Entreprendre – Rachid Ibersiene, chantre du fromage et de la bonne cuisine
Rachid Ibersiene a deux passions et elles vont de pair comme les deux faces d’une même pièce de monnaie : la cuisine et le fromage. A 48 ans, ce quadragénaire, à l’allure juvénile, est quatre jours par semaine chef cuisinier à La Casa, un restaurant huppé à Azazga.
Le reste du temps, il s’occupe de son projet de fromagerie chez lui à Tamassit, à Azzefoun. Rachid veut produire du vacherin, une spécialité suisse. Suisse, car c’est dans cette patrie du chocolat, du fromage et du secret bancaire bien gardé que notre homme a fait des études et une formation en la matière.
En 2006, il quitte les verts alpages suisses pour les collines de ses ancêtres afin d’y exercer les métiers de ses passions. Ses premiers constats sont sévères : les fromages qu’on mange ici sont une catastrophe. Les fromages à pizza, par exemple, sont à base d’eau, le cheddar vendu est de 3e choix, car fait à base de déchets industriels et il y a manifestement un problème d’hygiène alimentaire et de santé publique. «Le premier médicament, c’est l’alimentation», dit Rachid.
Un vieux principe qui a dû être oublié au vu des nombreux Algériens qui font la chaîne chez les médecins. Pour ce qui est de la cuisine, «il n’y a pas de culture culinaire en Algérie», soutient Rachid. Pour preuve, quand l’Algérien va au restaurant, il demande invariablement une viande. Ailleurs, les gens ont un budget resto et c’est une sortie régulière programmée dans l’agenda du couple ou de la famille. Par ailleurs, il pense que le métier de cuisinier n’est pas valorisé. «Cuisinier, c’est une voie de garage pour les jeunes en déperdition.
En Suisse, la cuisine c’est trois ans d’études avant d’attaquer les stages pratiques.» «Ailleurs, le chef cuisinier organise, crée les nouveaux plats, valide les plats, lance la carte, étudie les rapports qualité-prix, calcule les coûts, car il y a une notion de rentabilité à avoir et le chef est secondé par une équipe de cuisiniers», affirme-t-il.
Quand on veut faire de la bonne cuisine en Algérie, la première difficulté est de trouver les bons ingrédients. «En Suisse, à titre d’exemple, j’avais sous la main près de 20 variétés de salades. Ici, c’est un peu pauvre.» Ce n’est pas la peine de chercher du steak de crocodile ou du filet d’autruche quand on sait que même la dinde n’a intégré la table algérienne que ces dernières années. En attendant, Rachid, dont la spécialité est le couscous au chevreau, compte bien réconcilier un jour, selon ses modestes moyens, une grande volonté et une passion sans bornes les Algériens avec les arts de la table.