Pour que personne n’oublie l’apport des femmes durant la Guerre de Libération nationale, le recueil de témoignages auprès de celles qui sont toujours en vie devient une urgence.
A travers son récit intitulé «Liberté– Sacrifices», édité par Aframed éditions, l’auteure Adila Katia a retracé le destin de deux femmes qui ont participé à la libération du pays. La guerre d’Algérie ne se limite pas aux sacrifices des hommes. «A travers cette publication, j’ai voulu mettre en lumière l’engagement, le combat et le sacrifice de la population qui a libéré le pays du joug colonial», nous dira Adila Katia, rencontrée lors du Salon du livre de Boudjima, dans la wilaya de Tizi-Ouzou. Pour elle, la libération du pays n’a pas été l’affaire des hommes uniquement.
«J’estime que le rôle des femmes dans les zones rurales n’a pas été valorisé. C’est ce qui m’a poussé à écrire ces textes en 1993 alors que j’avais 22 ans. Les témoignages semblables dans mon entourage me les ont rappelés, d’où ce livre en hommage à ces femmes et hommes inconnus qui ont tout donné pour que nous puissions être libres!», nous a-t-elle révélé.
H’nifa , jeune veuve, a juré de ne plus rester chez elle après avoir perdu son mari et un grand nombre de personnes de sa famille. «Le cœur serré, elle se rappelait la vieille maison de ses parents en feu, mais le pire a été de voir son frère, les pieds attachés par une corde, traîné derrière une jeep jusqu’à ce qu’il rende l’âme. A leur départ, les soldats n’avaient laissé que des cadavres et des ruines. Les rares survivantes pleuraient leur mari, leur père, leurs enfants», raconte-t-elle.
«Ils détruisent le pays…Ils partiront quel que soit le prix à payer», se promit-elle. La jeune veuve qui a trouvé refuge pendant deux ans chez Maria, a juré de venger sa famille et de rejoindre ses frères et sœurs au maquis pour libérer le pays. H’nifa passait inaperçue et personne ne pouvait se douter que la blonde aux yeux bleus était algérienne. Infirmière, elle en profitait pour transporter des documents et des médicaments lors de ses déplacements d’une région à une autre. Mademoiselle, comme les colons l’appelaient, risquait sa vie pour soigner les blessés jusqu’à son arrestation vers la fin de la guerre de libération. Après l’indépendance, elle a continué à exercer son métier d’infirmière dans sa région natale. Ce récit nous fait vivre chaque émotion du personnage et nous captive jusqu’à la fin.
Le second témoignage, intitulé Sacrifices, est délivré par Kheyra, une vieille de 80ans qui vit seule en haut d’une colline. Aux côtés de son mari, elle avait compris qu’elle ne pouvait plus subir la maltraitance des colons.
«On voulait le meilleur pour nos enfants; l’accès à l’école et aux soins. Mes petits anges s’ils avaient été soignés à temps, seraient encore de ce monde», a-t-elle dit.
Pour Kheyra, l’amour de la patrie est un devoir sacré. Parfois on oublie que ces femmes se sont sacrifiées. H’nifa et Kheyra sont des exemples qui ont tout donné pour l’indépendance du pays. Il est vrai que ces «guerrières» n’ont pas cherché de la reconnaissance ,mais ce livre leur rend un bel hommage. «Je pense que toutes les femmes ont participé d’une manière ou d’une autre durant la guerre. Elles étaient illettrées et n’avaient que leurs mains, leur courage et cependant, jouaient un rôle primordial d’intermédiaire entre les moudjahidine et leurs missions variaient d’une région à une autre. L’objectif de l’auteure est de leur rendre hommage.
«Des femmes ont été arrêtées, emprisonnées, violentées ou ont perdu des êtres chers, n’est ce pas là un sacrifice?» Malgré son jeune âge lors de l’écriture de ces nouvelles, l’auteure a compris et tenu à parler de ces Femmes Algériennes (inconnues) qui agissaient sur tous les fronts durant la glorieuse guerre de 1954 à 1962. Un livre à lire et à partager…
Samira Belabed
«Liberté– Sacrifices», d’ Adila Katia édité par Aframed éditions
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