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« ÉCRIRE EST UN ACTE DE RÉSISTANCE »

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Salima Mimoune, Romancière à L’Expression

«Écrire est un acte de résistance»

Salima Mimoune est écrivaine, auteure de trois romans publiés : «Les ombres et l’échappée belle», «Le Bal des mensonges» et «La pieuvre». Née à Taher dans la wilaya de Jijel, Salima Mimoune est économiste de formation. Elle a exercé et exerce encore comme cadre dans diverses entreprises.

L’Expression : Il y a sans doute une origine très lointaine à l’éclosion de votre plume littéraire après vos études en économie qui ne vous prédestinaient pas à l’écriture, n’est-ce pas?

Salima Mimoune : J’ai grandi au milieu des livres. Ils ont fait partie de mon environnement familial depuis ma prime enfance. Il y en avait pour tous les âges, à commencer par la littérature de jeunesse aux classiques de la littérature mondiale. On me les mettait indirectement dans les mains, jusqu’aux moments où je décidais moi-même de mes préférences. Mon enfance a été une période-clé dans ma vie littéraire. Entrée par la grande porte dans ce monde merveilleux du livre, je n’ai pu en sortir depuis. La lecture est devenue pour moi un sacerdoce. Les belles-lettres, celles porteuses d’un message, décrivent des situations qui, même fictives, nous renvoient à la nature humaine dans toute sa complexité. Les mots, ces véritables joyaux avec leurs nuances et leurs tons qui les véhiculent, m’enrichissaient chaque jour et me fascinaient. Je voulais me les approprier à mon tour.

Peut-on savoir quand a eu lieu le déclic du passage de la lecture vers l’écriture?

Au collège, comme la plupart de mes camarades, je tenais un journal en cachette; c’était le recueil de mes premiers écrits. Il arrivait souvent que ma vie et celles de mes personnages se confondissent. Je leur empruntais des caractères et des postures et j’en inventais d’autres. Puis vint en fin de quatrième année la fête de remise des prix pendant laquelle l’un de mes poèmes fut sélectionné. Je fus appelée à le déclamer devant les élèves et leurs parents ainsi que les professeurs du CEM. C’était au lendemain du décès de ma mère, je voulais honorer sa mémoire. Je me rappelle bien des félicitations et des applaudissements en retour. C’était la première fois où un de mes écrits était publié. Au commencement donc était la poésie. Quel fut mon bonheur une fois adulte lorsque lors d’un séjour dans mon village natal je croisais mon professeur de français qui me confia avoir précieusement gardé mes rédactions dans ses tiroirs!

L’idée de devenir écrivaine et de publier des livres vous effleurait-elle à l’époque, surtout après ce premier succès poétique?

L’idée de me faire publier un jour ne m’avait pas encore effleuré l’esprit en ce temps-là. L’écrivain, à mes yeux, était une idole inaccessible, une légende ou un demi-dieu. J’ai fait plusieurs tentatives d’écriture qui sont restées dans mes tiroirs.

De l’économie à la littérature, avez-vous effectué une transition entre les deux ou bien votre présentation dans les deux domaines a eu lieu simultanément?

Il n’y a jamais eu de transition de l’économie à la littérature, ni de rupture avec cette dernière, le choix de la filière, économie, était une manière à moi de casser l’image d’Épinal où on ne voit chez nous la femme que dans l’enseignement ou la médecine.

Quand et comment s’est déroulé votre passage à l’écriture romanesque de manière concrète?

Les bouleversements observés dans la société algérienne durant les années de la décennie noire et celles qui l’ont précédée m’ont interpellée. De nouveaux comportements, de nouvelles idées dominantes entrainant de nouveaux rapports de force et une perte phénoménale de nos repères, toutes ces agressions ont amené le pays presque au bord de la dérive. Les écrivains ne peuvent pas rester insensibles à cela. La littérature et la culture de manière générale deviennent des guérites qui permettent d’observer et de s’engager.

