Il n’y a jamais eu de contrat formel entre l’Algérie et la Chine pour la réalisation du port de Hamdania. Voilà la réalité que certains médias – trop empressés d’y voir un basculement géopolitique – ont délibérément ignorée. Ce projet d’infrastructure stratégique reste d’actualité, mais s’inscrit désormais dans une vision plus large et plus équilibrée de l’aménagement portuaire algérien.
Une manœuvre médiatique tripartite : EAU, Maroc, France
La polémique autour du projet du port de Hamdania n’est pas née de nulle part. Elle s’inscrit dans une opération concertée menée sur plusieurs fronts médiatiques, où chacun joue sa partition pour alimenter l’idée que l’Algérie serait instable, contradictoire, ou en perte de repères stratégiques.
Côté émirati, la chaîne Al Mashhad s’est empressée d’annoncer « l’abandon officiel » du projet au profit d’un partenariat français. Elle parle d’un « revirement inattendu » et met en avant Rodolphe Saadé comme proche de Macron, suggérant une manœuvre politique à peine voilée, en pleine tension algéro-française. Le message est clair : l’Algérie aurait renié la Chine et se rapprocherait de son ex-colonisateur pour apaiser les tensions. Une lecture déformée, tendancieuse, et totalement infondée.
Côté marocain, le site Yabiladi a poussé encore plus loin, affirmant que l’Algérie aurait puni la Chine pour sa position supposée sur le Sahara Occidental. Cette hypothèse, à haute valeur symbolique, relève d’une pure manipulation géopolitique. Elle projette sur l’Algérie une logique de repli et de confusion, dans le seul but de valoriser le Maroc comme alternative logistique stable via Tanger Med.
Côté français, L’Opinion a servi de point de départ à toute la séquence. Son article, rédigé dans un ton prudent mais biaisé, a laissé entendre que l’Algérie s’éloignait de la Chine sans jamais vérifier les faits auprès de sources algériennes. En publiant cela dans le sillage de la visite de Saadé à Alger, le média a offert à Paris une lecture favorable, tout en alimentant l’illusion d’une reconquête d’influence.
Ces trois axes de communication ont un objectif commun : fragiliser l’image d’une Algérie autonome, et faire croire à un alignement forcé dans un monde bipolaire.
Mais la réalité est tout autre : l’Algérie choisit ses partenaires, fixe ses conditions, et trace sa route sans renier ni ses principes, ni ses alliés historiques.
En réalité, la décision de ne pas signer avec la Chine repose sur un principe simple : la souveraineté ne se négocie pas. La Chine proposait de financer le projet mais sans prendre part à sa gestion ou son exploitation. Pour Alger, accepter un montage financier déséquilibré, où les risques ne sont pas partagés, n’était pas envisageable. Et contrairement à la propagande conjointe de certains cercles marocains, français et émiratis, refuser un contrat défavorable ne signifie pas rompre une alliance stratégique.
Au lieu de céder à une logique de dépendance, l’Algérie construit une stratégie de développement portuaire multipolaire. Oui, CMA CGM est aujourd’hui présente dans plusieurs ports algériens. Oui, des discussions, certainement sur sa demande. sont en cours avec son PDG Rodolphe Saadé. Mais aucun monopole ne leur est accordé. Alger entend diversifier ses partenariats tout en gardant le contrôle total de ses infrastructures. C’est cette lucidité stratégique – ni hystérique, ni soumise – qui gêne les puissances habituées à dicter les règles.
Loin de toute agitation, l’Algérie avance avec constance. Une société nationale spécialisée dans les grands travaux maritimes a été créée, un plan de modernisation des ports (10 milliards $ sur dix ans) est lancé, et les extensions de Djendjen et Annaba sont en cours. C’est une stratégie intégrée, pensée dans le temps long, et pilotée avec sérénité.
L’Algérie ne gesticule pas, elle agit. Elle ne crie pas sa souveraineté, elle la pratique. Et ce calme-là, cette force tranquille, est ce qui dérange le plus.
Ceux qui se bousculent pour nous expliquer ce que l’Algérie « aurait décidé » sont souvent les mêmes qui soutiennent la normalisation avec Israël, justifient les guerres de l’OTAN, et piétinent leurs propres principes dès que leur influence recule. Mais l’Algérie n’a pas vocation à jouer dans leurs récits : elle écrit le sien. À son rythme. Selon ses priorités. Et avec le peuple algérien comme seul repère.
L’Algérie n’a ni trahi Pékin, ni basculé dans les bras de Paris. Contrairement aux lectures biaisées qui circulent, elle peaufine une stratégie indépendante, ferme et réfléchie — fidèle à sa souveraineté, libre dans ses partenariats, et imperméable aux pressions extérieures.