Le président Macron aurait-il perdu son raisonnement ?
Tarek Benaldjia
Il n’y a pas un seul jour où nous ne lisons pas un article négatif sur l’Algérie en France. Si l’image du pays est aussi ternie par les médias français, les raisons sont nombreuses.
Il est impossible de parler de la neutralité et de l’objectivité du président Emmanuel Macron en France dans le traitement médiatique de l’Algérie.
Si « l’Algériephobie » avance en France, la contribution de l’Elysée et de Matignon à la création d’une telle ambiance de haine et de division est indéniable.
C’est quoi l’histoire ?
Jeudi 30 septembre, le chef de l’Etat a convié à l’Elysée, pendant deux heures, dix-huit jeunes gens – Français d’origine algérienne, binationaux et pour certains Algériens – pour échanger « librement » sur ce conflit. Avec un objectif : apaiser « cette blessure mémorielle », comme le rappelle l’historien Benjamin Stora, également présent.
Pourquoi s’adresser à ces jeunes en particulier ? Parce que Nour, Amine, Lina, Gauthier, Lucie ou encore Yoann sont les petits-enfants de ces mémoires froissées entre les deux pays de la Méditerranée. En effet, leurs grands-parents ont été combattants du Front de libération nationale (FLN), militaires français, appelés, harkis ou rapatriés (pieds-noirs et juifs). L’un d’eux est même l’arrière-petit-fils du général Salan, ancien chef de l’Organisation de l’armée secrète (OAS).
Depuis juin, dans une salle de Sciences Po Paris, ces jeunes, étudiants pour la plupart, se voient et réfléchissent à la manière de rapprocher toutes ces mémoires dont ils sont les héritiers. Ils ne se connaissaient pas auparavant, ils ont été réunis par Cécile Renault, chargée de mettre en œuvre les préconisations du rapport de Benjamin Stora sur « la mémoire de la colonisation et de la guerre d’Algérie », remis en janvier. Ils se sont donné pour mission de présenter, d’ici à la fin octobre, dix messages au président de la République, censés nourrir sa réflexion autour de « la réconciliation entre les peuples français et algérien ».
« On n’a pas réglé le problème ? »
Le déjeuner à l’Elysée est en quelque sorte un point d’étape, et une occasion pour le chef de l’Etat de se confronter à cette « troisième génération » si précieuse à ses yeux.
« Vous portez une part d’histoire et aussi un fardeau, leur lance-t-il. Un fardeau car on n’a pas réglé le problème. Nos générations n’ont pas vécu cette guerre, ça nous libère de beaucoup de choses. Vous êtes une projection de la France, votre identité est une addition à la citoyenneté française. C’est une chance pour la France, une chance inouïe. Et pour moi, ce n’est pas un problème, on l’a fait trop vivre comme tel. »
L’Algérie: un sujet qui apporte de l’audience au candidat malheureux Macron
Afin de comprendre pourquoi un pays comme le notre suscite autant d’intérêts en France, il convient déjà de déterminer tous les grands enjeux derrière le traitement médiatique de ce pays. En effet lorsqu’on parle de l’Algérie, de nombreuses autres questions importantes entrent en jeu dont notamment, le soutien que porte Macron aux déserteurs, opposants et Hommes politiques algériens poursuivis par la justice de leur pays, préférant se rendre en France pour y trouvés refuge est pour l’argent volé et pour leur besoins vitaux, l’Islam, les sujets relatifs à la migration, au terrorisme et à la sécurité des frontières, tous étant des sujets d’actualité de première importance du candidat malheureux aux élections présidentielles Emmanuel Macron.
A l’heure actuelle, si les aspects négatifs de l’Algérie sont mis en avant de façon exagérée et biaisée dans les médias français, il est rare d’y observer les développements positifs et encourageants dans le pays. Par ailleurs, la terminologie employée dans le traitement des sujets relatifs à l’Algérie varie clairement en fonction des relations entre l’Algérie et la France mais aussi de la tendance politique des médias tant nationaux qu’internationaux, dans le respect d’un calendrier prédéfini par les programmes révélés dans l’Hexagone.
