Source: The Casbahpost.com publié le 19 février 2017
Le tatouage est un dessin esthétique et symbolique réalisé sur la peau en déposant de l’encre entre le derme et l’épiderme. On rencontre cette tradition de l’Afrique du Nord à l’Océanie en passant par le Moyen Orient. Le terme provient du tahitien tatau signifiant dessiner ou marquer la peau. En Algérie, sa pratique traditionnelle est appelée lewcham ou el-âyacha signifiant celui qui fait vivre, en raison de la fonction thérapeutique ou protectrice qui lui est conférée.
Le tatouage traditionnel en Algérie est une pratique pré-islamique en voie de disparition que l’on retrouve en particulier chez les femmes issues des générations précédant l’indépendance du pays.
Selon l’anthropologue Yasmin Bendaas, ce dernier mythe n’est pas dénué de fondement puisque durant la colonisation certaines femmes ont effectivement adopté des tatouages à des fins politiques. Ces derniers auraient été empreints de symboles locaux de résistance et de protection, à l’instar du burnous et du rikab utilisé par les cavaleries.
La chercheuse, qui s’est intéressée aux tatouages traditionnels des femmes chaoui de la région de l’Aurès, souligne que le manque de connaissance sur la signification des tatouages traditionnels indique que la tradition était déjà en voie de disparition bien avant que les générations actuelles ne se fassent tatouer durant les années 1930 et 1940. De plus, les symboles étaient souvent choisis par le(la) tatoueur(euse) plutôt que par la personne tatouée, rendant la recherche de sa signification et de son origine d’autant plus difficile à déterminer.
Dans la description des nomades, les interviewés notent que la adasiya parlait arabe, ce qui expliquerait pourquoi les noms des tatouages sont en arabe et non en chaoui. Le mari de Masouda se souvient que la adasiya était une femme qui voyageait par cheval avec ses cheveux tressés de chaque coté. Elle toquait de porte en porte et acceptait souvent de la farine, des oeufs et des chaussures à la place de l’argent pour ses services.
Yasmin Bendaas
Le tatouage a de multiples fonctions. Il est tout d’abord esthétique dans un contexte où les tatouages étaient des marqueurs de beauté et de féminité. Le tatouage met de la sorte en scène plusieurs symboles. Chaque symbole, de la lune à l’oeil de la perdrix (ain el hajla), est placé dans un endroit particulier et comporte sa propre signification. La perdrix par exemple est représentée avec un losange du fait d’un losange blanc présent sur la tête et la gorge de l’animal. La perdrix en Algérie est un oiseau qui est souvent associé à la beauté et à la grâce. Les tatouages placés sur la poitrines ou au dessus des chevilles font usage de motifs représentant la fertilité, tandis que ceux qui sont placés sur les bras tendent à mettre en scène des scorpions ou des gazelles.
La fonction du tatouage est également thérapeutique, il vise alors à favoriser la fécondité ou protéger du mauvais sort (pouvoir magique) et guérir des maladies en l’absence de docteurs. Lorsqu’ils sont des outils de guérison, les tatouages étaient aussi mobilisés par certains hommes.
Enfin, selon la linguiste Lucienne Brousse, le tatouage est aussi un marqueur de statut social et d’appartenance clanique. Dans son ouvrage Beauté et identité féminine : Lewcham, elle s’est lancée dans un exercice de reconstitution et d’interprétation des dessins réalisés par Eliane Ocre, infirmière en Algérie et qui avait recueilli des centaines de symboles de tatouages traditionnels.
La palme
Les relevés représentant la palme, provenant de la région de Touggourt, au sud-est d’Alger, sont des dessins particulièrement riches qui, sauf exception, ne sont pas figuratifs. La palme, tout comme le palmier, a pour certaines femmes le statut (non-dit) de « déesse-mère », source de la richesse et figure protectrice à l’instar de l’ombre protectrice du palmier.
Lucienne Brousse
Si le tatouage traditionnel disparaît au fil des mutations de la société, les symboles ont cependant été transmis de génération en génération. En effet, à travers les peintures rupestres ou l’artisanat dont le tissage, la poterie, la broderie, la peinture ou encore la gravure, ils occupent une place unique dans les arts et constituent un élément fondamental du patrimoine algérien.
3 comments
Article très intéressant , merci pour ce partage. Cela peut être un excellent sujet de recherche pour des étudiants !
Ouiiiiiiiiiii très bel article
Du temps de la colonisation, on m’avait affirmé que le tatouage, en plus d’être utilisé à des fins “médicinale” (croyances populaire, dans le nord de l’Afrique, et je pense de bien d’ailleurs !) !! Il y avait une utilisation qui avait été faites par les pères blancs, lorsqu’ils voulaient transmettre à leurs confrères de même religion , le ou les quelques fidèles récemment convertis au christianisme et ainsi, leurs nouveaux croyants étant “marqués” ils pouvaient se reconnaître entre eux !
Je sais juste une chose, à l’époque de l’occupation de notre terre, la France avait une politique très agressive à l’encontre de la population indigène, autrement dit, les Algériens ! (Je ne parle pas des autres peuplades, mais uniquement des Algériens). Sous certaines conditions pouvant permettre à la population de “survivre” ceux ci devaient démontré leurs reconversions au christianisme, c’est ainsi que l’on peut retrouver, de nos jours des Algériens chrétiens, mais comme ils sont né chrétiens, ils ont du mal à s’en rendre compte, car ceci (la foi du christianisme) est devenu toute légitime dans leurs foyers, puisque né chrétien et ne pouvant faire le lien entre l’origine de leurs reconversion aux christianisme de leurs arrières parents, ils vivent cette foi comme si ceci avait été une foi ancestrale, ayant eu sa place durant des siècles, alors que ceci est depuis l’arrivé de l’occupant Français.
je sais que pour les Algériens qui devaient vivre, ou voulaient vivre en France, ces derniers devaient renoncer à leurs religions l’Islam, pour accepter le Christianisme. La raison de cette conversion était à double titre, aussi bien pour donner sa part à l’Eglise, car la France avait reçu la bénédiction de l’Eglise, pour pouvoir faire ce qu’elle avait fait en terre d’infidèle, de Sarasin j’ai nomme les Musulmans (que nous étions aux yeux de l’Eglise et à ses fidèles).
Et de l’autre coté, il y avait aussi le fait que les Algériens qui avaient émigrés en terre de France devaient rester en France, loin de leurs famille, afin de ne pas rapporter ce qui se fait en France et d’encourager les Algériens à la révolte, un peu comme ce fut le cas, durant les deux guerres mondiaux, qui ont permis aux Soldats Algériens de découvrir que la France n’était pas si puissante et si riche que ça, mais qu’il suffirait de lui résister un peu et de pratiquer le même rapport de force qu’elle, pour la ramener à sa place !
Donc, le TATOUAGE était à des fins de contrôle des Algériens et de se mettre ceux qui seraient avec elle et ceux qu’elle ne pouvait contrôler (enrôler à ses cotés, dans son armée) !
Wa allah ya3 lam !