Dans le paysage politique français dominé par les postures creuses et les indignations vides de sens, entendre un ancien haut responsable parler avec clarté et réalisme relève presque du miracle. Et pourtant, Henri Guaino, ancien conseiller spécial du président Nicolas Sarkozy, a eu ce rare moment de lucidité publique : “Nous n’avons aucun moyen de rétorsion sur l’Algérie.”
Guaino, une voix isolée mais lucide
Dans une émission politique marquée par les tensions franco-algériennes, Henri Guaino, réputé pour sa plume et sa proximité avec Sarkozy, jette un pavé dans la mare. Il admet, sans détour, l’impuissance totale de la France face à Alger. Une confession aussi brutale qu’instructive, qui tranche avec le déni ambiant des élites françaises.
La France face à ses limites stratégiques
Aucun levier économique. Aucun levier diplomatique. Aucun transfert de fonds significatif. Les sanctions ? Inutiles. Le rapport de force ? Hors de portée. “Il faut avoir les moyens de sa politique, or nous ne les avons pas.” Voilà le cœur du malaise. L’État français n’est plus capable de mener une politique étrangère cohérente, ni de défendre ses intérêts dans une région qu’il prétend pourtant connaître.
Henri Guaino ne s’est pas contenté de déplorer l’impuissance de la France face à l’Algérie ; il a dessiné une carte bien plus large du déclassement stratégique français dans le jeu mondial actuel. Et le constat est sans appel : la France est encerclée diplomatiquement, sans alliés fiables, ni leviers concrets dans une Méditerranée qu’elle croyait autrefois dominer.
D’abord, la Russie. Historiquement proche de l’Algérie, Moscou a renforcé ses liens militaires et énergétiques avec Alger ces dernières années. Et maintenant que Paris est en froid glacial avec le Kremlin – notamment depuis le début de la guerre en Ukraine – cette alliance russo-algérienne devient un caillou géopolitique dans la chaussure française. La Russie ne soutient pas seulement l’Algérie par solidarité historique ; elle l’encourage à prendre des positions plus fermes face à l’Occident, jouant ainsi un rôle d’amplificateur dans les tensions franco-algériennes.
Ensuite, la Chine. Pékin investit massivement en Afrique du Nord et en Algérie notamment, via ses grandes entreprises et ses projets d’infrastructure stratégiques. Dans le silence, la Chine tisse une toile économique et diplomatique que la France ne peut plus concurrencer. Là où la France agite des discours sur les droits humains ou la démocratie, la Chine construit des autoroutes, des ports et des hôpitaux. Et ça, ça pèse.
Et maintenant, les États-Unis. Longtemps partenaires privilégiés de Paris sur les dossiers africains, Washington prend aujourd’hui des chemins plus autonomes. Le rapprochement discret mais réel entre les États-Unis et l’Algérie est un signal fort : même les alliés traditionnels de la France misent sur une Algérie montante, perçue comme un acteur incontournable dans la stabilité énergétique, la sécurité sahélienne et les flux migratoires.
Pendant ce temps, l’Italie avance ses pions, sans faire de bruit. Giorgia Meloni multiplie les visites à Alger, signe des accords migratoires, énergétiques, économiques. Elle comprend que pour maîtriser l’Afrique du Nord, il faut parler avec ses dirigeants, et non leur faire la leçon depuis Paris. Rome est en train de voler à la France sa place d’interlocuteur méditerranéen crédible – en cultivant une diplomatie souple, pragmatique, décomplexée.
Et la France ? Elle reste figée dans un paradigme dépassé, suspendue entre une nostalgie coloniale mal digérée et une dépendance idéologique vis-à-vis de l’Occident atlantiste. Elle veut imposer sans pouvoir. Elle veut convaincre sans respect. Elle veut punir sans moyens. Ce que Guaino résume brutalement : “Nous n’avons aucun moyen de rétorsion sur le gouvernement algérien.” Tout est dit.
Le désarroi d’un pays sous tutelle idéologique
Ce désarmement n’est pas qu’économique ou militaire – il est aussi mental. La France vit sous une forme subtile de tutelle idéologique, alignée sans nuance sur les intérêts de Washington et de beaucoup plus ceux de Tel-Aviv. Comment espérer un dialogue équilibré avec Alger, quand Paris criminalise toute parole critique vis-à-vis d’Israël et piétine chaque jour un peu plus la cause palestinienne ? Le sionisme politique, plus qu’une influence, est devenu une grille de lecture unique – au détriment des intérêts français eux-mêmes.
