, 19 octobre 2023.
2. « Boualem Sansal ‘‘L’actualité, ça se vend, l’Algérie aussi’’ », entretien avec Ali Ghalem, « Le Quotidien d’Oran », 20 septembre 2000.
3. Id.
4. Allocution au dîner du CRIF (Paris, 2014).
5. Id.
6. « Goncourt : quatre finalistes (et aucun Boualem Sansal) », « L’Obs », 27 octobre 2015.
7. Un prix littéraire augmente nettement les ventes. En termes strictement financiers, le Goncourt assure un tirage en France autour d’un million d’exemplaires et quatre fois plus avec les traductions. La règle dans l’édition parisienne est qu’à partir de seuil de cinquante mille exemplaires par ouvrage, un écrivain peut décider de son pourcentage sur le prix de vente public hors taxes. Alors que les droits de l’auteur sont traditionnellement plafonnés à 10 % du prix public hors taxes de l’ouvrage, le romancier et essayiste Jean d’Ormesson avait exigé et reçu 25% de l’éditeur Gallimard. Pour Boualem Sansal, la course aux prix littéraires est aussi une question de revenus, de gros revenus.