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Etat civil contre état militaire ! Et quoi encore?

by Mohamed Redha Chettibi
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par Mekideche Abdelkader*

Le hirak a commencé en apothéose, il finit en eau de boudin. Il a réalisé de grands exploits mais en même temps il a commis beaucoup d’erreurs. Pour le moment les hirakistes sont occupés à gérer le quotidien et se refusent à faire le nécessaire inventaire des actifs et des passifs de leur entreprise. Mais il faut bien qu’un jour la chouette de Minerve prenne son envol, et après le crépuscule du hirak, les hirakistes, après le temps de l’action reviennent à celui de la réflexion et regardent, avec le recul nécessaire, là où ils ont failli.

L’une des grandes erreurs stratégiques du hirak en tant que mouvement contestataire est certainement les accointances et les mariages contre-nature que ses leaders autoproclamés ont voulu lui imposer, causant sa division, son effritement et le désamour du public après le grand amour.

Tout le monde s’en souvient ; l’un des slogans les plus forts, qui fusait dans les rues, scandé à l’unisson par des millions de voix, était « madania machi askaria». L’adhésion à ce «leitmotiv» était unanime. Le peuple dans son extrême majorité opposait avec une profonde conviction l’état civil à l’état militaire, sans penser nullement au tiers état (l’état islamique, pourtant omniprésent dans beaucoup d’esprits dormants), tellement le traumatisme des années 90 est encore vivace dans sa mémoire. Cet objectif était une des clauses principales du pacte civil et politique tacite autour duquel l’union sacrée était faite. Cette clause était inscrite dans le contrat initial conclu en date du 22 février 2019. Mais, plus tard, quelques malins génies se sont cru en droit d’imposer au Hirak un avenant et de modifier le contrat originel par leur seule volonté unilatérale, sans aucune référence et sans aucune considération pour ce qu’ils appellent «la rue». Dans une première séquence on a vu Bouchachi, Bouragaa, Belarbi et Tabou aller rendre visite à Ali Belhadj chez lui.

Ce quadrumvirat tenait à diffuser le plus largement possible les images de cette rencontre pour faire passer un message subliminal. Tous les intéressés y ont vu un accord scellé entre les présumés défenseurs de la laïcité et de la démocratie et le plus emblématique représentant de l’aile dure de l’islamisme algérien qui a constamment fait montre de son rejet de la démocratie comme mode de gouvernance et de son corollaire l’état civil, une union sacrée entre deux adversaires naturels, un croisement d’intérêts conjoncturels entre les ennemis de toujours. Certains ont dénoncé cette accointance comme un reniement et comme une trahison, reprochant aux initiateurs de la rencontre d’avoir sacrifié sur l’autel de leurs ambitions personnelles le martyr des dizaines de victimes de la barbarie des années folles, qui n’avait commis comme crime que le seul exercice libre de leurs pensées.

La deuxième séquence fut la présence du mouvement RACHAD dans la rue, sans masque, de façon ouvertement déclarée et renforcée, avec ses moyens et ses mots d’ordre, et qui commençait à prendre une ascendance sur le hirak. Une présence que Tabou et ses alliés ont saluée et trouvaient naturelle et légitime.

Dès lors se posait la question nodale au sujet des intentions de ce conglomérat de tendances hétéroclites qui, il y’a si peu de temps, se sont fait une guerre sans merci: Est-il possible que s’allient, sans danger pour la société, même conjoncturellement, les défenseurs de l’état civil avec les défenseurs de l’État islamique? Il est clair que la stratégie des coalisés était celle-ci : étant donné qu’aucun ne peut le vaincre seul, alors tous contre l’état militaire et plus tard chacun pour soi. Cette option était-elle acceptable par le peuple ?

Toutes ces manigances étaient l’œuvre de quelques individus qui voulaient modeler l’avenir à leurs façons, et, pour cela, n’hésitaient pas à jouer à la roulette russe et de parier sur l’avenir et jouer la vie de milliers d’individus, car il est évident que si leur projet avait réussi il aurait abouti, in fine, à une guerre entre les tenants de l’état civil et ceux de l’État islamique. Car personne ne peut croire que Rachad ou Ali Belhadj puissent renoncer au projet de l’instauration d’un état islamique, et personne ne peut croire non plus que Karim Tabou puisse renoncer à l’instauration d’un état civil. Pour les islamistes, l’instauration de l’État islamique est un impératif catégorique. Le négocier relève de l’apostasie. C’est pourquoi la haine entre eux et les laïques défenseurs de l’État civil est viscérale et la paix entre eux ne peut être qu’un projet éphémère, le scénario libyen devenant, de ce fait, une option très sérieuse. Cette règle, ce fossé profond qui sépare état théologique et état civil, ont été clairement affirmés dans la fameuse querelle organisée en 1992 au Caire à l’occasion du salon du livre et qui a opposé, d’un côté Mohamed El Gazali, le guide des frères musulmans Mahmoud el Hodaibi et le théoricien Mohamed Amara et de l’autre côté le grand penseur Faradj Fouda. Les premiers défendaient l’État islamique en Egypte et le second militait pour l’état civil. Lors des débats, Mohamed El Hidaibi avait refusé jusqu’à l’usage de la notion « d’état civil », lui préférant celle de « d’état «non islamique » pour signifie que tout état civil est considéré comme un état contre l’islam, qu’il est hérétique et qui est par conséquence condamnable en soi et voué à la guerre et la destruction.

À la suite de cette querelle, le 3 juin, le journal El Bayan, organe des frères musulmans, publia une déclaration émanant de quelques ulémas d’Al Azhar, qui a considéré Faradj Fouda comme un apostat. Une fatwa fut émise contre lui. Et,5 jours après, le 8 juin 1992, Faradj Fouda fut assassiné à bout portant par le groupe Abou Al Ala Abde Rabou. Lors du procès de ce dernier, Mohamed El Gazali justifia l’assassinat de Faradj Fouda pour avoir était un fervent défenseur de l’état civil. A l’issu du procès Abou Al Ala Abd Rabou fut condamné à perpétuité. Mais, le premier mois après son accession au pouvoir suprême en Egypte, le président Mohamed Morsi gracia l’assassin de Faradj Fouda. Ce dernier, élargi, alla renforcer les rangs du groupe Al Nosra en Syrie où il mourut.

C’est cela la réalité de la confrontation idéologique irréconciliable entre les tenants de l’état civil et les tenants de l’état théologique que les leaders du hirak ont voulu occulter pour justifier des alliances auxquelles le peuple n’a pas été associe. C’était-là une des erreurs majeures: en jouant solo en violation de toute règle de démocratie, et en voulant risquer l’avenir de tout le peuple sans considération pour ce qu’il veut, ils ont desservi un mouvement qui a commencé très grand et qui fut plein de promesses.
*Avocat

Source: http://www.lequotidien-oran.com/

 

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