Il peut être utile ici de revenir sur les déclarations du président Macron : Les derniers propos tenus par ce dernier ne sont pas de nature à apaiser les choses. Loin de là. En recevant jeudi 30 septembre des descendants d’acteurs de la guerre d’Algérie, de tous les bords, le président français entendait échanger « librement » sur le conflit et apaiser la « blessure mémorielle ». Mais la rhétorique qu’il a utilisée est très dure vis-à-vis de la classe dirigeante en Algérie, l’accusant de vivre de la « rente mémorielle » et assumant que la dernière restriction sur la visas la visait.
Des propos jamais entendus à ce niveau de responsabilité. Interrogé sur sa dernière décision de réduire drastiquement le nombre de visas accordés au Algériens, Macron a ouvertement assumé que les restrictions visent en premier lieu les responsables algériens.
« Il n’y aura pas d’impact sur ce qu’on évoque. On va s’attacher à ce que les étudiants et le monde économique puissent le garder. On va plutôt ennuyer les gens qui sont dans le milieu dirigeant, qui avaient l’habitude de demander des visas facilement », a-t-il répondu.
Ce qu’il convient d’appeler « la crise des visas » était jusque-là le dernier acte d’une longue série de tensions entre les deux pays.
Mardi 28 septembre, le porte-parole du gouvernement français, Gabriel Attal, a annoncé la décision des autorités de son pays de réduire à 31500 le quota de visas à accorder aux Algériens pendant les six prochains mois, soit la moitié du total délivré durant la même période de l’année 2020.
Le lendemain, mercredi 29 décembre, l’ambassadeur de France à Alger,François Gouyette, est convoqué au ministère des Affaires étrangères.
Dans les us diplomatiques, la convocation d’un ambassadeur n’est pas un fait anodin.
La crise ne devrait pas en rester là, car Macron n’a pas fait qu’enfoncer le clou sur la question des visas.
Il a aussi dénoncé une « histoire officielle, « totalement réécrite » » qui « ne s’appuie pas sur des vérités » mais sur « un discours qui repose sur une haine de la France ».
« Un égarement impardonnable qui ne restera pas sans conséquences »
Macron nie l’existence d’une nation algérienne, avant la colonisation « la construction de l’Algérie comme nation est un phénomène à regarder ! Est-ce qu’il y avait une nation algérienne avant la colonisation française ? demanda-t-il
A propos de l’histoire, le président français s’en prend à une « histoire officielle » Algérienne qui serait, selon lui, « totalement réécrite » et qui ne s’appuie pas sur des vérités » mais sur un discours qui « repose sur une haine de la France »
Selon Macron , la nation algérienne post-1962 s’est construite sur « une rente mémorielle » entretenue par « le système politico-militaire ». Macron a exprimé son inquiétude de cette « réécriture » et dit craindre « un renfermement » de la mémoire et « un éloignement » avec le peuple algérien.
Aussi, il a affirmé souhaiter une production éditoriale portée par la France, en arabe et en berbère, pour contrer ce qu’il qualifie de « désinformation » et « une propagande » portées par les Turcs qui « réécrivent complètement l’histoire ».
Une source très fiable, qualifiant ces propos d’ « égarement impardonnable qui ne manquera pas de susciter une réaction officielle de vive condamnation au niveau approprié ». « Se poser, ingénument, des questions sur l’existence de la Nation algérienne pour justifier l’amnésie mémorielle de la France officielle est un égarement impardonnable qui ne restera pas sans conséquences », indique la même source.
« Tout comme l’est, ajoute-t-elle, l’aveuglement qui consiste à imputer au système « politico=militaire» (sic) algérien une rente mémorielle pour mieux exonérer cette France officielle autiste, qui refuse de voir, en face, son terrible passé colonial, fait de meurtres, de viols et de spoliations, autant d’exactions qui relèvent de crimes contre l’humanité ».
Pour la même source, cette sortie n’est pas innocente et est motivée par des considérations électoralistes : « Cette sortie de route du président Macron, à propos de l’Algérie et de ses institutions, est lamentable et elle pue à plein nez l’opportunisme électoral ».
La même source estime que même les restrictions sur les visas obéissent au même objectif.
« Elle est, d’ailleurs, de la même veine que la décision injustifiée par laquelle ce président a décidé de réduire drastiquement les visas pour les ressortissants des pays du Maghreb. À défaut de nourrir sa réflexion pour ‘apaiser la blessure mémorielle’ comme il le prétend, Macron s’égare car il est littéralement obsédé par les prochaines échéances présidentielles et au lieu d’élever le débat, il se résigne à patauger dans la fange anti-algérienne pour ne pas se laisser distancer par les racistes du RN et de Génération Z. Il est pris dans la nasse de l’extrême droite », explique la source algérienne.