C’est quoi écrire pour une femme algérienne?

Certes, en tant que femme je subis le poids de mon environnement social. Mais dès que je me mets à écrire, je ne suis plus dans une position de genre. Ce qui m’intéresse c’est la finalité de l’écrit, son message, sa teneur et la beauté du texte. En écrivant, je ne me suis jamais adressée uniquement aux femmes. Je n’aime pas cette catégorisation qui aborde de manière différente un livre signé par un homme ou par une femme.

Pourquoi?

Elle peut renvoyer à un conditionnement idéologique où l’écriture féminine est associée au sentimentalisme, à une écriture à «l’eau de rose» ou «fleur bleue» pour certains. Dans mon premier roman «Les ombres et l’échappée belle» paru en 2011 chez L’Harmattan, Chakib, le narrateur, est un homme, je me suis aisément glissée dans sa peau. Lorsque j’écris, j’aborde effectivement la condition de la femme, mais elle est inscrite dans la perspective de libération de l’Homme avec un grand H et donc de la société. C’est à ce niveau qu’il faudrait agir; à titre d’exemple, un homme qui n’est pas libre ne peut pas concevoir la liberté de sa conjointe. Il faudrait qu’il se défasse d’abord de ses chaînes; l’écrit et le savoir peuvent y participer. Écrire est un acte de résistance et déjà un acte citoyen.

La vie d’une femme change-t-elle avant et après la publication de son premier livre?

Homme ou femme, après publication d’un ouvrage il y a une grande satisfaction et une sensation d’accomplissement. Le sentiment d’avoir pris le chemin exaltant de l’écriture est galvanisant; on est déjà dans sa future œuvre. L’aventure se poursuit pour dire ce qui nous tient à cœur et ce que nous n’avons pas encore dit, toujours en beauté autant que faire se peut.

Quand vous écrivez, procédez-vous à l’autocensure du fait que vous soyez une femme?

L’autocensure n’est pas la marque exclusive des femmes. Elle est la résultante d’une culture et d’idéologies qui poussent l’auteur à s’interdire de narrer des situations ou de prendre position de peur de choquer, par intérêt ou pour plaire. À chacun son style et ses engagements, dans la vie, jusqu’à présent je n’ai pas vraiment rencontré de situation où je me suis censurée.

Peut-on savoir quels sont les auteurs qui vous ont le plus marquée et les romans qui vous ont le plus séduite?

En citant quelques auteurs, j’ai comme un sentiment de commettre une injustice vis-à-vis d’une pléiade d’écrivains qui ont marqué mon imaginaire et nourri ma passion pour la littérature. Chacun a eu sa baguette magique pour m’entrainer dans son monde et même pour façonner le mien. Brièvement, j’en cite Hemingway, Jack London, Tolstoï, Assia Djebar, Maïssa Bey, Mohamed Dib, Mouloud Feraoun, Mammeri, Steinbeck, Aragon, Prévert et bien d’autres.

On a constaté que vous participez régulièrement aux salons du livre et aux différentes activités littéraires qui se tiennent un peu partout. Que vous apporte ce genre d’événement en tant qu’écrivaine?

Je vais aux salons et différentes manifestations culturelles lorsqu’on m’y invite. Je réponds toujours favorablement, c’est l’occasion et une joie renouvelée à chaque rencontre avec mes lecteurs. Ce sont des moments très forts de communion, à titre d’exemple, une lectrice du Sud qui a pris l’avion juste pour se faire dédicacer lors du Sila 2018 mon second ouvrage «Le Bal des mensonges» paru en 2017 chez l’Enag. Je n’oublierai jamais notre étreinte, un bonheur inégalable!

Quels sont vos projets littéraires?

J’ai deux ouvrages en cours d’écriture: un recueil de nouvelles et un autre de poésies.

Source : Aomar Mohellebi – lexpressiondz

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