Cher Monsieur Yasmina Khadra, SAHA EIDEK
Nous avons suivi avec respect et attention votre récente démarche auprès du président Abdelmadjid Tebboune, telle qu’elle a été rapportée par Le Monde et relayée par de nombreux autres médias, dans laquelle vous auriez plaidé pour la libération de votre confrère Boualem Sansal. Si cette démarche est avérée, alors même que son cas n’est pas encore jugé définitivement et que le procès en appel est en cours, nous pensons fortement que la majorité du peuple algérien reste opposée à toute mesure de clémence, en raison de l’extrême gravité des propos pour lesquels M. Sansal est poursuivi. Dans ce contexte, nous comprenons votre volonté d’humanité face à la maladie, mais nous estimons que toute prise de position doit aussi tenir compte de la douleur et de la mémoire collective des Algériens profondément choqués par ces déclarations.
C’est précisément en cela que nous souhaitons vous interpeller, respectueusement par cette lettre ouverte. Si le principe que vous défendez est bien celui de la justice et de la dignité humaine, pourquoi ne pas également utiliser votre voix d’écrivain reconnu pour rappeler à la France ses propres manquements, en exigeant des gestes tout aussi attendus envers d’autres figures injustement persécutées ?
Nous pensons ici à deux cas emblématiques : Georges Abdallah et Maâti Monjib (écrivain aussi).
En France, le cas de Georges Abdallah incarne l’une des injustices les plus flagrantes de ce que l’on ose encore appeler “l’État de droit”. Militant communiste libanais et défenseur indéfectible de la cause palestinienne, il est emprisonné en France depuis plus de 40 ans — un record inavouable pour un pays qui se targue de défendre les droits humains.
Libérable depuis 1999, Georges Abdallah a vu sa remise en liberté systématiquement bloquée non par les juges, mais par des décisions politiques dictées en sous-main par les pressions de puissances etrangeres. En novembre 2024, la justice française elle-même avait pourtant ordonné sa libération. Mais, une fois encore, l’État a fait appel, et le jugement a été repoussé au 19 juin 2025 — repoussant ainsi l’espoir d’un homme qui n’a jamais cessé de défendre ses convictions avec dignité.
Son avocat dénonce à juste titre une justice totalement instrumentalisée : « Une fois de plus, ils cèdent aux pressions … », rappelle-t-il. Car depuis le début, le dossier de Georges Abdallah est pollué par des interférences. Pendant ce temps, cet homme de 73 ans, salué par les mouvements de prisonniers palestiniens et respecté dans le monde entier, croupit dans les geôles françaises — pour des faits survenus dans un contexte de lutte armée vieille de plus de quatre décennies.
Quant à Maâti Monjib, écrivain comme Sansal, historien et Franco-Marocain depuis de nombreuses années (alors que Sansal n’a obtenu la nationalité française que depuis quelques mois), il subit depuis 2020 une persécution politique manifeste : interdit de quitter le Maroc, biens confisqués, poste universitaire suspendu. Le 3 avril dernier, il a entamé une énième grève de la faim pour dénoncer l’interdiction de se rendre à une conférence à la Sorbonne. Son état de santé est alarmant.
Or que constate-t-on ?
Pour Boualem Sansal, Franco-Algérien, l’on assiste à un battage médiatique et politique considérable en France : manifestations, éditoriaux enflammés, déclarations présidentielles, insultes sur les plateaux télé. Un véritable capharnaüm, pour reprendre le mot même du président Tebboune, qui contraste fortement avec l’indifférence quasi totale entourant d’autres cas pourtant tout aussi graves, sinon plus.
Pour Maâti Monjib (écrivain aussi), le silence est total. Un simple entrefilet dans Le Figaro, puis l’oubli. Deux écrivains, deux situations tragiques, deux traitements médiatiques radicalement différents.
Cher Monsieur Khadra,
Votre voix porte. Votre engagement pour la liberté d’expression est sincère. Nous vous demandons respectueusement : pourquoi ne pas l’étendre à ces deux cas ? Pourquoi ne pas appeler aussi la France — qui se veut championne des droits de l’Homme — à se montrer cohérente et équitable ?
En effet, Monsieur Khadra, vous qui, dans de nombreuses interventions publiques, avez rendu un véritable hommage à la France et à la langue française, vous parlez de la langue française comme de « l’une des plus belles langues du monde, hospitalière, capable d’exprimer toutes les émotions humaines », et où vous défendez l’image de la France comme « un mythe qu’il ne faut pas défigurer », votre parole a aujourd’hui une grande crédibilité. Elle porte. Et c’est précisément pour cela que nous pensons que cette même voix pourrait être mise au service d’un appel à la cohérence des valeurs que vous chérissez : justice, dignité humaine, respect des droits. Exiger aujourd’hui de la France qu’elle rende justice à Georges Abdallah et qu’elle cesse d’ignorer le calvaire de Maâti Monjib , ce serait un geste fort, en parfaite continuité avec l’hommage que vous avez toujours rendu à cette langue et à ce pays.
La défense des écrivains persécutés, des militants injustement emprisonnés, ne peut être à géométrie variable selon les intérêts ou les alliances du moment. Nous avons besoin de voix fortes, justes, qui dénoncent toutes les injustices, d’où qu’elles viennent.
En vous remerciant pour l’attention que vous voudrez bien accorder à ce message, et dans l’espoir que votre humanisme saura s’élargir à ces combats trop souvent passés sous silence.
Respectueusement,
Hope&ChaDia
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3 comments
Il y a aussi Christian Tein (leader indépendantiste Kanak) avec d’autres Kanaks.
vous blâmez Yasmina khadra ,de ne parler que de sansal ,pourquoi vous même ,vous n’avez pas parler de Mohamed lamine Belghite (écrivain aussi) dans votre long texte adressé à cet auteur
si si j’a i parler de belghit …. https://jazairhope.org/fr/dr-m-doumir-et-dr-m-a-ferad-avaient-deja-repondu-a-belghit-le-sionisme-derriere-les-manoeuvres-de-division-identitaire/