« La rente et le fonds de commerce anti-Algérie prospèrent, d’année en année, signe que c’est plutôt le système français qui est fatigué et qu’il est vain de chercher des justifications fumeuses de l’autre côté de la Méditerranée », conclut-il.
La « nouvelle Algérie » perçue comme une menace
Si l’Algérie est attaquée par Macron, ce n’est pas uniquement parce qu’elle intéresse les Français mais aussi parce qu’elle « suscite des craintes et inquiétudes » en raison de son importance géostratégique entre l’Europe et l’Afrique, ce qui fait que son avenir est intimement lié à d’autres grands blocs économique de ce monde, que celui de l’union européenne.
L’Algérie est effectivement un acteur incontournable des relations internationales dont les orientations socioéconomiques et politiques influencent directement les pays de l’Union européenne y compris la France.
Pourtant la croissance économique fulgurante de l’Algérie est une donnée positive pour la stabilité de la France, elle est également perçue comme une menace dans un contexte de concurrence entre un pays émergent et le pays développé tel que la France, en stagnation voire en récession économique avec une population de plus en plus âgée.
La volonté de l’Algérie de gagner de plus en plus d’indépendance économique dans le cadre de ses objectifs 2025-2030 en développant et diversifiant ses productions comme dans le domaine de la défense mais aussi de ne plus céder aux pressions de l’ancienne puissance coloniale en renouant des liens forts avec d’autres acteurs internationaux comme la Russie et la Chine inquiètent les cercles politiques européens et français notamment. Ses activités économiques, militaires et humanitaires dans différentes régions du monde, comme les pays du Sahel et les pays arabes sont même qualifiées « d’inacceptables» par les médias français qui ne le voient pas de bon œil.
Tebboune : un président, sous le feu de Macron et des médias français
Un autre argument majeur dans la diabolisation médiatique de l’Algérie est la perception du président algérien Abdelmadjid Tebboune en France et en Europe. Si au début de son mandat en Algérie en tant que président de la république, il était favorablement accueilli par la communauté internationale comme le « représentant légitime du peuple algérien» dans le monde, l’approche des médias français vis-à-vis de son personnage, a progressivement évolué dans un sens extrêmement négatif voire caricatural.
Aujourd’hui injustement décrit par le président français Macron comme « Président imposé par l’armée», le véritable homme fort du pays n’est pas le président Tebboune, mal élu en décembre 2019, mais le chef d’état-major Saïd Chengriha et derrière lui “les “décideurs” militaires qui, sous une forme ou une autre, accaparent le pouvoir depuis des décennies”. Il est présenté au même titre que le président américain Trump, le président turc Erdogan et ou le président russe Poutine comme des présidents « populistes » qui ne respectent pas la démocratie et les droits de l’homme mais qui n’agissaient qu’à des fins politiques et électoralistes.
C’est ainsi à son sujet que nous assistons aux pires manipulations. Ses propos et discours sont souvent détournés pour mettre en avant un personnage haineux et radical, comme le montre clairement les propose du président français Macron. Les médias mainstream à la solde du Quai d’Orsay et de ses alliés proches du MAK et de Rachad, au nom de prétendues violations des droits de l’homme.
Ses prises de position courageuses sur l’actualité internationale créent de la matière à exploiter : de l’affaire du Sahara occidental au statut de Jérusalem « capitale éternelle des palestiniens », la guerre civile en Libye, des attentat terroristes dans le monde aux tragédies mondiales comme l’accueil des réfugiés subsaharien et syrien ou encore le grand jeu auquel s’adonne Paris avec ses anciennes colonies, des projets extraordinaires qu’il met en place en Algérie aux partenariats qu’il développe dans le monde, Tebboune se démarque clairement de la France.
Voila les raisons de la colère de Macron, à ajouter au fait qu’il rage aussi que l’Algérie ne soutient pas Haftar aux côtés de la France et des Emirats en Libye.
Macron ne supporte pas qu’un autre pays que la France puise développer des liens avec l’Afrique. On peut déjà deviner sa fébrilité avec ses dernières déclarations dans le Monde sur l’Algérie et la Turquie.
- Au moment où j’écrivais cet article l’Algérie a décidé de rappeler son ambassadeur à Paris pour consultations, a annoncé la présidence de la République ce samedi.