Pendant ce temps, l’Italie avance
Guaino souligne un autre paradoxe : l’Italie de Giorgia Meloni, pourtant décriée, obtient des résultats. Elle signe des accords directs avec les pays du Maghreb, dont l’Algérie, pour juguler les flux migratoires. Elle parle moins, mais agit. Et surtout, elle comprend que la souveraineté commence par la coopération régionale, pas par l’arrogance impuissante.
La crainte du chaos contrôlé
Guaino va même jusqu’à évoquer le scénario où l’Algérie – poussée par Moscou – ouvrirait des couloirs migratoires massifs vers l’Europe. “La Russie à travers l’Algérie peut nous faire beaucoup plus de mal sans avoir besoin de la bombe atomique.” Une phrase choc, mais symptomatique d’une peur bien réelle à Paris : celle d’une Afrique qui échappe à son contrôle, et d’une Méditerranée qui ne répond plus.
Quand la France n’est pas les États-Unis… et l’Algérie, encore moins la Colombie
Dans un moment de lucidité devenu rare, Henri Guaino lâche une formule que peu de responsables osent prononcer à voix haute : “Contrairement à ce que disent certains, l’Algérie n’est pas la Colombie, et nous ne sommes pas les États-Unis.”
C’est le cœur du problème français résumé en une phrase : la France se rêve encore comme une superpuissance capable de dicter ses conditions, alors qu’elle n’a plus ni l’aura, ni les moyens, ni les relais pour le faire. L’Algérie n’est pas une république bananière à qui l’on impose des choix par envoi de diplomates ou menace de sanctions. Et la France, malgré son passé impérial, n’a plus la stature ni l’influence d’une puissance qui fait plier.
Ce déséquilibre d’analyse — croire qu’on peut encore agir comme les États-Unis sans en avoir ni la puissance militaire, ni l’influence économique, ni le poids géopolitique — mène la diplomatie française droit dans le mur. Car au fond, ce n’est pas seulement l’Algérie qui échappe à Paris. C’est le monde entier qui ne veut plus jouer selon ses règles.
Et tant que cette réalité ne sera pas pleinement assumée, la France ne pourra ni regagner sa voix propre, ni construire de véritables partenariats dans une Méditerranée qu’elle ne comprend plus.
Alors oui, un politique lucide, ça existe encore. Henri Guaino l’a prouvé. Mais cette lucidité, à quoi sert-elle si elle reste sans suite ? Une parole juste dans un désert d’aveuglement ne suffit pas à redresser une politique étrangère devenue incohérente, illisible, soumise. La France sait-elle encore ce qu’elle veut ? Ou plutôt, sait-elle encore penser par elle-même ?
Hope&ChaDia
2 comments
Les Français sont témoins du niveau de ceux qui les gouvernent!
Des incompétents avec des réactions puériles qu’ils doivent à tout prix écarté du pouvoir lors des prochaines échéances électorales.
Ils se servent de l’immigration en particulier algérienne pour provoquer l’Algérie. Un ministre de l’intérieur Retailleau qui se sert d’un voyou et drogué Algérien inculte pour faire de la “politique” anti-algérienne? C’est ça son niveau? Quelle déchéance! Il ne peut donc que lui ressembler.
Ils ne peuvent même pas défendre leurs gendarmes “tabassés” en Israël, ils s’ingénient pour défendre un Algérien traître condamné par la justice algérienne . De quoi je me mêle? Cet Algérien serait plus important que leurs gendarmes parce que plus utile?
Ce Retailleau semble plus fort que son président au point où il fait subir à la France une série d’humiliations sans que Macron ne disent mot!
Français nettoyez cet écurie; vous êtes “Hercule”!
Le 1er acte de bonne volonté de la part de Macron est de mettre fin aux fonction de ce cancre Retailleau!
Qu’ils soient certain que c’est l’abcès de fixation qu’il faut extirper!
Si cet écervelé de Retailleau vaut plus que les relations algéro-françaises, alors grand bien leur fasse!
Et que chacun s’occupe son cheptel!