La santé financière de la France, deuxième économie de la zone euro, a atteint un seuil critique, selon les révélations alarmantes de Pierre Moscovici, président de la Cour des Comptes française, mises en lumière dans un récent podcast du professeur Kamal Deeb intitulé « فرنسا تدخل رسميا خمس سنوات عجاف ماليا » (« La France entre officiellement dans cinq années de vaches maigres financières »). Cette analyse dépeint un tableau sombre d’une dette insoutenable, de déficits structurels et d’inertie politique qui menacent de déstabiliser non seulement la France, mais toute la zone euro.
Une bombe à retardement financière
La dette publique française s’élève désormais à 113 % du PIB — la troisième plus élevée de la zone euro —, avec des coûts annuels de service de la dette avalant à eux seuls 50 milliards d’euros. Parallèlement, le déficit budgétaire a explosé pour atteindre 6,1 % du PIB (180 milliards d’euros), soit le double de la limite autorisée par les règles européennes. Pierre Moscovici avertit que la situation n’est plus simplement « préoccupante », mais qu’elle est entrée dans une zone « dangereuse ». Ces chiffres, insiste-t-il, reflètent les conséquences d’une gestion fiscale hasardeuse durant le deuxième mandat du président Emmanuel Macron, qualifié par les experts de « catastrophe financière ».
L’illusion de l’austérité
Pour se conformer aux exigences européennes, la France doit réduire son déficit à 3 % du PIB d’ici 2029. Cela impliquerait une réduction annuelle du déficit de 0,6 % sur cinq ans — un objectif jugé « extrêmement difficile » par Moscovici, compte tenu du contexte géopolitique et économique actuel. Pourtant, même cet objectif modeste repose sur des mesures d’austérité politiquement risquées. Le gouvernement prévoit de rationaliser les dépenses en supprimant des centaines d’agences publiques (près de 700) jugées inefficaces ou redondantes. Par exemple, l’Agence BIO, dotée d’un budget annuel de 2,9 millions d’euros et employant 29 agents, sera fermée en 2025. De même, le Haut-Commissariat aux Plans, créé en 2020 sous l’égide de l’actuel Premier ministre Gabriel Attal, n’a produit qu’un seul rapport en quatre ans — ignoré par les autorités — malgré un budget de 1,9 million d’euros par an.
Cependant, ironie du sort, le gouvernement Attal s’oppose farouchement à la suppression de certaines de ces structures, perpétuant ainsi un système clientéliste et aggravant le déficit. « La résistance politique à ces réformes est un suicide économique », résume Moscovici.
Moscovici : Dérapage du déficit : « On s’est trompé sur tout »
Dans une intervention retentissante lors du Grand Jury RTL-Le Figaro-Public Sénat le 26 janvier 2025, Pierre Moscovici, premier président de la Cour des comptes, a dressé un constat accablant : « On s’est trompé sur tout en 2023 et 2024. On s’est trompé sur les prévisions macroéconomiques, sur les dépenses, sur les recettes ». Initialement estimé à 4,4 % du PIB à l’automne 2023, le déficit public s’établit finalement à 6,1 % — un écart qualifié de « faillite des prévisions » —, bien au-delà des 3 % tolérés par Bruxelles.
« Certaines mauvaises surprises étaient difficiles à prévoir […] mais il est impossible de prétendre que personne ne connaissait la fragilité répétée des prévisions », a-t-il asséné devant les députés de la commission d’enquête de l’Assemblée nationale. Ces erreurs, selon lui, révèlent un déni systémique des risques et une absence de rigueur dans la gestion des finances publiques. Pour éviter de répéter ces erreurs, Moscovici plaide pour une réforme urgente des méthodes de prévision et une supervision indépendante des hypothèses budgétaires.
Un contexte mondial hostile
La France tente de naviguer dans une tempête parfaite : hausse des taux d’intérêt de la BCE, coûts énergétiques volatils, et dépenses publiques galopantes dans des secteurs comme la défense et la transition écologique. Les « années noires » de 2022 et 2023 ont laissé des séquelles durables, et le plan de redressement de 2024-2029 repose sur des hypothèses optimistes — croissance du PIB à 1,4 % par an, stabilité géopolitique — qui semblent irréalistes face aux crises ukrainienne, moyen-orientale et asiatique.
Urgence absolue : Un appel à l’action
Pour éviter un scénario à la grecque — où la dette entraîne une cure d’austérité brutale imposée par l’UE —, la France doit adopter des réformes structurelles douloureuses : réduction des niches fiscales, modernisation de l’administration, et révision des dépenses sociales. Mais avec des élections européennes en 2024 et une polarisation politique croissante, la classe dirigeante semble paralysée.
« Sans courage politique, la France deviendra le maillon faible de l’Europe », conclut Moscovici. Le temps presse : les cinq prochaines années détermineront si le pays peut éviter un effondrement financier ou sombrer dans une décennie perdue.
et des déclarations de Pierre Moscovici au Grand Jury RTL-Le Figaro-Public Sénat (26/01/2025).
Hope&ChaDia