La nuit de mon cauchemar
Mon âme est en berne. Mon cœur éparpillé tremble au milieu des mots impuissants dans leur humilité qu’ils hissent à la hampe de mon cerveau où flotte un drapeau blanc giflé à tous les vents. Ils sont là, emmurés dans un silence de froid où le désarroi peine à avancer entre une douleur muette et une souffrance intense dont l’éloquence n’a point de parole pour signaler son existence au pourtour de cette plaie immense. Mon esprit muni de sa petite lanterne accrochée à son doigt majeur, où il égrène mille et une prières, est vivement saisi de terreur de crainte d’être englouti par la terre en folie.
Sans pathos ni pédantisme démesuré, mes mots pathétiques s’alignent comme des chiens faméliques pour dire l’instant de leurs ventres creux où se mêlent leurs aboiements rachitiques dans un lamento poignant et débridé. La douleur lâche et servile se faufile comme un reptile à travers les roseaux verts de mon cœur où les maux de cet ailleurs sont venus tresser leur infinie langueur à la laine vaporeuse de ma chair. Les maux, où se niche la peine comme une chienne dressée, déversent leur noir sanglot sur le paletot usé où s’échine mon pauvre dos à porter ce lourd fardeau.
Cette nuit blanche horodatée est à inscrire en rouge et noir sur le mur défait de l’histoire aux couleurs de notre sang frelaté où se brise notre propre miroir. Le temps prisonnier dans le cadran du temps ameute ses heures où la folie se lit à la manière d’un tremblement de terre sur la peau meurtrie de mes douces brebis, la douce Syrie et la belle Turquie. Deux en un ! Le malheur se multiplie dans le tissu fin de mon esprit occupé à recoller les débris de ses murs démolis.
Ô, ma belle Syrie ! Ô, ma douce Turquie ! Je n’ai que mon écriture pétrie à même les blessures pour compatir à vos meurtrissures où se suicide la vie. Je n’ai que mes mots épris de littérature où se lamente ma poésie sur les horizons bleus de la nostalgie. Je n’ai que cette page en guise de témoignage de ma compassion à la hauteur de mon âge, ce fidèle compagnon témoin de nombreux carnages. Au-delà de la douleur et de tous les alibis, il demeure une vérité à la hauteur de la tragédie.
Main dans la main, les écrivains, qu’ils soient turcs, syriens ou simplement terriens doivent révolutionner leurs écritures afin de doter les pays de structures et de nouvelles stratégies à mettre en pratique sur le terrain. Finis les deuils sans raison et la guerre des ombres ! Que renaisse la vie de sous les décombres ! Halte aux guerres infinies, au-delà de tous les malentendus ! La vie est une fille unique, elle est un don, elle est une création qu’il faut aimer au-delà de toute raison. Au milieu de mes mots conscrits, je fais de la résistance dans le maquis abandonné de l’existence où je gigote comme un bébé parmi les vivants.
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Merci mon ami pour ce vibrant témoignage
La tragédie nous a tous secoués