Source: aps.dz Mardi, 09 Mars 2021
Le phénomène est nouveau, remonte à quelques années seulement et concerne une tranche d’âge qui a connu la soumission à l’interdiction de travailler, d’étudier, de faire le marché, de participer à des activités sportives et autres.
Si l’émancipation de la jeune femme est une réalité dans les villages de Kabylie, où la femme de 50 ans ou moins, a fait ou suit des études universitaires, travaille et accède à des postes importants, pratique ses loisirs, les plus de 50 ans et notamment celle âgées de 60 ans et au-delà, se sont émancipées discrètement et progressivement pour s’exposer enfin, en plein jour, comme acteur incontournable dans le développement et le bien-être de leur communauté.
L’action écologique, libératrice de la femme rurale
Cette démarche d’émancipation des femmes rurales est née dans le sillage des campagnes de préservation de l’environnement. Les opérations de nettoyage lancées par des associations et comités de villages ont progressivement suscité l’intérêt de la gent féminine qui s’est organisée pour contribuer, elle aussi, à cet élan d’amélioration du cadre de vie dans lequel elles évoluent.
De participantes, elles deviennent organisatrices et prennent des initiatives en lançant, elles même, des opérations de nettoyages et d’embellissement de leurs villages, de réhabilitation des maisons traditionnelles et autres activités qui se déroulent dans une ambiance bon-enfant, truffée de rires et de taquineries comme seules les femmes rurales, qui ont gardé l’art de la réplique de leurs aïeules, savent lancer.
Plus impliquées que leurs concitoyennes citadines dans la vie communautaires, elles vivent pleinement leur émancipation. Elles sont présentes partout, ignorant les “qu’on dira-t-on”, et encourageant d’autres à faire comme elles.
Les conférences sur les maladies chroniques en général et celles touchant les femmes en particulier, les rencontres de sensibilisation et de formation sur la création d’emplois en milieu rural, notamment en agriculture et artisanat, les cours d’alphabétisation, les randonnées et autres activités sportives les attirent en nombre de plus en plus grandissant, dans une sorte d’avidité à rattraper le temps perdu.
Un comité de village au féminin
C’est dans cette démarche que des femmes du village Ath Aziz dans la commue d’Illoula Oumalou (Est de la wilaya) osent “l’inimaginable”, en créant un comité de village composé exclusivement de femmes en septembre 2020.
Composé de jeunes universitaires, mais aussi de femmes plus âgées, pour une meilleure représentation de la communauté villageoise, ce comité, dont les membres ont été élues lors d’une assemblé générale, s’est fixé pour mission de se mettre au service du village et contribuer à l’amélioration du cadre de vie aux côtés des hommes.
Mais de toutes les régions de Tizi-Ouzou, la localité de Bouzeguène et celle qui sort du lot grâce à un mouvement féminin très actif ayant inscrit à son compte deux actions importantes qui ont enflammé les réseaux sociaux.
La première est l’œuvre de l’association “Afous Deg fous” (main dans la main), à caractère humanitaire et social, du village Ahriq créée en 2015, qui a construit une salle de soins afin d’éviter aux malades, notamment les vieux et ceux souffrant de pathologies lourdes et handicapantes, les longs déplacements vers la ville de Bouzeguène pour se soigner.
L’idée est née d’une proposition d’une malade non-voyante, à qui les membres de cette association rendaient visite, dans le cadre de ses missions pour lui prodiguer des soins, se souvient Tassadit membre de cette organisation de la société civile. L’initiative a été vite adoptée par l’association féminine qui l’a proposée au comité de village d’Ahriq, lequel a encouragé les femmes à relever le défi, a-t-elle ajouté.
Une collecte de fonds a été lancée et une fois la somme nécessaire pour la concrétisation du projet réunie, les travaux ont aussitôt démarré pour être achevés au bout de sept mois seulement, a ajouté Tassadit.
En octobre dernier, les femmes de Bouzeguène récidivent, déterminées à arracher plus d’espace au sein de la société, et enflamment la toile en organisant un tournoi de football exclusivement féminin. Un mini tournoi organisé par l’association féminine du village Sahel qui a opposé l’équipe de ce même village à celle de Tabouda (commune d’Illoula Ouamlou).
La vue des septuagénaires jouant au ballon rond n’a pas laissé le public indifférent et beaucoup ont salué cette l’initiative, souhaitant sa généralisation à d’autres villages et pourquoi pas aux villes, où la femme est parfois moins impliquée que sa consœur des villages.
A Travers ce match, les villageoises veulent casser les tabous et s’intégrer dans plusieurs activités dont le sport comme elles le font d’ailleurs en participant au semi-marathon féminin de Ain El Hammam, où des femmes flanquées de robes traditionnelles mais bien chaussées, participent du haut de leur 60 voire 70 ans et plus, à cette compétition. Il s’agit de les encourager à aller de l’avant en sensibilisant à travers ce type d’initiatives sur la question des droits de la Femme, a souligné pour sa part Fadhila, du village Sahel.
1 comment
Même à 60 et 70 ans, ces braves femmes sont animées par un dynamisme juvénile ! Leur fontaine de jouvence est l’intérêt général de leurs villages ! Quelle bravoure ! L’esprit communautaire est ancré en elles, même l’âge ne constituent pas un obstacle pour elles, au contraire, elles lui imposent leur dévouement et leur amour pour la terre qui de toute façon, les rajeunira tant qu’elles seront en vie ! car la terre est toujours reconnaissante !